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Guerre Iran-Irak

Article paru dans Alarme, organe du Ferment ouvrier révolutionnaire en France, n° 23, janvier-février-mars 1984, p. 13-14

Les derniers événements de la guerre Iran-Irak ont attiré à nouveau l’attention sur ce conflit. On a « tout » dit sur son ampleur – comparable à celle de la 1ère guerre mondiale -, sur l’emploi des gaz de combat et l’envoi d’enfants à une mort certaine et obligatoire (étant « promis au paradis » ils n’ont pas le droit de revenir vivants…). Cette boucherie est montrée ici comme un spectacle lointain et étranger, joué par des fanatiques et des assassins.

Bien au contraire, cette guerre n’est pas un événement extraordinaire, coupé de la réalité quotidienne d’ici. L’entretien du conflit par les contrats industriels, les juteuses ventes d’armes, promesses politico-stratégiques, concurrences et convoitises pétrolières, lui donne une dimension à la mesure du système qui la sécrète, une dimension mondiale.

La barbarie qui noue est montrée n’est pas un excès mais une manifestation normale du Capital, qui massacre déjà les enfants chaque jour, emprisonne les hommes, s’accumule démentiellement et prétend fanatiquement être éternel.

La réduction du conflit à une simple rivalité politico-pétrolière de fanatiques, si elle n’est pas fausse dans une certaine mesure, est une distorsion complète de la réalité de la guerre (son imbrication mondiale selon la raison du Capital) et de ce qui la sous-tend : la lutte de classes.

Nous disposons actuellement plus d’informations directes sur l’Irak et c’est pourquoi nous traitons ici plus particulièrement de la situation dans ce pays.

Le prolétariat irakien, actif et nombreux surtout depuis la 2ème guerre mondiale, se dégage lentement, avec de nombreux à-coups, des influences staliniennes nationalistes, religieuses, auxquelles il est en butte. Dès 1926 en effet, le P « C » irakien s’est lancé, sur ordre de Moscou, dans la lutte anti-impérialiste (contre la Grande-Bretagne qui occupait le pays) et pour une république démocratique ainsi que le droit à l’autodétermination des kurdes. C’est en 1948 que les prolétaires se soulevèrent massivement pour la première fois, contre l’occupant anglais ; puis en 1952 et en 1956, contre l’intervention à Suez. A chaque foie la répression fut très violente mais en 1958, la royauté et la Grande-Bretagne (en partie sous la pression « amicale » et démocratique des USA qui lorgnaient vers le pétrole) « libèrent » l’Irak, où s’installe la république avec à sa tête un front patriotique soutenu par le P « C ». La lutte entre les deux nouveaux blocs impérialistes se manifestera par le coup d’Etat du parti Baath (« Résurrection ») en 1963, réprimant tout ce qui avait paru « agité » sous la république et faisant 100 000 emprisonnés. Dès Novembre 1963, des officiers chassent ce pouvoir et une autre forme de terreur militaire s’instaurera jusqu’en 1968, où le parti Baath reprend le pouvoir par un autre coup d’Etat.

Ce parti dès lors, va baser toute sa politique sur l’union nationale par le militarisme anti-kurde puis anti-iranien. Les oppositions démocratiques et religieuses, soutenues par le P « C », chercheront dès lors à orienter les révoltes ouvrières et paysannes (un tiers de la population est rural) vers le soutien au nationalisme kurde ou iranien. Le « Tudeh » a d’ailleurs aidé les imams à prendre le pouvoir en Iran et parmi la majorité (60% de la population) chiite d’Irak, 150 000 d’entre eux luttent dans les rangs de l ‘armée iranienne.

Malgré toute la répression, malgré tout le bourrage de crane nationaliste, les prolétaires se sont encore soulevés contre l’ordre établi en 1978, indifférents aux consignes des organisations d’opposition et à leur grande surprise, malgré tout ce qu’elles firent pour récupérer le mouvement à leur profit, en semant le plus de confusion possible, lorsqu’il fut réprimé (des morts par centaines et des emprisonnés par milliers). L’aboutissement ultime de la répression (rejoignant les préoccupations économiques du régime, alors 2ème exportateur mondial de pétrole) fut la déclaration de la guerre à l’Iran en Septembre 80, envoyant à la boucherie des centaines de milliers de prolétaires irakiens et étrangers, enrôlés de force à partir des immenses camps de travail où la main-d’oeuvre immigrée en Irak est parquée.

Le rôle du P « C » a été très important par l’activité de ses militants dans le soutien au Front National contre l’Iran. Là-bas comme ailleurs, il est une force cyniquement contre-révolutionnaire ; son opposition à l’Islam n’est que façade, il a les mêmes intérêts fondamentaux : un prolétariat exploité ou décapité.

Evidemment, cela n’a pas été sans difficulté et de nombreuses désertions et rebellions ont d’abord eu lieu sur le front où leur écrasement rappelle celui qui eu lieu en Champagne du côté français, en 1917.

La situation en Irak s’aggrave de jour en jour et le prolétariat en tant que classe est massacré dans une tuerie sans borne. Pour échapper au massacre, les prolétaires désertent de plus en plus nombreux, mais les familles des déserteurs sont soumises à toutes sortes de persécutions. Quant à ceux qui refusent de porter les armes, ils sont fusillés ou envoyés en 1ère ligne…

Les communistes ne peuvent qu’appeler les prolétaires d’Irak et d’Iran à retourner leurs armes contre leur bourgeoisie, de fraterniser et de mettre en pratique l’internationalisme afin d’en finir avec cette barbarie.

La seule guerre du prolétariat, c’est la guerre de classe pour son émancipation !

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