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Les positions de l’extrême gauche israélienne et palestinienne

Déclaration commune de l’Organisation Socialiste Israélienne et du Front Démocratique Palestinien datée du 3 juin 1967 parue dans Voix ouvrière, n° 84, mardi 13 juin 1967, p. 3

Nous publions ici des extraits d’une déclaration commune de l’ « Organisation Socialiste Israélienne », organisation marxiste révolutionnaire d’Israël, et du « Front Démocratique Palestinien » qui regroupe des militants arabes d’origine palestinienne. Cette résolution adoptée à Londres à la veille du conflit, le 3 juin, ne parle évidemment pas de la situation militaire et de l’occupation d’une partie de l’Egypte, de la Jordanie et de la Syrie par l’armée israélienne. Mais ce texte, en préconisant des solutions pour le problème palestinien, en dénonçant la politique pro-impérialiste des dirigeants israéliens et en dévoilant la démagogie nassérienne, fait entendre une voix internationaliste, faible il est vrai, mais bien réelle, dans l’Orient arabe déchiré par la guerre.


Le conflit israélo-arabe est la continuation sous sa nouvelle forme du conflit palestinien. Le problème palestinien est le conflit entre le sionisme politique et les Arabes palestiniens. Il est le résultat de la dépossession de la population indigène de Palestine par la colonisation sioniste.

Les Palestiniens arabes, voués à l’oubli par Ben Gourion et Hussein, voyaient leurs espoirs de devenir un peuple libre se rapprocher grâce à la puissance militaire de l’Egypte. Ils s’attendaient à ce que Nasser, le leader reconnu de la lutte anti-impérialiste dans le monde arabe, jette à bas Hussein affaibli, leur oppresseur, et défende leur cause.

Jusqu’au 29 mai Nasser, la radio du Caire et tout l’appareil de propagande égyptien avaient attaqué Hussein dénonçant son premier ministre comme agent de la C.I.A. et avaient fait croire aux Palestiniens qu’il rétablirait leur indépendance en Palestine. Le politicien nationaliste palestinien corrompu Choukeiry déclarait :

« Hussein est un pantin de l’impérialisme mondial. Pour libérer la Palestine nous devons d’abord détrôner Hussein. »

Puis, trahissant soudainement les Palestiniens, Nasser signait un pacte avec Hussein, donnait l’accolade à « son frère arabe » devant les cameras de télévision et sauvait ce monarque féodal, ce pantin de l’impérialisme à un des moments les plus critiques de sa carrière. Le raciste Choukeiry, qui quelques jours avant s’était écrié : « Il n’y aura pas de survivants juifs dans la guerre sainte de libération de la Palestine » était partie prenante dans ce pacte opportuniste. Simultanément Nasser offrait un marché similaire au roi Fayçal, le dirigeant révolutionnaire anti-impérialiste bien connu d’Arabie Séoudite.

Dans le passé c’étaient toujours Ben Gourion et les Anglais qui sauvaient le trône de Hussein ; aujourd’hui c’est Nasser.


Comme nous l’avons dit, le problème palestinien a deux aspects politiques principaux :

Celui du rétablissement des droits des Palestiniens, et celui d’intégrer les Israéliens dans le Moyen-Orient. Les leaders nationalistes arabes prétendent avoir une solution pour le premier (« libération de la Palestine »), mais ne demandent même pas de solution pour le second. Les leaders sionistes d’Israël prétendent avoir une solution pour le second (« préserver le statu quo ») mais ne se soucient nullement de résoudre le premier.


Pourtant seule une solution qui résoudrait simultanément les deux aspects de ce problème peut donner un résultat viable et stable. Nous présentons ici une solution qui satisfait cette condition fondamentale.

1º – Israël doit subir une transformation profonde et révolutionnaire. La structure du pouvoir sioniste et tous les éléments de la suprématie juive doivent être complètement abolis. Cela doit être obtenu par une lutte intense commune à tous ceux qui à l’intérieur d’Israël luttent pour intégrer cet Etat au Moyen-Orient.

2° Cet Etat d’Israël non sioniste rapatriera les réfugiés palestiniens qui voudront revenir et indemnisera entièrement pour leurs propriétés, leurs terres et leurs souffrances, ceux qui ne veulent pas retourner. Il déclarera être disposé à faire des concessions territoriales aux Palestiniens et à les aider à établir un Etat palestinien indépendant si tel est leur désir.

3° – Que les Palestiniens établissent leur Etat ou non, pour maintenir l’unité, le nouvel Israël non sioniste, transformé, poursuivra une politique destinée à unir les Israéliens et les Palestiniens dans un Etat fédéral socialiste (non nationaliste) ou les Juifs et les Arabes jouiront de leurs pleins droits civils et d’une entière liberté culturelle.

4° – Cet Etat fédéral participera au processus d’unification politique et économique au Moyen-Orient tout entier.


Nous disons à tous les leaders israéliens et palestiniens, chauvins, nationalistes et racistes : pendant 19 ans, vous ne vous êtes pas approchés d’un seul pas d’un accord. Vous avez eu deux guerres, et maintenant vous en préparez une troisième qui n’apportera pas le salut mais la mort.

Organisation Socialiste Israélienne

Front Démocratique Palestinien.

Londres, le 3 juin 1967.

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