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Jean Cavignac : Sur le problème algérien (2)

Lettre de Jean Cavignac adressée à Robert Louzon, parue dans La Révolution prolétarienne, n° 172 (473), juin 1962, p. 21-22


De J. CAVIGNAC, de Paris, cette lettre adressée à Louzon :

Je vous avais déjà exprimé que je n’étais pas d’accord avec vous pour une évacuation de l’armée française qui laisserait face à face Musulmans et Pieds-Noirs et inspirerait à ces derniers une crainte salutaire, commencement de sentiments coopératifs.

Vous dites que dans le bled où les Pieds-Noirs n’ont plus la protection complice de l’armée française, il n’y a pas de violences de la part des Européens. Si vous me permettez de revenir à la charge, je vous dirai qu’au contraire les Européens du bled n’avaient pas eu assez peur jusqu’ici et croyaient à la coopération. Mais maintenant, ils ont peur et s’en vont, témoin l’information parue aujourd’hui dans « Combat » (p. 2 col. 6) que je vous envoie, selon laquelle « une forte proportion, surtout lors du dernier départ était constituée par des Européens des petits centres de l’intérieur ».

Si l’on admet, que le rapatriement massif des Pieds-Noirs ne serait profitable ni à l’Algérie, ni à la France, on peut dire que la peur, mauvaise conseillère n’est pas faite pour hâter une paix véritable.

D’ailleurs, n’est-ce pas en partie cette peur née de la terreur exercée par le F.L.N. qui a rendu fous et criminels une partie des Pieds-Noirs ? La peur semble donc avoir eu deux effets : dans les villes où les Européens sont en force, contre-terreur pire que la terreur et, dans le bled, la valise ou la mitraillette.

Je n’ai pas la prétention d’avoir une solution-miracle du problème algérien, mais je crois que l’armée française, au moins autant que le F.L.N. devrait demeurer sur le terrain pour empêcher, dans la mesure du possible, les heurts sanglants et l’exode également catastrophique. Son retrait ne provoque pas, en effet, une crainte raisonnée qui pourrait être le commencement de la sagesse, mais une panique démentielle.

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