Source : André Blanchet, L’itinéraire des partis africains depuis Bamako, Paris, Plon (coll. « Tribune libre »), 1958, p. 50-52
C’est dans le même esprit qu’il fut fait grief par certains au RDA d’avoir invité à Bamako l’Union des Syndicats des Travailleurs Algériens (USTA), organisation d’obédience « messaliste » (MNA) qui put ainsi déléguer à Bamako deux représentants : MM. Abdallah Filali et Ahmed Bekhat. A quoi les responsables du Rassemblement répondent en affirmant, contre le témoignage de Melle Claude Gérard, que l’USTA ne reçut jamais d’invitation officielle et que, de toute manière, les deux syndicalistes algériens ne furent pas admis à prendre la parole. De fait le message dont ils étaient porteurs ne peut être lu à la tribune et fut seulement distribué dans la salle sous la forme d’une communication ronéotypée. On apprit plus tard par Melle Claude Gérard qu’un message avait été adressé au Congrès par Messali Hadj lui-même, mais n’avait pas été porté à la connaissance des participants. Est-ce leur présence aux assises de Bamako et leur quasi-conversion – toujours d’après Melle Gérard – à une certaine formule de communauté franco-africaine qui inspirera au FLN l’idée d’un tel geste, toujours est-il que les infortunés représentants de l’USTA furent l’un et l’autre abattus par des tueurs peu de temps après leur retour à Paris ; personne parmi ceux qui les approchèrent, en amis ou en adversaires durant ces journées capitales ne pouvait refuser un hommage à la mémoire de ces hommes courageux, morts pour un idéal.
Que MM. Filali et Bekhat eussent été ou non les invités officiels du Rassemblement, de toute façon, les dirigeants de ce dernier n’en défendirent pas moins d’avoir choisi à travers eux le MNA, comme l’organisation qualifiée à leurs yeux pour représenter les Algériens. Cette réserve s’appliquant tant à l’égard des amis de la France que des divers mouvements nationalistes. Il est d’ailleurs significatif que les résolutions votées par le congrès, comme d’ailleurs toutes les interventions à la tribune, ne firent jamais une seule allusion au FLN, pas plus qu’au MNA. Manifeste était le souci des hommes de Bamako de ne pas prendre parti dans une affaire qui, si elle les concerne en tant que partenaires de la communauté franco-africaine, ne leur semblait pas appeler de leur part une prise de position précise et encore moins un choix entre les antagonistes.