Article paru dans La Lutte ouvrière, n° 8, 15 août 1936

Les ouvriers immigrés sont en France plusieurs centaines de mille …
Les travailleurs immigrés, chassés de leur pays par la misère, venus chercher du travail en France, peuvent constituer aussi bien un facteur révolutionnaire, qu’une arme dans les mains du fascisme. Ces travailleurs sont dans toutes les questions de salaires, d’allocations de chômage, etc., traités d’une façon bien pire que les travailleurs français. Leur occupation est beaucoup moins sûre ; les patrons ne pourraient pas – selon la loi – les occuper dans une mesure de plus de 10 % sur l’ensemble de la main-d’œuvre employée, et s’ils les embauchent dans une proportion plus élevée – comme ils le font souvent -, ils en profitent pour leur imposer des conditions de travail et de rémunération inhumains.
C’est pourquoi les immigrés attendent un « changement » radical ; c’est pourquoi ils sont susceptibles de s’allier avec les partis qui leur promettront et seront capables d’agir. Comme la grande majorité des travailleurs de ce pays, ils se sont ralliés dans ces derniers temps au P. C., mais s’ils étaient déçus dans l’espoir révolutionnaire qui les a conduit, ils pourraient devenir une proie facile de la démagogie du fascisme, en particulier du fascisme de leur pays d’origine (polonais, allemand, italien) qui escompte déjà l’incapacité révolutionnaire du P. C.
Les revendications principales des immigrés sont ;
1) abolition de la loi qui limite à 10 % la main-d’œuvre immigrée ;
2) concession de la carte de travailleur à tous les immigrés ;
3) parité des immigrés avec les français pour ce qui concerne les allocations de chômage.
Toutes ces revendications se résument dans celle d’un statut juridique des immigrés.
Le Parti Communiste, avant les élections, promit aux immigrés de réaliser ces revendications susdites. Mais après la constitution du gouvernement du Front populaire il n’a rien fait pour tenir ses promesses. Il parle le moins possible des questions des immigrés, il essaie de les satisfaire avec des grandes paroles sur ce qu’on a déjà obtenu (accord Matignon !) La raison en est claire : les radicaux (qui représentent aussi des industriels), et les chefs réformistes de la C.G.T. (qui se préoccupent surtout des intérêts corporatifs de quelque catégorie d’ouvriers français spécialisés) ne sont pas favorables aux exigences des immigrés.
Les travailleurs immigrés sont très mécontents du P. C. Dans les organisations d’immigrés contrôlés par le P. C., les protestations contre la politique du Parti sont à l’ordre du jour. Les chômeurs immigrés des Régions Paris-Est et Sud ont même déjà proposé d’occuper les mairies communistes de leurs localités, pour manifester leur volonté de ne pas se laisser duper.
Pour désarmer encore une fois ces masses avec des promesses, le groupe parlementaire communiste a présenté enfin à la Chambre des Députés une proposition de loi sur un statut des immigrés. Mais il l’a présenté de façon à la faire discuter seulement d’ici 3 ou 4 mois.
Evidemment ce n’est pas en ayant confiance dans la Chambre des Députés que les travailleurs immigrés pourront obtenir ce qu’ils exigent. Il faut lutter pour avoir quelque chose. Or, c’est seulement les révolutionnaires de la IVe Internationale qui organisent maintenant la continuation de la lutte de classe en France.
Ils ne sont pas résignés à attendre que le P. C. et le P. S. changent d’attitude. Ils pensent que ces partis changeront d’attitude seulement si les masses recommencent a agir indépendamment d’eux. Les travailleurs immigrés qui, eux non plus, n’attendent pas de miracle doivent donc se rallier autour des camarades français de la IVe Internationale. Ce n’est pas nécessaire qu’ils en acceptent déjà les principes ; nous ne voulons pas imiter les bureaucrates en imposant nos opinions à tous les ouvriers. C’est suffisant que de s’accorder pour des actions d’aujourd’hui pour des revendications tout de suite réalisables.
Avec des meetings, avec des démonstrations en faveur des revendications les plus brûlantes des immigrés de chaque localité donnée, on peut réveiller la solidarité de classe de tout le prolétariat français et faire entendre au Front populaire que les travailleurs ne veulent pas d’une tranquillité sociale, d’un embrassons-nous qui perpétue leur misère !
X.X.X.

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