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Le respect de la personnalité humaine

Article paru dans le Bulletin d’informations du PPA, n° 1, juillet 1962

 

 

Certes, le 19 mars 1962 a marqué le cessez-le-feu, mais en vérité, on a continué à assassiner et à étrangler dans la plus grande impunité les militants du P.P.A. L’horreur ne s’est pas limitée à de tels forfaits. Hélas ! les militants P.P.A. qui avaient été libérés des camps et des prisons ont connu le lavage de cerveau, la torture et la mort.

Parmi ces victimes, se trouvaient des militants valeureux qui avaient été condamnés à mort ou à des peines de prison et même plus, par le colonialisme français. Ce n’est pas tout. A Tlemcen, à Aïn-Témouchent, à Bouïra, à Baba-Ali, à Boghari, à Chellala, à Djelfa, à Bou-Saâda, ainsi que dans d’autres régions, on a procédé à l’assassinat et à la liquidation expéditive. Pour fuir un tel massacre, plus d’un millier d’Algériens, femmes, enfants, vieillards ont dû se replier en France, le cœur serré et l’âme profondément blessée, tandis qu’en Algérie notre peuple célébrait l’indépendance dans une profonde inquiétude des lendemains.

Nous n’avons pas hésité à dénoncer à l’époque cette frénésie sanguinaire. Nos avocats ont transmis des listes de victimes aux autorités compétentes. Le P.P.A. a, en outre, distribué des milliers de tracts pour dénoncer ces séries d’assassinats.

La presse écrite et parlée ont été informées mais n’a que timidement et petitement fait écho à nos cris et à nos protestations. On s’occupait beaucoup plus alors des manifestations bruyantes et du référendum du 1er juillet au lieu de dénoncer véritablement les horreurs qui se perpétraient à travers toute l’Algérie. Tant qu’il s’agissait de la liquidation physique et politique du P.P.A., on feignait l’ignorance.

Des informations se rapportant aux enlèvements dont sont victimes les Européens en Algérie, nous notons leur projection à travers la presse, la radio. Le gouvernement français, par la voie de M. Joxe, a évoqué cette question au Parlement. De même, M. Jeanneney, premier ambassadeur de la République française à Alger, ainsi que les consuls de France en Algérie, s’attachent à dénoncer des enlèvements et les assassinats dont les Français sont l’objet.

Monseigneur Duval, archevêque d’Alger, vient d’élever à son tour une protestation énergique au nom de l’Eglise en demandant le respect de la personnalité humaine. Cela est fort bien. Mais ce qui l’est moins, c’est que ces mêmes protestations n’ont pas été formulées contre la liquidation physique des populations qui se réclament du Parti du Peuple Algérien. Faut-il croire que la respect de la personnalité humaine se limite aux seules populations européennes et chrétiennes ? L’Eglise ne dit-elle pas : « Tu ne tueras point » ? Nous ne pensons pas, car le Christianisme comme l’islamisme, condamnent le crime et son auteur.

La démocratie le condamne également avec plus d’énergie. Aussi, demandons-nous aux chrétiens et aux démocrates d’élever une protestation énergique contre tous les crimes sans distinction de race et de religion.

Le P.P.A., quant à lui, a été et demeure à l’avant-garde de la lutte pour le respect de la personnalité et des droits de l’homme.

2 réponses sur « Le respect de la personnalité humaine »

Le cessez le feu ne fut en réalité? que le signal à tous les tortionnaires pseudo moudjahid de la dernière heure, de régler leur compte avec ceux qui ne furent pas avec le FLN, couverts par les instances gouvernementale Françaises de France et d’Algérie car DEGAULE voulait tourner la page et la jeter aux feu, il voulait faire table rase du problème Algérien pour s’occuper de sa carrière et de l’avenir de la métropole, au prix de milliers de morts ou de disparus, comme si cette guerre n’avait pas encore atteint le niveau de morts nécessaires pour que l’Algérie soit indépendante, oh! combien de Messalistes, d’algériens supplétifs bafoués dans leur honneur, d’européens floués par l’OAS, ne sont jamais revenus de cette tempête meurtrière, dévastant des familles entières d’Algériens, fragilisés par leur appartenance politique ou ethnique. Le pire c’est qu’à ce jour ce sujet reste tabou plus de cinquante ans après, personne ne veut reconnaître ces génocides.

Bonsoir,
Merci pour votre commentaire.
Le document publié illustre combien la période du cessez-le-feu ne fut pas la plus pacifique de la révolution algérienne, en particulier pour les messalistes.
Je me permets de vous renvoyer à un de mes textes dans lesquels je traite particulièrement de cet épisode : « La ‘reconversion’ du MNA (mars-juillet 1962) : entre le succès d’une prophétie et l’échec d’un prophète », in Amar Mohand-Amer et Belkacem Benzenine (dir.), « Les indépendances au Maghreb », CRASC/IRMC, Oran, 2012, pp. 167-181. L’ouvrage a été édité à Paris chez Karthala sous le titre « Le Maghreb et l’indépendance de l’Algérie ».
Je recommande également la lecture de la thèse de l’historien Amar Mohand Amer, « La Crise du Front de libération nationale de l’été 1962. Indépendance et enjeux de pouvoirs » (Université Paris 7, 2010).
Quant au terme « génocide », je ne me l’approprie pas. Il répond à des critères précis et je préfère ne pas l’utiliser pour des raisons de rigueur et de prudence. D’ailleurs la propagande messaliste n’a utilisé le terme « génocide » qu’à des occasions bien précises: pour critiquer la politique du gouvernement français (et de Robert Lacoste en particulier); pour dénoncer le massacre de Mélouza; pour disqualifier les violences de l’OAS.

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