Texte paru dans L’Humanité, seizième année, n° 5455, 25 mars 1919, p. 3
Hungarian communist politician and journalist Béla Kun (source)
Voici le texte de l’appel lancé par le conseil des commissaires du peuple de la République hongroise et des conseils de travailleurs et que nous avions signalé hier en dernière heure :
Texte paru dans Le Communiste, première année, n° 4, 5 septembre 1919, p. 1
Proclamation de la République soviétique hongroise, le 21 mars 1919 (Source)
Prolétaires frères,
Voici le moment pour rompre vos chaînes imposées par le capitalisme. En Russie et en Hongrie le capitalisme est tombé, et le communisme a dressé son drapeau rouge. Maintenant les exploiteurs du monde entier s’unissent une dernière fois pour étrangler la révolution victorieuse, frères français, anglais, théco-slovaques et roumains, la sainte fédération de l’Internationale noire de Paris a dressé vos mains armées contre notre état-major communiste. L’attaque de l’autocratie la plus abjecte des boyards roumains a commencé coutre la Hongrie prolétarienne. Voulez-vous devenir les assassins de l’état-major communiste que vous aussi désirez profondément, les armes sont entre vos mains, sachez vous en servir contre vos vrais ennemis.
1924 ! Depuis six ans, partie ouvertement, partie clandestinement, le prolétariat allemand combat ses oppresseurs et ses exploiteurs dans une lutte de plus en plus désespérée. Le capitalisme uni se redresse et se fortifie.
La jeunesse révolutionnaire d’Allemagne salue cordialement la Jeunesse socialiste de tous les pays.
La jeunesse allemande s’est engagée volontairement en 1914, croyant qu’il s’agissait de la défense de la patrie et de la défense du peuple allemand. La Jeunesse allemande a été abominablement trompée. Elle a été la victime de gens sans conscience et elle a été fauchée en de nombreux combats, à la légère parfois, comme à Wytschaete où des milliers de jeunes recrues insuffisamment entraînées ont été envoyées à la mort aux sons de la fanfare. Mais lorsqu’ils surent la vérité, beaucoup d’entre ces malheureux se soulevèrent et se dressèrent de toute leur force contre la guerre, le gouvernement et le militarisme.
Appel paru dans Le Populaire, 4e année (2e série), n° 383, 4 mai 1919, p. 3
Nos camarades des Jeunesses Socialistes ont tenu leur Congrès au moment où le Parti Socialiste tenait le sien. Celui-ci a fait passer celui-là au second plan et il faut le regretter car le travail qui y fut fait présente un réel intérêt. D’ailleurs, l’action des Jeunesses Socialistes grandit chaque jour, sous l’impulsion des événements et la jeunesse ouvrière de France ne peut pas ne pas comprendre qu’elle doit se donner tout de suite à l’action socialiste, si elle veut s’éviter pour l’avenir les massacres des guerres capitalistes.
Avant de clôturer leur Congrès, nos camarades des Jeunesses ont rédigé un appel à la Jeunesse ouvrière de France et à celle de tous les pays. Nous donnons ici les plus larges extraits de ce manifeste :
Manifeste de la Fédération allemande des anarchistes communistes paru dans Le Réveilcommuniste-anarchiste,année XIX, n° 505, 25 janvier 1919, p. 2
Un groupe de soldats brandissant le drapeau rouge, le 9 novembre à la porte de Brandebourg (Source)
Le manifeste suivant a été répandu en Allemagne :
Après cinquante et un mois de carnage, le prolétariat allemand a suivi l’exemple de ses frères russes ; aidé des travailleurs soldats, il a renversé ses bourreaux. Le militarisme allemand, formidable colonne de la réaction, ruiné dans notre pays comme dans le monde entier, est détruit.
Henri Bouyé (1955) Famille Bouyé/Archives d’AL/FACL (Source)
L’enseignement militariste affirme que la discipline fait la force principale des armées, ce qui est son rôle. Laissons lui ce privilège, nous qui sommes convaincus que l’autorité de la contrainte (à ne pas confondre avec celle de la science et du talent) en dotant d’une vaine puissance celui qui l’exerce, mutile la personnalité de celui qui la subit sans que la collectivité au nom de laquelle sont lancées de si flambantes formules en tire le moindre profit. Il n’en demeure pas moins qu’en raisonnant ainsi le militarisme est envers lui-même d’une logique rigoureuse, puisque sa raison d’être est le maintien entre les hommes des barrières artificielles de sa hiérarchie.
Photographie de George Orwell sur sa carte d’adhérent du Syndicat national des journalistes (National Union of Journalists) en 1943. Source
Nous apprenons la mort, dans un hôpital des environs de Londres, du célèbre écrivain anglais, George Orwell, décédé d’une affection pulmonaire dont il souffrait depuis de nombreuses années. Il était âgé de 46 ans.
Dans le numéro du Soviet, M. Durgat critique le rôle des intellectuels dans le parti socialiste et les organisations révolutionnaires.
Sortis de la bourgeoisie pauvre, dit-il, ils ne voient dans le socialisme que le moyen de gagner de l’argent, ils se font une situation en se hissant sur le dos des ouvriers qu’ils trahissent ensuite.
Cela est parfaitement vrai, mais à qui la faute sinon aux ouvriers eux-mêmes, ils n’ont que les chefs qu’ils méritent.
Pessimiste de mon naturel, je ne vois pas la révolution immédiate en France. Notre prolétariat, très matériel dans sa majorité, n’a guère tendance à bouger lorsqu’il mange à sa faim. Malgré la vie chère, ses salaires lui donnent du pain et le cinéma ; cela suffit sinon aux ouvriers conscients, du moins aux autres.
La classe ouvrière voit sans trop d’enthousiasme les intellectuels venir à elle. Cela s’explique, car d’ordinaire ils viennent pour la trahir, tout au moins pour s’en servir.
Les préparateurs en sciences physiques, chimiques et naturelles sont entrés à la C. G. T. Peu nombreux, ils s’y trouvent perdus parmi les centaines de mille de terrassiers, cheminots, maçons, etc. Personne n’a fait attention à eux et leur entrée est passée à peu près inaperçue.
La calomnie est une arme lourdement maniée par les uns, finement par les autres. Elle tranche les réputations, fauche les caractères, trouble la sérénité ou le repos des personnes sur lesquelles elle s’abat avec perfidie. Ses ravages sont considérables, parce qu’il est souvent difficile de les prévenir ou que, parfois, on les ignore.
C’est le défaut des discussions générales. Il est vrai que c’est aussi leur intérêt. Mais me voilà conduit à reprendre une fois encore la plume pour répliquer à l’article du 27 avril, d’André Philip.
Cette fois, je ne suis pas seulement accusé de faire de la métaphysique. Car il paraît que je suis un métaphysicien. Je ne m’en serais jamais douté…
J’ai lu, avec toute l’attention qu’ils méritaient, les articles que notre ami Marcel Déat a consacrés à l’ouvrage d’Otto Bauer sur les rapports entre le socialisme et la religion.
Dirai-je que la thèse d’Otto Bauer n’est pas la mienne ? C’est superflu, sans doute, et ceux qui ont lu les articles que j’ai consacrés, il y a quinze mois déjà, à cette question qui devient de plus en plus « actuelle », en seront convaincus.
Je ne suis pas surpris d’avoir provoqué l’indignation de deux camarades « chrétiens » par mon article sur Socialisme et Religion. J’ai l’habitude de ces réactions. Quand on se permet, maintenant, dans un journal socialiste ou socialisant, de médire du christianisme, il se trouve toujours quelques pasteurs ou quelques élèves-pasteurs pour s’indigner. L’avouerai-je : Ce n’est pas à eux que je m’adressais. Nos deux camarades pensent pouvoir croire en Dieu, pratiquer une religion, et se prétendre socialistes. C’est leur droit. Mais ce n’est pas la question. Et ce ne sont pas les deux douzaines de socialistes chrétiens que peut compter notre Parti qui ont à la résoudre.
La campagne contre l’ambassade bolchevik a inspiré à Léon Blum un article (Populaire du 18 octobre) dont certains passages me semblent devoir être réfutés. Son talent, sa double fonction de leader parlementaire et de directeur du quotidien socialiste, font de Léon Blum, aux yeux de la masse qui ne connaît pas très bien le fonctionnement de nos organismes de parti, l’oracle du socialisme. Ce qu’il dit, ce qu’il écrit, même si ce n’est parfois — et c’est le cas — que la manifestation d’une opinion toute personnelle, est interprétée par beaucoup comme la pensée de l’ensemble du Parti. D’où la nécessité, pour les socialistes qui pensent autrement, et lorsqu’il s’agit de points importants de notre tactique, de ne pas laisser sans la discuter l’opinion de Léon Blum.
Si les hommes de la Révolution poussent jusqu’au bout le principe révolutionnaire et si les chrétiens poussent jusqu’au bout le principe de l’Église, c’est dans une société unie en apparence, le plus prodigieux conflit qui se puisse imaginer.
(Jean Jaurès, J.O., janvier 1910)
Il est de bon ton dans le Parti, de médire des « bouffeurs de curés ». Les moins sévères leur accordent un regard de compassion et de miséricorde. Car le « bouffeur de curés » sent l’hérésie. L’anticléricalisme ? Fi ! Laissons cette chose grossière aux petits bourgeois cléricaux et libres penseurs : les exigences de la lutte de classe veulent que nous nous cantonnions strictement sur le plan économique. Et les querelles philosophiques de la bourgeoisie ne sont-elles point qu’amusettes faites pour détourner le prolétariat militant de l’action spécifiquement socialiste ?
Article paru dans Le Populaire, 15e année, n° 3324, 15 mars 1932, p. 4
Ne pouvant retracer ici dans tous ses détails la démonstration continue à laquelle procède dans son si intéressant ouvrage notre camarade Marceau Pivert (L’Église et l’École, Figuière édit.), nous voudrions insister quelque peu sur la thèse centrale ; la religion est-elle, peut-elle être, pour un socialiste, et pour le parti socialiste, une « affaire privée » ?
Article signé G. Bernier paru dans Le Libertaire, n° 347, 12 février 1953, p.3
ENFIN ce livre est paru en français (1).
Pour ceux qui avaient eu l’occasion de connaître cet ouvrage édité à New-York en 1942 et qui avaient ressenti à la lecture cet enthousiasme que l’on n’éprouve que pour quelques livres dans une vie, c’est une joie profonde.
Les accusés lors du procès de Prague, en 1952. ARTE
ÉDITÉS pour la première fois en 1936-38 « Les procès de Moscou » sont réédités périodiquement et chaque fois dans un pays différent du glacis stalinien. Les personnages variant seulement, les juges d’hier jouant bien souvent le rôle des accusés du jour, « ces procès » n’intéressent plus, n’émeuvent plus.
Article paru dans Le Libertaire, n° 28, 10 mai 1946, p. 2
On a beaucoup parlé, on parle encore beaucoup, plus peut-être qu’il n’eût été logiquement, utile, du livre d’Arthur Koestler « Le Zéro et l’Infini », dernièrement paru. Sans doute faut-il voir dans cet engouement pour une œuvre somme toute assez banale, le fait que l’auteur fournit ainsi aux adversaires du communisme une arme non négligeable à la veille des élections. N’est-on pas allé jusqu a dire qu’un des secrétaires du premier parti de France — quand on écrit ces mots on pense immanquablement à Thorez, le grand patriote clairvoyant et courageux (!) qui fut en effet un des premiers partis de France… comme déserteur en 1939 — aurait rendu visite à l’éditeur pour lui demander de limiter le tirage de ce livre qui, en notre époque de dithyrambes staliniens, produit un effet comparable à celui d’un pavé jeté dans une mare à grenouilles, un soir d’été. N’a-t-on pas insinué aussi — pure calomnie, bien sûr — que le parti visé aurait fait effectuer des achats massifs de l’ouvrage en question afin de retirer de la vente au public le plus grand nombre possible d’exemplaires. Tout cela est, ma foi, fort possible mais je ne suis pas de ceux qui affirment ce qu’ils ignorent.
Article signé Service autonome des renseignements généreux paru dans Quilombo, n° 1, décembre-janvier 1991, p. 6-7
Les sociologues n’y comprennent rien, les journalistes s’en tiennent aux clichés, les politiciens (petits ou grands) ne racontent que des conneries… Heureusement la littérature policière est là pour nous livrer le secret de la situation sociale dans les banlieues : les pauvres ne veulent plus se contenter des [merdes] du vieux monde, et pour le faire savoir ils sont prêts à foutre en l’air cette putain de boulangerie…
Article signé J.-C. paru dans Courant alternatif, n° 11, été 1991, p.11-13
■ CRISE DE LA SOCIÉTÉ DUALE
Le 25 mai, Mantes-La-Jolie fait à son tour la une de l’actualité ; le Val Fourré s’embrase !
Comment en est-on arrivé là ? Pendant les trois semaines qui précédèrent ce fameux weekend on assista à un déploiement de CRS significatif avec comme conséquence des contrôles musclés, des tabassages (1), etc. Il est bien évident qu’un fort ressentiment à l’égard des forces de police en est la suite logique. Lors de cette fameuse nuit du 25 mai se déroulait une soirée, dans la patinoire qui se trouve à l’entrée du Val Fourré. Plusieurs personnes qui tentèrent de rentrer pour participer à cette fête, furent refusés. Il s’en suivit quelques échauffourées et les responsables de la patinoire appelèrent les flics. Les causes immédiates de la révolte étaient donc réunies et il n’est pas étonnant qu’elle ait explosée.
« Ce n’est pas seulement la misère qui écrase les habitants des ghettos. C’est la police qui les brutalise et les terrorise… C’est d’être toujours traités comme des enfants et de n’avoir aucun pouvoir sur les choses les plus simples de la vie… C’est qu’on leur montre des vedettes auxquelles ils ne ressembleront jamais, des sapes de luxe qu’ils ne pourront jamais acheter… Les émeutes de Los Angeles ont éclaté parce que la rage accumulée depuis des années est arrivée à son point d’explosion. Cette rage est devenue un pouvoir. Les invisibles de toujours sont devenus des stars mondiales. »
Article signé Karoly Goulash et Sergio Tortellini paru dans Mordicus, n° 4, avril-mai 1991, p. 5
« Gardiens de murs » d’Alger critiquant sérieusement l’économie.
A Mantes-la Jolie, des lycéens ont repris à leur compte l’ancien programme écolier : « les cahiers au feu et la maîtresse au milieu ». A Vaulx-en-Velin, des bagnoles ont brûlé pour rompre l’ennui du week-end de Pâques, tandis que depuis février des jeunes avaient apparemment entrepris de venger à leur manière la mort de Thomas Claudio en « pare-choquant » à leur tour les voitures de flics avec de grosses cylindrées volées. Ce dépassement ludique de la civilisation automobile a donné des émotions aux passagers de plusieurs véhicules de police, à la vitrine d’un magasin de sport et aux occupants d’un commissariat percuté par une BMW. Plus de 600 flics ont été mobilisés pour fouiller des boxes et retrouver les béliers roulants. A Sartrouville, les 26, 27 et 28 mars, trois jours d’émeute ont suivi la mort de Djamel, avec rebelote le 10 avril, jour de la reconstitution du meurtre. Les flics attaqués à coups de pierres, de boules de pétanque et de coquetèles, des lardus en civil tabassés, des bagnoles brûlées, un magasin de meubles incendié.
Textes parus dans I.R.L.Informations et réflexions libertaires., n° 86, automne 1990, p. 3
Des voitures sont incendiées. Photo Progrès /Archives Le progrès (Source)
Maux en venin !
Vous avez voulu que vos marchandises soient désirables. Elles l’ont été au-delà de toutes vos espérances. Vous avez (nous avons) élaboré (ou laissé s’élaborer) une société dont le moteur serait l’envie, l’envie de posséder.
Article paru dans Lutte ouvrière, n° 1164, 12 octobre 1990, p. 16
D’un côté, le mur d’escalade de 47 mètres inauguré une semaine avant l’accident mortel qui a embrasé la ZUP, et de l’autre les restes calcinés de l’Intermarché incendié par les jeunes. Photo Progrès / archives Le Progrès (Source)
Trois jours après la mort d’un jeune motard, samedi 6 octobre, à Vaulx-en-Velin, des bagarres continuaient dans cette cité de la banlieue lyonnaise. Le déclenchement immédiat de ces émeutes, c’est la colère contre la police et, d’une certaine façon, l’insatisfaction profonde des jeunes de banlieues pauvres contre la situation et l’avenir que leur réserve la société.
Article signé Dji. M paru dans Courant alternatif,n° 3,novembre 1990, p. 6-7
Une Golf dont il ne reste plus rien. Photo Progrès /Archives Le progrès (Source)
Samedi 6 octobre, Vaulx-en-Velin, cité du Mas-du-Taureau ; Thomas Claudio, 21 ans, circulant sans casque à l’arrière d’une moto, est mort, vraisemblablement par la faute d’un fourgon de poli-ce tentant de coincer le deux roues. Dans cette cité, Thomas n’est pas la première victime du dé-lire sécuritaire ; en 1982, Wahid Hachichi est abattu par un automobiliste qui n’appréciait pas qu’il s’approche de sa BMW ; en 1983 un policier « énervé » tire en direction de jeunes ; en 1985, Barded Barka, qui circule en vélomoteur, est renversé par des Potiers et meurt. L’annonce de la mort de Thomas Claudio allait embraser la cité.
Textes parus dans Mordicus, n° 1, décembre 1990, p. 18-19
Samedi 29 septembre : réception monstre à la cité du Mas du Taureau à Vaulx-en-Velin, champagne et petits fours en présence de tous les notables locaux. But de la manœuvre : promouvoir l’image de Vaulx, zone pilote et rénovée, c’est-à-dire une vieille ZUP repeinte et replâtrée. Inauguration d’un mur d’escalade, symbole de l’intégration réussie. Les petits jeunes pourront faire du sport au lieu de cramer les bagnoles, pense-t-on en haut lieu. Un détail : cette inauguration, où les gens du quartier ont vu tout un aréopage bâfrer sous leur nez, a coûté la bagatelle de 100 bâtons.
Article paru dans Le Prolétaire,n° 408, octobre-novembre 1990, p. 3
On utilise des voiture-bélier pour enfoncer les façades des commerces. Photo Progrès /Archives Le progrès (Source)
La ville de Vaulx-en-Velin dans la banlieue de Lyon était un modèle de réhabilitation urbaine, d’aménagements urbains, d’intégration sociale ; faisant partie de ces opérations lancées dans toute la France après les affrontements des Minguettes, autre banlieue lyonnaise, au début des années 80, elle pouvait à bon droit être considérée comme une vitrine de la gestion social-démocrate des tensions sociales dans les quartiers populaires. La mairie, PCF, faisait plus dans le social que ce qu’aurait fait une mairie PS, forcément orientée vers les couches moyennes. La dernière réalisation, spectaculaire, était précisément destinée aux jeunes de la ville : un magnifique mur d’escalade, financé par la municipalité, la Région et l’État, qui avait été inauguré en grande pompe le 29 septembre. Le maire de Lyon était venu lui-même pour l’inauguration et il avait prononcé un discours où il vantait la « recette exemplaire » de Vaulx-en-Velin.
Peut-être vous en étiez-vous aperçu, mais C.A. ne colle pas toujours de très près à l’actualité… De par notre fonctionnement, et puis aussi dans le cas du sujet qui suit à cause des difficultés à avoir des informations dépassant le fait-divers. Difficultés dues au fait qu’on ne peut pas être partout (un jour, peut-être…) et que les jeunes immigrés n’ont pas une attitude très poussée d’échanges avec la presse du mouvement…
Chômage, misère, racisme, persécutions policières sont les raisons profondes de la tension qui règne dans les banlieues des grandes villes ; quand la crise économique dure et s’approfondit, quoi de plus intéressant pour les bourgeois et leurs larbins que de trouver un bouc émissaire au sein même de la classe ouvrière : le responsable du chômage n’est plus le capitalisme, c’est le travailleur étranger. Le sentiment d’insécurité suscité par l’aggravation des conditions de vie, l’instabilité de l’emploi est habilement détourné vers la revendication d’une répression accrue contre la petite délinquance montée en épingle par les médias parce qu’elle est le fait d’éléments issus des couches les plus exploitées.
Article signé A. B. paru dans Sans Frontière, n° 31, spécial juillet-août 1981, p. 9
Une voiture brûlée à Venissieux le 10 juillet 1981. (NOVOVITCH / AFP) Source
Dimanche 12 juillet, le poste de police qui avait été installé en catastrophe, la veille, en plein quartier a disparu. En début de soirée, un car de CRS qui patrouille dans la ZUP, s’arrête près du quartier Monmousseau et des CRS montent pour vérifier les identités. Ils embarquent deux jeunes qui n’avaient pas sur eux leurs papiers et les conduisent dans un coin sombre, près du cimetière. Après leur avoir flanqué une paire de claques, ils les relâchent. Mesquin. « C’est l’alcool qui m’a frappé » dira l’un d’eux.
Dans la banlieue lyonnaise, ça bouge. Pour une fois, ce sont les jeunes des familles d’immigrés qui font parler d’eux, ceux qui sont nés en France, mais qui ne sont ni d’ « ici », ni d’ « ailleurs », la « deuxième génération », comme on l’appelle.
Article paru dans Lutte ouvrière,n° 687, 1er août 1981, p. 12
Depuis plusieurs mois, dans la ZUP des Minguettes, des jeunes du quartier s’opposent de plus en plus aux policiers. Dans la nuit de mardi à mercredi 22 juillet, à la suite d’un cambriolage commis par trois d’entre eux, l’intervention des policiers a provoqué la révolte des jeunes présents ainsi que de certains habitants du quartier qui ont assailli les flics à coups de pierres.
PRISE DE POSITION DES ÉQUIPES DE PRÉVENTION DE LA SLEA (Société Lyonnaise pour l’Enfance et l’Adolescence).
PRÉALABLE
Face à une sollicitation réitérée des organismes de presse, des corps constitués, comme des personnes ordinaires, nous, équipes de prévention de la S.L.E.A, présentes sur les quartiers de la Grappinière, Vaulx-en-Velin, Saint-Jean Villeurbanne, les Buers, Part-Dieu-Guillottière, acceptons d’évoquer collectivement notre position par rapport à la violence.
La Grande Bretagne a été secouée par une vague d’affrontements. Combats de rue, cocktails molotov et barricades : telle était l’image du pays où l’on déclarait il y a peu : « de telles choses ne peuvent arriver chez nous …». Nous avons rencontré un membre de groupe de Londres de l’organisation communiste libertaire SOLIDARITY et lui avons demandé ce qu’il pensait des derniers évènements survenus dans le pays de la « loi et de l’ordre » de Mme Thatcher. Sa vision des conséquences politiques de ces évènements contraste avec la présentation un peu triomphaliste qui a été faite dans certaines publications libertaires.
Article de Brian Grogan paru dans Inprecor, n° 107, 5 août 1981, p. 7-9
A défaut de discipline parentale, les flics… (DR)
Au cours des deux dernières semaines, les principales villes de Grande-Bretagne ont été le théâtre de la révolte à grande échelle de la jeunesse contre le gouvernement conservateur. Les causes immédiates de ces explosions ont été le harcèlement policier ou les provocations menées par des membres des organisations fascistes. Au cours des événements, la jeunesse a édifié des barricades, jeté des pavés et des cocktails molotov contre la police et pillé les biens de consommation contenus dans les succursales des chaînes de magasins, toutes scènes qui rappelaient les événements d’Irlande du Nord.
Article de Dave Hayes paru dans Inprecor, n° 106, 20 juillet 1981, p. 3-4
Comme aux États-Unis, des émeutes de la misère, du chômage et de la peur (DR)
FOUTEZ le camp ! Écrivez toute la merde que vous voulez. Dites que c’est politique, ou quelque chose comme ça. Ça pourrait tout expliquer. Qu’est-ce que vous foutriez, vous, si vous habitiez ici ? On n’a besoin de personne pour nous dire la merde que c’est ici. Quelquefois, parmi tous ceux qu’on connaît, y en a pas un qu’a trouvé du travail ! Est-ce que vous habiteriez dans ces pièges à rats ? »
(Interview de jeunes émeutiers, The Observer, 12 juillet 1981.)
Article signé Jo. Swift paru dans I.R.L., journal d’expressions libertaires, n° 40, été 1981, p. 16-19
« La couleur n’a rien à voir là-dedans. Je crois que c’était une question d’autorité, de réaction à l’autorité ». (Avril 1980, un pasteur de Bristol après les émeutes noires).
« Je me fous de ce qu’on dit, seulement un être humain civilisé et normal ne se balade pas avec un cocktail molotov à la main… Ils riaient tout le temps… J’espère seulement qu’ils ont une conscience ». (Avril 1981, l’agent Haggis, 24 ans, à l’hôpital).
Après les émeutes de Bristol et de Brixton (banlieue de Londres) en mai dernier, la bourgeoise, à travers sa presse, avait voulu nous faire croire que cette série d’émeutes était due à un « conflit racial » entre les communautés, ce qui lui évitait de dévoiler la situation matérielle déplorable dans laquelle vit toute une frange de la classe ouvrière anglaise. Mais les violents affrontements entre les jeunes et la police à Toxteth (quartier de Liverpool) du 4 au 6 juillet ont montré que les jeunes, qu’ils soient Anglais, Antillais, Pakistanais, Guyanais, Jamaïcains ou Indiens, en ont assez de supporter les frais de la crise économique profonde qui touche le pays. Les bourgeois ont bien été obligés d’avouer que ces affrontements étaient dus à une situation matérielle terrible et éventuellement au chômage.
Article de François Rouleau paru dans Lutte ouvrière, n° 690, 22 août 1981, p. 8
Les jeunes face à la police à Manchester au cours de l’une des émeutes de l’été. (AFP)
Le 15 août, des milliers de manifestants ont envahi les rues de Liverpool pour exiger la démission du chef de la police locale, Kenneth Oxford, individu notoirement réactionnaire et raciste. Cette manifestation était organisée par le comité de défense de Liverpool 8 (nom officiel du quartier de Toxteth où se sont déroulées les émeutes du début juillet) qui regroupe des représentants des organisations communautaires indiennes et jamaïcaines ainsi qu’un certain nombre de militants syndicalistes ou membres de la gauche travailliste. Mais pour la première fois depuis le début des émeutes, elle avait reçu le soutien officiel du Parti Travailliste et de plusieurs syndicats.
Article de François Rouleau paru dans Lutte ouvrière, n° 685, 18 juillet 1981, p. 9
Parties le 4 juillet de Southall, dans la banlieue londonienne, les émeutes ont gagné en dix jours pratiquement toutes les grandes villes industrielles d’Angleterre. A l’heure où nous écrivons, seuls le Pays de Galles et l’Écosse n’ont pas été touchés. Du nord au sud du pays, d’est en ouest, des dizaines de milliers de jeunes se sont affrontés avec la police, à coups de barres de fer, de cocktails molotov, ou simplement de pierres, détruisant et dévalisant au passage des milliers de vitrines, de magasins, et assiégeant des dizaines de commissariats de police. Au total, plus de 75 villes ont connu de tels affrontements, dont un quart environ dans la gigantesque agglomération de Londres.
Article paru dans Lutte ouvrière, n° 684, 11 juillet 1981, p. 16
Toxteth après deux jours d’émeute. (Ph. UPI)
Un policier de Liverpool en action. (Ph. UPI)
Pendant cinq jours, trois des plus grands centres industriels de Grande-Bretagne — Londres, Liverpool et Manchester — ont été le théâtre de violentes émeutes. Dans un cas, à Southall dans la banlieue de Londres, la cause en a été une provocation raciste dans les autres, ce furent des réactions spontanées de la population contre les brutalités policières. Mais partout, le véritable arrière-fond de ces émeutes, c’était bien le chômage (il y a longtemps que le cap des trois millions de chômeurs a été dépassé en Grande-Bretagne), la misère et les rancœurs accumulées.
Article de François Rouleau paru dans Lutte ouvrière, n° 672, 18 avril 1981, p. 15
D’un côté, les jeunes Jamaïcains en colère, auxquels sont venus se joindre des habitants, blancs ou noirs, des environs ; de l’autre, la police en action : ce sont 4 000 policiers qui ont déferlé le 11 avril sur Brixton. (AFP)
Lundi 11 avril, la colère a éclaté à Brixton, dans la banlieue de Londres. Pendant trois jours, des affrontements ont opposé des centaines, peut-être même des milliers de manifestants, en majorité jamaïcains, aux forces de police qui quadrillaient la ville, prenant tour à tour la forme de véritables batailles rangées ou d’escarmouches isolées, entrecoupées d’accalmies plus ou moins durables.
Toxteth, July 1981: ‘Each evening, some of us would walk out into Parliament Street in balaclavas.’ Photograph: ANL/Rex Shutterstock (Source)
I – VIVENT LES EMEUTIERS, MA MÈRE, VIVENT LES EMEUTIERS…
3 millions de chômeurs, soit plus de 11 % de la population active (40 à 60 % des jeunes – noirs et blancs – dans certaines régions), le Royaume-Uni de Gde-Bretagne et d’Irlande s’enfonce de plus en plus dans sa DECADENCE.
Article paru dans Jeune Taupe, n° 37,juillet-août-septembre 1981,p. 5-7
11 April 1981, during the 1981 Brixton riot in London, police with riot shields line up outside the Atlantic Pub, on the corner of Atlantic Road and Coldharbour Lane, Brixton. The photographer wrote: « In April 1981, around lunchtime, I stepped out of a shop in Brixton and a car burst into flames some 20 yards up the street, marking the start of the worst episode of civil disobedience Britain had seen in over 100 years. These are some of the pictures from that day. » « Police with riot shields block the access to the main area of rioting. Up to this point they’d been using dustbin lids, sheets of ply, anything they could lay their hands on for protection. These riot shields had only just arrived. » (Source)
Durant les semaines précédant les émeutes, la police ne cessait d’investir les rues de Brixton. Le vendredi 3 avril le quartier est bouclé. Pendant toute la semaine « l’opération Swamp 81 » (I) s’était déroulée avec pour conséquence l’arrestation et la fouille systématique d’environ 1 000 personnes – surtout des jeunes noirs.