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Le couscous est un art

Articles parus dans Courant alternatif, n° 60, novembre 1986, p. 5-8


Une manifestation unitaire anti-raciste contre les lois Pasqua-Pandraud sur l’entrée et le séjour des immigrés en France n’aura vraisemblablement pas lieu début décembre à Paris !

Et pourtant, par leur grève de la faim, les Jeunes Arabes de Lyon et Banlieue (JALB) avaient réussi à entraîner dans leur sillage toutes les composantes de l’anti-racisme. Cette unité n’avait été possible que dans la mesure où les organisations, associations de soutien à l’immigration sont toujours en recherche d’une réponse politique de gauche, massive, à la droite au pouvoir et où les associations de l’immigration ou issues de celle-ci sont aujourd’hui complètement éclatées.

Dans le marasme actuel, la devise « plus unitaire que nous, tu meurs » est la base de bien des discours. Nous pensions que l’impasse de part et d’autre des deux grandes tendances de l’anti-racisme était telle, qu’une démarche unitaire, proposée par des individus ou organisations ayant une stratégie bien précise, avait toutes les chances de triompher même si aucun des problèmes de fond n’était réglé (C.A, n° 59).

Surprise !? Lors de la rencontre nationale du 5 octobre 86 à Paris, l’unité éclatait. Doit-on le regretter ?

L’APPEL UNITAIRE

Un appel à la mobilisation contre le racisme, pour les libertés et pour l’égalité des droits invitait à cette réunion nationale du 5 octobre. Cet
appel avait été approuvé par la totalité des participants à une réunion unitaire qui s’était tenue le 20 septembre à l’initiative du « Collectif j’y suis, j’y reste » de Paris.

Une trentaine d’associations et d’organisations affirmaient leur détermination à continuer la lutte (engagée en juin 86 par les JALB) après l’adoption des lois Pasqua-Pandraud concernant l’entrée et le séjour des immigrés en France :
– Par la résistance à l’application de ces lois (décrets d’application, expulsions…) ;
– Par la revendication de l’abrogation de ces lois ;
– Par la dénonciation des lois et du climat sécuritaire et des atteintes aux libertés démocratiques concernant l’ensemble de la population en France (droit d’asile, code de la nationalité…) ;

Elles appelaient à engager une large campagne nationale unitaire sur ces thèmes en s’appuyant sur les initiatives suivantes :

– Actions locales, de résistance (face aux expulsions recensées par exemple) et l’organisation de rassemblements : concerts et autres manifestations, affichages massifs ;
– Mobilisation nationale le 6 décembre pour les libertés et contre le racisme, comme première centralisation nationale de la campagne.

Cet appel, où tout le monde pouvait s’y retrouver, ne fut jamais remis en cause quant à son contenu ce qui explique partiellement l’incompréhension de certains participants à cette réunion quant aux tenants et aboutissants réels de la scission qui allait se dérouler sous leurs yeux.

LES ABSENTS

Mais, on ne pouvait que remarquer l’absence de nombreuses associations issues de l’immigration, pourtant invitées, qui avaient délibérément boycotté cette réunion unitaire. Ce boycott a très certainement plusieurs explications :

– Beaucoup d’associations, dégoûtées du terrain central politicien, préfèrent
n’intervenir que localement ;
– Certaines ont abandonné tout terrain politique pour ne se consacrer qu’à des activités strictement sociales et/ou culturelles ;
– Beaucoup vivotent en l’absence de toute perspective et surtout de résultats concrets significatifs après les marches de 83, 84 et 85.

Le mouvement associatif se cherche mais sa quasi-absence (quelques associations de Lille, Roubaix et région parisienne étaient malgré tout omniprésentes) ne gênait absolument pas les initiateurs de cet appel unitaire. Pour eux, il y a urgence de regrouper tous les démocrates contre le gouvernement de droite. Leur démarche est simple : la droite étant de retour au pouvoir, les organisations et associations démocratiques doivent s’unir pour descendre massivement dans la rue. Il faut donc mouiller la gauche en mettant en avant le thème oh combien vague de défense des libertés. Cette recette semble usée, dépassée, car elle fait fi de tous les changements politiques & sociaux et économiques intervenus ces dernières années. Dans le meilleur des cas, si SOS-Racisme et la LCR la maintenaient malgré tout, elle aboutira à seulement quelques milliers de personnes dans la rue le 6 décembre à Paris… sans lendemain. Quand on sait que la ligue des droits de l’homme et le syndicat des avocats de France étaient, sur Paris, réticents à cet appel unitaire dans un « contexte d’attentats terroristes où il est préférable de se taire », on devine les concessions et les courbettes des unitaires afin de grapiller quelques illustres signatures démocratiques… sans troupes.

ET LES LÉGUMES ?

Les contestataires de cette démarche unitaire pourtant non structurés et minoritaires dans cette réunion ont fait voler en éclat le consensus malgré les ouvertures, les concessions et les silences de la LCR, de SOS-Racisme… Il ne faut pas oublier que les unitaires d’aujourd’hui n’ont pas d’autres solutions de part leur stratégie politique d’ouvrir leurs bras.

L’Unité, c’est bien !… mais sur quoi ?? Pour les quelques associations issues de l’immigration présentes, l’appel mettait la charrue avant les bœufs ou si vous préférez la viande avant la semoule. En effet, comme nous le rappelions dans le dernier C.A., tant qu’il n’y aura pas de véritable débat sur l’immigration clandestine, tant que la plupart des antiracistes distingueront dans l’immigration des bons et des mauvais, il est inutile de parler d’unité. Le passage de la gauche au pouvoir n’est pas oublié ; parler d’urgence politique face aux lois de la droite, c’est oublier le consensus national de fond sur l’immigration… et c’est, comme par hasard, rouler pour le PS en 88. En effet, dans le débat, les clivages ont pu apparaître. Ce qui était primordial dans cet appel, ce n’était point la lutte pied-à-pied contre toutes les expulsions (de la confiture pour attirer les naïfs) mais la manif unitaire du 6 décembre qui devenait le seul objet du discours des unitaires désireux d’apparaître politiquement contre la droite sur le thème de l’immigration… un feu de paille sans beaucoup de matière première ! Quant aux expulsions et à la proposition de mettre sur pied un réseau d’informations, d’entraide et de planques, le représentant de SOS-Racisme, excédé, lâchera que cela est hors-sujet car nous vivons encore dans une démocratie…

COMMENCER PAR LE DÉBUT

Sous l’impulsion des associations de Lille et Roubaix, les « briseurs d’unité » n’en sont pas restés à ces critiques. S’il y a urgence aujourd’hui c’est bien de construire sur le terrain la résistance contre toutes les expulsions sans revenir en arrière sur les questions d’autonomie du mouvement, de l’égalité des droits, d’unité des différentes générations d’immigrés. Mise à part quelques permanences juridiques et le travail de quelques associations sur les quartiers, beaucoup de choses restent à faire. Cette urgence passe par l’affirmation d’un mouvement associatif déjà présent sur le terrain et son développement… Après, seulement, se posera le problème d’initiatives d’envergure nationale qui demeure un objectif nécessaire afin de gagner quelque chose de tangible.

Quant au 6 décembre, espérons que les unitaires auront la sagesse de ne pas organiser un enterrement des marches de 83, 84 et 85.

Reims le 14/10/86.


POINT VIRGULE,
le journal de jeunes de la Cité du Bois l’Abbé

Claire et Adja font, avec d’autres jeunes de la Cité du Bois l’Abbé, un journal. Elles ont invité Céline, François, Didier et Virginie la sœur de Claire à répondre à nos questions.

Plusieurs thèmes furent abordés au cours de l’interview, en dehors de leur journal.

Tout d’abord, leur approche des médias. En effet FR3, pour son émission Mosaïque, est venue faire un reportage sur leur journal.

Ensuite, elles parlent de la Cité du Bois de l’Abbé de Champigny-sur-Marne. Leur cité appartient à la ville de Paris. A l’origine, elle servait au relogement des parisiens expulsés.

Enfin, dans la tour où habitent Claire et Virginie, un jeune, Stéphane Solort, 17 ans, a été victime d’un contrôle d’identité musclé début octobre. Il s’est retrouvé à l’hôpital Necker à Paris avec une perforation du tympan droit et plusieurs ecchymoses, après avoir été tabassé par un policier (AFP).

Elles nous en parleront.

CA : Comment avez-vous été amenées à participer à ce journal ?

Claire : Il y a des copains qui sont venus nous voir pour nous dire qu’ils avaient envie de faire un journal. Ça nous a branché. On a fait des photos, on les a développées… On fait pratiquement tout. Des animateurs sont là pour nous aider, mais on touche à tout. On parle de tout ce que l’on veut. Il y a un comité de rédaction de 19 personnes, mais maintenant un peu moins. Le plus important pour nous c’est de pouvoir dire les choses sans être censuré.

Adja : Enfin, … Sans être censuré ? ! ! !

Claire : On nous avait dit qu’on pouvait écrire tout ce que l’on veut et finalement, les animateurs nous disent : « Ouais… Vous ne pouvez pas mettre cela, ça fait trop ». Alors on est obligé de le retirer. C’est bête parce que cela revient à ne pas pouvoir s’exprimer.

Adja : La phrase qu’ils voulaient qu’on supprime était contre les flics et ils nous ont dit : « Vous n’avez pas le droit de dire ça, les gens vont être choqués, mais si vous voulez le mettre, mettez-le ».

Claire : Ils nous font la morale.

Adja : Nous avions été interviewer M. Croc, inspecteur de la brigade des mineurs et à la fin, il nous a dit que si on avait entre seize et dix-huit ans la peine était réduite de moitié… Alors moi, je ne savais pas cela, et j’ai écrit « Si vous êtes mineur profitez-en ! ». Ca n’a pas plu.

CA : Qui sont vos animateurs ?

Claire : Les gens du LCJ (Loisirs-culture-jeune). C’est la prévention de la délinquance.

Adja : Notre journal est fait dans un petit local…

Claire : Il y a des gens qui ont été intéressés par notre journal : la TV (FR3, Mosaïque). Mais ce qui a été vraiment énervant, c’est que ça a été le genre : les vieux rapaces du Bois l’Abbé, ils ont filmé la cave et les poubelles, que les murs étaient gris. Ils se servent de ça pour leur promo.

Adja : Quand ils ont présenté le petit reportage sur nous, tout d’abord ils ont coupé n’importe comment…

CA : Quel était le thème du reportage ?

Claire : Le journal… Alors qu’ils ont pris juste quand on parlait du racisme, ce qui n’avait aucun rapport avec le journal. Ils se sont servis des trucs qui sont à la mode. Quand ils ont fait le reportage, au début ils ont fait un petit commentaire…

Adja : Oui les jeunes… La cité…

Claire : Cela rime avec béton.

Adja : Des trucs dingues quoi ! On est des zonards.

Claire : Ils nous traitent de rapaces…

Adja : Qu’on traîne toute la journée dans les escaliers, les caves…

Claire : On a fait une espèce de collation. Il y avait le maire, ces adjoints et des journalistes. Et ils se sont tous foutus de nous, ils prennent cela à la rigolade, on est les « polios » qui ont fait un journal.

Adja : Il y avait une journaliste, on discutait avec, elle a fait un article où elle a mis : « La plupart des jeunes ont des problèmes à l’école »… Alors que c’est archi-faux ! La plupart d’entre-nous sont en seconde ou en troisième !

Claire : Elle a voulu dire qu’on était des délinquants qui ont voulu s’en sortir et tout… Que c’est à peine si on mendie pas On déforme tout ce que l’on a dit. On devient des « polios-délinquants ». C’est déjà dur à assumer d’être « polios » mais en plus délinquants !

Virginie : Ouais, quand on a vu le reportage à la TV, on s’attendait à voir un truc bien. Alors que dès le début, c’était : la Cité, les pauvres jeunes… Le racisme… alors que le journal ce n’est pas ça.

Adja : Il y a des articles de sports, moi j’ai fait un article sur la police…

CA : Alors censuré par les médias, censuré dans notre journal…

Claire : On nous donne toujours l’espoir…

Adja : En fait on déforme tout. C’est comme tout, on nous donne des faits et ils disent ce qu’ils veulent bien dire… Et les gens comprennent autre chose ; c’est toujours comme ça. Ils en ont vachement rajouté.

Claire : En plus, ils nous ont fait rire, parce qu’ils n’avaient pas beaucoup de temps à passer avec nous et dans le reportage ils ont vachement insisté sur les murs sales, la cave (le local) la poubelle… Alors que ça n’a rien à voir avec le journal, et que de l’environnement on en a rien a foutre ! Nous, on aurait aimé dire que l’on était capable de faire un journal.

Virginie : Non… Mais on habite dans une cité et puis on fait un journal, donc, c’est le journal des délinquants !

Claire : Alors qu’elle est cool notre cité ! Moi, je suis très bien ici !

Adja : Parce que de toute façon, le Bois l’Abbé a une réputation mais c’est tout. Cela s’arrête là.

Céline : Et bien moi qui n’y habite pas, je ne m’y suis jamais faite violée !

Claire : C’est n’importe quoi, les gens croient qu’on s’y fait tuer dès que la lumière est éteinte.

Virginie : Moi, dans mon lycée, sous prétexte que j’habite au Bois l’Abbé, certaines personnes ne me parlent plus… C’est infernal !

CA : Mais, vous avez des problèmes au lycée ?

Virginie : Moi, bon c’est vrai, je suis susceptible, mais ils ne rigolent jamais avec moi… Ils ont peur que je ramène mes copains. C’est super, j’ai le rapport de force… Mais les parents ne veulent pas toujours que j’aille chez eux parce que je suis du Bois l’Abbé !

CA : Comment diffusez-vous votre journal ?

Claire : On le met dans les bras des gens. Je leur dis « Je viens de la cité du Bois l’Abbé, si jamais tu ne l’achètes pas, je te tue ». On le vend quand il y a des fêtes.

Adja : A la collation, on en a vendu pas mal, il y en a qui ont donné 100 F. On l’aurait donné même gratuitement, et le bouche-à-bouche en plus, on en a vendu beaucoup. On a une série d’articles pour le prochain ; la fête de l’Huma, la réputation de la cité du Bois l’Abbé… Le jeune de notre tour qui s’est fait tabassé.

Claire : Il s’en est pris plein la tête pour pas cher…

Adja : Ouais, c’est pas nous qui foutons la merde, j’ai remarqué… Ils nous contrôlent à chaque coin de rue.

Virginie : C’est de la folie, moi ils m’ont fouillé des pieds à la tête, y compris les poches pour voir si j’avais une bombe. Faut pas rire quand même !

CA : Qui contrôlent-ils dans la cité ?

Claire : Ils contrôlent les jeunes et les arabes.

Virginie : Ils contrôlent les jeunes et les arabes ; les vieux, tant pis, ils les laissent passer, et puis moi, je passe discrètement entre les noirs et les arabes j’ai une drôle de coiffure – et boum ! Ca faisait deux fois qu’on me contrôlait alors j’ai gueulé, ils m’ont fait louper mon bus, mon RER.

Claire : D’ailleurs pour en revenir aux terroristes on voulait en parler et puis, on s’est dit, non, c’est pas la peine, cela va leur faire de la pub et puis c’est vraiment un sujet bateau.

Céline : Moi, les flics voulaient me ramener chez moi. Il devait être sept ou huit heures, ils m’ont dit : « Ta mère, elle sait que tu es là ? » On va lui téléphoner, alors ils sont allés voir au fichier. C’était aux Halles. J’ai eu peur, ma mère se serait affolée s’ils avaient téléphoné.

François : Tous les gens qu’ils contrôlent n’ont rien à voir avec les bombes.

Virginie : Ce ne sont pas les bombes qu’ils cherchent.

CA : Comment les gens de votre tour réagissent devant le tabassage du jeune de votre cité ?

Claire : Tant que ça ne touche pas leur famille, ils ne disent rien ou alors ils en rajoutent : c’est normal, c’est le mec qui l’a cherché…

Adja : Ils diront : « Ce sont des petits fauteurs de merde… ». Pourtant, il n’a pas une tête spéciale… Il n’a pourtant rien à se reprocher, il est poli. (Il a une tête de faillot).

François : Moi, ça m’arrive souvent de me faire contrôler dans les rues de Paris. Une nuit, ils me demandent mes papiers, je leur dis : « c’est pas fini, c’est au moins la troisième fois ». Ils me disent : « Comment ça, tu deviens insolent avec moi… Tu te prends pour qui ? », « Mais excusez-moi, mais je suis une personne comme les autres, calmez-vous, je vous ai rien fait, je n’ai rien fait… » et ils m’ont emmené au dépôt. J’y ai passé la nuit et j’ai mis deux jours à récupérer mes papiers.

Claire : J’ai une copine qui s’est faite agresser par une vieille dans la cabine téléphonique en face du commissariat, à la bombe lacrymogène. Et bien les flics, ils n’ont pas bougé. En fait, c’est les vieux qui nous agressent. Au rez-de-chaussée, il y a un homme avec une carabine qui nous répétait constamment qu’il ne fallait pas s’asseoir sur les grilles mais on s’y mettait quand même, c’est le meilleur endroit. Il est sorti, et sous prétexte qu’il est flic, il sort son flingue et il nous dit : « Partez, partez, je tire sur le premier qui bouge ».

Michèle* : En fait, pour une bavure ils n’ont pas eu de chance parce que c’était un mec qui avait du répondant. Parce que ce n’est pas le premier qui se fait taper, mais en général, les parents ne disent rien… Là, ils n’ont pas eu de bol car dans la famille il y en a un qui travaille à l’Education nationale… Car bon, c’est pas le premier, c’est tout le temps qu’ils en ramassent. D’abord, les parents, ne savent pas tout le temps qu’ils ont été gardés chez les flics parce qu’ici ils rentrent sur le coup des deux ou trois heures du matin, et puis les parents… « J’étais au commissariat, je me suis fait taper », « Et bien tu n’avais qu’à être à la maison ». Les enfants n’ont pas une telle audience auprès des parents et puis de toute façon, ils laissent tomber parce qu’ils ne savent pas quoi faire. Bon là… Ils n’ont pas tiré le bon numéro, c’est la vraie bavure.

Virginie : Le pire c’est qu’il y en a qui continue à se taire… Ceux qui réagissent encore. Même s’ils ne savent pas quoi faire Moi, cela m’a fait peur. Quand on m’a dit ça.

CA : Il y a t-il-eu des articles dans les journaux ?

Virginie : Bon, ici, il n’y a que l’Huma. J’ai trouvé ça cul cul la praline, et puis c’était trop pour les communistes, il y a pas qu’eux qui défendent…

CA : Il y avait été question de faire une manifestation devant le commissariat… Certains ont prétendu qu’elle avait été interdite, alors cela c’est transformé en rassemblement devant la mairie, où il manquait beaucoup de jeunes du Bois l’Abbé. Est-ce qu’il n’aurait pas fallu la
faire devant le commissariat ?

Claire : Ah ouais ! Parce que là vraiment il y aurait eu tous les jeunes du Bois l’Abbé qui auraient réagi.

Adja : Une manif interdite c’est débile, parce qu’une manif, c’est pour montrer notre désapprobation, alors interdite ou pas, on doit la faire, je suis désolée !

Virginie : Moi, je crois que ça a été mal organisé parce que je n’étais même pas au courant.

Claire : Les flics, ils ont dit que Pasqua avait dit que c’était pas une bavure, que c’était le jeune qui ne voulait pas montrer ses papiers. Légitime défense.

Michèle, sur le ton de l’ironie : Non, il les a menacé avec son casque, donc il ne l’avait pas sur la tête, il avait le droit à une contredanse.

CA : Comment cela s’est-il passé à la mairie ?

Philippe : Il y a eu un. discours du maire, et puis c’était terminé.

Virginie : Elle a été bâclée cette histoire. On en a parlé le jour même et le lendemain et puis après fini ; les gens se croisent comme tous les jours. Dans mon bahut, personne ne le savait, pourtant Saint-Maur, ce n’est pas loin.

Michèle : Non, et puis les gens, tu as beau leur dire et leur expliquer, leurs réactions, c’est que s’il s’est fait agresser, c’est qu’il a fait quelque chose. J’ai beau leur expliquer : « Mais venez, il habite là, vous pourrez le voir, c’est pas le dealer du coin », mais les gens ils ne le croit pas. S’il s’est fait agresser, c’est qu’il avait quelque chose à se reprocher. Les gens ne conçoivent pas que les flics tabassent ou tirent pour rien.

Virginie : C’est comme les gosses, ils ont pas le droit de jouer dans le bac à sable sinon on leur tire dessus… Mais merde, les gosses aussi sont vachement stressés après une journée d’école, il n’y a pas que les vieux… Moi aussi je prends le bus et le métro.

François : S’il faut craindre les flics… Déjà qu’on craint pas mal de choses, ils devraient être là pour nous protéger…

Claire : Ils protègent les vieux des jeunes ; mais les vieux qui tirent sur les jeunes non !

François : Les flics, ils protègent les vieux, et les vieux quand ils voient tout ces flics, ils se disent : « Mais il y a des délinquants partout ! ».

Claire, Virginie, Adja : Si, si c’est vrai ! Ils créent l’insécurité.

Claire : Alors les vieux, ils demandent encore plus de flics, alors il y a plus de flics… Ils ont encore plus peur, … C’est un cercle vicieux !

Céline : Ma mère, elle me dit : « Si des flics demandent ta carte, donne-la … Parce que maintenant on ne sait jamais avec ces gens-là ».

* Michèle est la mère de Claire et Virginie.

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