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Châtenay-Malabry : « contre la police »

Textes parus dans Nous voulons tout !, n° 4, avril-mai 1983, p. 6

Manifestation en solidarité de Nacer M’Raidi bléssé par un policier, Chatenay-Malabry le 19 février 1983, France. (Photo by Mohamed LOUNES/Gamma-Rapho via Getty Images)

Le 14 février, un brigadier blessait grièvement un jeune Tunisien. Les jeunes des deux cités – l’une française, l’autre immigrée – se retrouvent pour s’organiser.

Après les agressions racistes de ces derniers mois les jeunes prolétaires des grands centres urbains (banlieue parisienne, Marseille), malgré leur manque d’expérience politique et les difficultés qu’ils peuvent avoir à effectuer la jonction avec les autres quartiers en lutte, ont quand même réussi à organiser des manifestations (Nanterre, Châtenay-Malabry, Montreuil, Marseille), des grèves des loyers (Nanterre, Châtenay-Malabry) et une grande campagne d’information : tracts, affiches, autocollants.

Les manœuvres de la droite sont claires ; elle compte sur le manque d’organisation des jeunes et des immigrés et leur isolement au sein de la communauté prolétaire dus à la campagne les dénonçant comme facteur d’insécurité et de chômage. Au-delà de considérations éthiques, on peut considérer comme une erreur politique le fait que le gouvernement socialo-« communiste » relaie la campagne xénophobe de la Droite. Même s’il fait excellent office de bouc émissaire pour masquer l’impossibilité du gouvernement PS-PC à gérer la crise du Capital et la restructuration, dénoncer le jeune et l’immigré comme principal ennemi social, c’est promettre l’impunité aux groupuscules d’extrême-droite, aux flics fascisants et aux beaufs en général. qui ne manquent pas de sauter sur l’occasion pour développer la vague d’attentats que nous subissons aujourd’hui. Cette impunité (1) leur étant d’autant plus assurée que le gouvernement a depuis longtemps choisi de donner des garantis plutôt aux capitalistes qu’aux prolétaires et qu’il a prouvé qu’il préférait quelques cadavres immigrés à des démêles avec les syndicats de flics. De plus son incapacité à restructurer la police et la justice hérités de l’ancien régime, empêche que les flics-beaufs-fascistes assassins soient recherchés et encore moins condamnés (2).

En fait le PS-PC prisonniers de leur logique de gestionnaires de l’Etat capitaliste, confortant et utilisant l’idéologie de la « France profonde », à des fins électorales, facilitent un climat de guerre civile, en tolérant l’entreprise de déstabilisation de l’Extrême-Droite et en ne laissant d’autre choix aux jeunes que de s’armer pour assumer eux-même leur sécurité.

Que des gens qui prétendent avoir une intervention politique, ne situent le niveau d’affrontement qu’au degré de plaisir qu’ils peuvent en tirer et que des lumpen-petits-bourgeois en mal de violence, ne mesurent la radicalité d’une situation qu’au nombre de cocktails balancés, n’occulte en rien le fait que le mouvement ne peut mener un combat frontal contre l’Etat, hors du cadre légal, sans s’être doté d’un minimum d’organisation qui lui permette de s’étendre et de faire face à la répression.

D’ailleurs ceux qui ont déjà commencé, la lutte à Châtenay comme à Montreuil ont déjà évité plusieurs erreurs essentielles, bien que ne s’étant pas lancés dans un affrontement violent (où les jeunes se seraient retrouvés sur le terrain des forces de répression à un moment choisi par elles) ils ne se sont pas pour autant laissés intimider par les pouvoirs locaux (3) – PC, PS et leurs chapelles – de plus la liaison entre jeunes de toutes origines à permis d’éviter l’isolement des immigrés (qui est l’objectif avoué de cette campagne raciste).

Afin de briser l’isolement, tant racial que géographique entre les différentes cités (ou ghettos) de la région parisienne, les jeunes français et immigrés de Châtenay-Malabry ont lancé les bases d’une coordination des différents groupes organisés ou non, de jeunes prolétaires de la région parisienne (contact : tel 661-21-37). Coordination qui bien que maintes fois pensée et tentée précédemment par différentes franges de la mouvance autonome n’a jusqu’à présent jamais vu le jour. Néanmoins le fait que régulièrement cette idée germe spontanément dans tous les secteurs en lutte non contrôlés par les forces politiques traditionnelles l’impose comme forme prédominante d’organisation du prolétariat non-ouvrier dans les années à venir.

C’est pourquoi nous vous appelons à prendre rapidement contact avec cette coordination afin qu’elle ne soit pas une énième et vaine tentative de forme d’organisation des parias du système politique traditionnel.

Shnukel Basta


(1) Sur les 3 flics de Châtenay, 2 sont encore en service et les flics de Montreuil ne sont nullement inquiétés.

(2) Un flic assassin risque au maximum du sursis. Une seule exception, 6 mois fermes pour un des deux flics qui tabassent un Sénégalais, tentent d’assassiner son compagnon et deux témoins présents (son complice n’a été condamné qu’à une amende légère).

(3) A Châtenay, contrairement à ce qu’en a dit la presse, le PC et le PS n’ont aucunement soutenu le mouvement et tout deux ont fait pression pour qu’il cesse !


Parce que Nacer c’est toi…

PARCE QUE NOUS AVONS LE DROIT LÉGITIME DE NOUS PROMENER DANS LES RUES DE NOTRE VILLE SANS RISQUER DE NOUS FAIRE DESCENDRE…

Notre colère, notre conscience ne peuvent se contenter de quelques sous-responsables sanctionnés laissant le système des brigades, « milices » racistes, anti-jeunes, anti-arabes, continuer ses crimes.

Cautionnant l’état d’esprit ‘légitime défense » d’une partie de la police française, l’Etat, par ses campagnes sur la « sécurité », d’un racisme volontairement larvaire, et par son laxisme quand c’est la nôtre (de sécurité) qui est menacée, fabrique des cadavres qui risquent de lui coûter cher.

Nous avons conscience qu’une manif, des pétitions, ne servent pas à grand chose. C’est simplement une porte ouverte à un dialogue qui n’a jamais existé, une preuve de notre volonté d’arriver à une solution intermédiaire qui ne soit pas incendiaire. Cependant, notre patience a des limites et nous n’attendrons pas éternellement qu’on veuille bien nous reconnaître comme des citoyens à part entière.

Muter (ou même virer) un responsable du secteur ne change rien au système, inculper un flic assassin non plus ! Ce sont nos vies qui sont en jeu !

Nous savons, par notre existence constamment menacée, que ce n’est pas un accident qui s’est produit, mais bien le résultat d’une situation qui existe dans tous les quartiers de France à majorité prolétaire, et qui fut tristement illustrée par les assassinats perpétrés à Lyon, Marseille, Vitry, Nanterre, Châtenay-Malabry.

Certains médias ont assimilé cette affaire à la délinquance, alors que les véritables délinquants sont ceux qui, payés par l’Etat, et couverts par une certaine « conscience nationale » (la « France profonde…), agissent tous les jours, fouillant des enfants de 12 ans à la sortie de l’école, arrivant toujours trop tard quand un directeur de supermarché lâche ses chiens sur des gosses, commettant « bavures » sur « bavures »…

Il faudrait enfin savoir quel bénéfice social on peut tirer d’ une police qui accumule les agressions et les violences quotidiennes…

Nous ne nous laisserons plus faire !

Une coordination est possible qui laisse à chacun le choix de son propre mode d’action. Nous appelons donc tous les habitants des cités à se mobiliser, à s’organiser suivant leur situation propre, et à agir suivant leur conscience.

CONTACT : 661-21-37 (après-midi).

LES AMIS DE NACER

P.S. : Des tracts des affiches, des autocollants sont à votre disposition. Chaque lycée, chaque cité doit s’organiser diffuser. Nous avons besoin d’argent pour amplifier notre action. ON NE DOIT PAS OUBLIER NACER.

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