Catégories
presse

Foule immense aux obsèques de Tlemcen. Le témoignage de Me Y. Dechézelles

Article paru dans Informations ouvrières, n° 661, 12-19 juin 1974.

 

 

Voici le récit que Me Yves Dechézelles a fait à « Informations Ouvrières » de l’enterrement de Messali Hadj, le 7 juin, à Tlemcen, où il a pris la parole devant une foule immense.

Nous sommes partis jeudi matin 6 juin par avion pour Oran via Marseille. Le corps de Messali Hadj était parti par convoi automobile la veille au soir et devait être pris dans le même avion que nous au départ de Marseille, à 17 heures.

Il y avait à Marseille une délégation de l’Amicale des Travailleurs Algériens en France. Il y avait aussi le fils de Messali, Ali, son neveu Mohamed Memchaoui, sa fille Janina, son gendre Enouar Benkhalfat et les petits enfants de Messali.

Nous sommes arrivés à 18 h 30 à Oran. Là, nous étions attendus par des parents de Messali et Memchaoui et par des amis informés de notre arrivée.

Les formalités de police et de douane se sont déroulées normalement. Mais le corps de Messali n’a pas pu prendre place dans le convoi qui devait l’emmener à Tlemcen avant 22 h 30 parce que le représentant du service sanitaire était absent.

Le convoi démarra à 22 h 30. Après avoir été précédé par une voiture de police jusqu’à un carrefour, il s’est dirigé sur Tlemcen, traversant les communes à une heure où tout était éteint. Nous sommes arrivés à Tlemcen vers minuit et demie. Le corps a été conduit immédiatement dans une maison amie où attendaient toute la famille et de nombreux amis. C’est là qu’il a passé la nuit, veillé par la famille et les amis dans une maison décorée du drapeau algérien créé par le PPA.

Le lendemain matin, le corps a été conduit à la mosquée. Déjà un cortège nombreux s’était formé. Des jeunes portaient le cercueil à bout de bras. Avec les prières était aussi chanté l’hymne du PPA. Au milieu d’une très nombreuse assistance, le corps a été déposé à la mosquée, la cérémonie des obsèques ne devant reprendre qu’en tout début d’après-midi, à 13 h 30.

A ce moment, le cercueil a été repris à bout de bras et, très rapidement, l’assistance est devenue très nombreuse. Les prières alternaient avec le chant du PPA. Bientôt, la place a été noire de monde. Le cortège s’est ébranlé. Les trottoirs étaient garnis de monde et peu à peu ces gens rentraient dans le cortège. Chose surprenante, des centaines de femmes avaient précédé le cortège qu’elles attendaient sur la hauteur près du cimetière de Tlemcen : et ces femmes poussaient des you-you stridents tandis que le cortège, maintenant immense continuait de chanter.

Finalement, le cortège arrivé au cimetière, le cercueil fut placé à terre, sur une grande place. La foule était partout. Tous les gens de Tlemcen étaient là, tous, hommes et femmes. Beaucoup de jeunes qui, de bouche à oreille avaient su très tardivement qu’il s’agissait des obsèques de Messali Hadj, étaient venus par milliers et milliers.

Un premier discours a été prononcé par un camarade. Ses amis m’avaient demandé de parler. J’ai parlé, en tant qu’avocat, ami et camarade.

J’ai rappelé la lutte que Messali Hadj a mené toute sa vie pour l’indépendance du peuple algérien, en tant que fondateur de l’Etoile Nord-Africaine et leader du PPA. J’ai souligné aussi le trait important de sa vie politique qui a consisté à associer l’indépendance nationale et la solidarité internationale des travailleurs.

Un troisième discours a été prononcé par Memchaoui.

Je voudrais souligner quelque chose de très important. En Algérie n’a paru dans la presse qu’un seul entrefilet perdu au milieu d’une page dans « El Moudjahid » : Messali n’est plus. Il est décédé dans une clinique parisienne le dimanche 2 juin. Rappelons ici qu’il a été le cofondateur du PPA et le président du PPA et du MTLD ». La famille n’a pas été autorisée à faire paraitre un avis de décès annonçant l’inhumation à Tlemcen.

Ainsi, alors que tout était prévu pour que les choses se passent dans la plus stricte intimité, les obsèques de Messali Hadj se sont déroulées devant une foule énorme, devant des jeunes extrêmement nombreux et actifs et un grand nombre de vieux militants algériens.

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *