Catégories
évocations presse

Hocine Aït Ahmed et Mohammed Harbi : Déclaration

Texte paru dans la revue Sou’al, n°7, septembre 1987, p. 151-152


Nous voulons simplement, à l’occasion du procès de Klaus Barbie, mettre au clair certaines vérités historiques et rappeler quelques principes pour nous, Algériens, qui avons lutté pour l’indépendance de notre pays. Me Jacques Vergès cherche, aujourd’hui, à associer des « crimes contre l’humanité » commis par Klaus Barbie aux « crimes de guerre » perpétrés par l’ex-puissance coloniale en Algérie et cet amalgame trouve parfois, malheureusement, crédit dans notre pays.

Nous nous élevons contre cette grossière manipulation. Manipulation morale d’abord, car on ne défend pas un tortionnaire. Barbie en l’occurrence, en exhibant d’autres tortionnaires, fussent-ils ses ennemis d’hier. Manipulation de la vérité historique ensuite, car notre combat durant la colonisation peut et doit s’identifier au combat de la résistance française durant l’occupation allemande, donc au combat contre les Barbie bourreaux du peuple français. C’est du reste notre identification qui a incité nombre de Français qui ne voulaient pas que l’histoire de passe sur une scène truquée, à se solidariser avec nous. Manipulation juridique enfin, car la défense des droits de l’homme devant les cours françaises durant la guerre d’Algérie trouve sa suite logique dans la défense des droits de l’homme dans les pays nouvellement indépendants et non dans celle d’un homme, Barbie, dont la victoire aurait signifié l’extermination des juifs et celle de l’ensemble des sémites, puisque, selon l’idéologie nazie, ceux-ci étaient tous promis aux flammes.

Si nous, Algériens, nous devions avoir une quelconque place dans ce procès, ce n’est pas comme témoins à décharge de Barbie, mais comme témoins à charge, au nom des droits de l’homme qui [légitiment] notre propre combat.

Hocine AIT AHMED, juriste, membre fondateur du FLN

Mohammed HARBI, historien, ancien dirigeant du FLN

Déclaration confiée à Me Roland Rappaport, avocat du M.R.A.P. à l’occasion du procès Barbie, mais dont il ne fut pas fait état au cours du procès.

Laisser un commentaire