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COMMUNIQUE DE PRESSE
Déclaration du M.T.L.D.
Dans une déclaration publiée le 15 juillet, le M.T.L.D. a fait connaître sa position quant aux événements qui se sont déroulés la veille à Paris, au cours desquels plusieurs patriotes algériens ont été assassinés par la police française.
De nombreux commentaires ont été faits autour de cette journée. La calomnie et le racisme se sont donné libre cours dans les milieux aux ordres, de même qu’une chaude sympathie appuyée une solidarité agissante s’est manifestée aussi bien en France qu’en Algérie.
Le Ministère de l’Intérieur a publié un communiqué particulièrement significatif. Un débat s’est instauré au sein de l’Assemblée Nationale française, mais les interpellations ont été renvoyées à la suite. Une enquête a été ouverte dont on ne parle plus.
Devant l’ampleur des informations contradictoires qui viennent noyer et déformer le sens véritable de ce crime monstrueux, il appartient au M.T.L.D. de clarifier le débat.
Chaque année, au 14 juillet, les Algériens émigrés à Paris défilent derrière le M.T.L.D. en groupe distinct de la Bastille à la Nation, avec les organisations ouvrières et progressistes.
Cette manifestation autorisée permet au parti qui représente authentiquement le peuple algérien de faire entendre la voix de l’Algérie et de porter à la connaissance des Français et de l’opinion les revendications fondamentales et permanentes de notre peuple.
Jusqu’au 14 juillet dernier, le défilé s’est déroulé pacifiquement. Il a fallu cette fois que la police charge les Algériens au moment où le cortège se disloquait et tire par rafales sur la masse pour donner à cette journée symbole de la liberté le cachet qu’elle a eu.
Le complot était net. Il a été surabondamment prouvé. On a voulu en même temps de discréditer le M.T.L.D. et d’instaurer un climat de haine autour des Algériens émigrés en France.
Le premier objectif a été souligné par MARTINAUD-DEPLAT : « Le M.T.L.D. est une organisation de guerre civile, on ne peut le tolérer plus longtemps ».
Le M.T.L.D. a de tous temps été présenté par le gouvernement français à l’opinion comme une organisation qui met en danger permanent l’ordre public et la sûreté extérieure de l’Etat. C’est au nom de ces principes qu’on le réprime, qu’on essaie systématiquement de l’étouffer et de lui enlever tout moyen d’expression. La méthode est employée en Algérie, elle l’est en France, mais elle vient d’atteindre une ampleur jamais connue dans ce pays.
En noyant les aspirations d’un peuple dans le sang, le gouvernement français veut surtout créer une atmosphère propice aux plus noirs desseins. Il veut en finir avec le M.T.L.D. qu’il sait représenter la grande majorité du peuple algérien ; il croit avoir atteint le dernier stade de sa répression : LA DISSOLUTION DU M.T.L.D., car c’est que veulent les gouvernants français appuyés par la grosse colonisation d’Algérie.
Mais le M.T.L.D., sûr de l’appui et de l’affection du peuple algérien, sûr de la solidarité agissante des peuples qui luttent pour leur liberté, sait que le gouvernement français échouera.
Le second objectif est mis en relief par la façon dont l’attaque policière a été menée. Les policiers n’ont chargé que le groupe des Algériens, ils se sont acharnés sur le portrait de MESSALI HADJ. La presse réactionnaire s’est empressée en commentant les événements, de placer au premier plan les attaques des « malfaiteurs algériens ». Le paternalisme s’est donné libre cours dans les propos de certains journaux « libéraux » qui déclarent que le problème des Algériens en France n’est que d’ordre social.
Le climat de haine raciale dirigé contre les Algériens a été développé depuis de nombreuses années. Les événements du 14 juillet n’ont pour certaine presse qu’une occasion nouvelle pour exploiter avec ampleur ce même thème.
Quant aux « libéraux », qu’ils aillent au fond du problème : si les Algériens ont émigré par centaines de milliers en France, ils ont été contraints d’abandonner leur pays, parce que la misère et la faim les tenaillaient. Les terres qu’ils possédaient leur ont été enlevées par la colonisation. Ils ont été réduits à la condition de sous-prolétaire. Ils ne trouvent pas d’emploi en Algérie : l’industrie n’existe pas, le colonialisme y est par essence opposé.
Qu’on leur rend leurs biens. Qu’on leur restitue leur économie. Ils resteront chez eux, leur pays est assez riche pour les faire vivre heureux. C’est donc la structure de l’économie algérienne qui se pose. Elle est de type colonial et sa transformation nécessite la transformation des institutions politiques.
LE PROBLEME EST DONC POLITIQUE ET NON SOCIAL. Tant que l’exploitation économique et l’oppression politique existeront en Algérie, les Algériens qui ne peuvent vivre normalement, continueront à quitter leur pays dans l’espoir de subsister ailleurs.
Ce n’est pas en fermant les yeux sur les réalités qu’on finira par les connaître. CE N’EST PAS EN NIANT LES PROBLEMES QU’ON LES RESOUDRA.
Le 14 juillet 1953 entre dans l’histoire de l’Algérie. Les morts pour la Liberté, le jour de la « Fête de la Liberté », ont donné leur vie pour une cause juste, celle du peuple algérien. Leurs corps seront ensevelis dans la terre de leur patrie, dans le village qui les a vu naître, grandir et lutter.
Que le peuple algérien fasse le serment qu’il n’aura de cesse que leurs assassins soient châtiés, que le peuple algérien s’engage à poursuivre la lutte dans un coude-à-coude plus serré jusqu’au jour où le vœu le plus cher de nos martyrs sera réalisé.
ALGER, le 21 juillet 1953