Article d’Albert Lévy paru dans Droit et Liberté, n° 212, 15 septembre – 15 octobre 1962, p. 7-8 ; suivi de « Le problème des repliés : y voir clair » par Fernand Benhaïem
L’UN des tueurs O.A.S. du Petit-Clamart, le « réfugié » hongrois Laslo Varga, se cachait à Versailles chez la vicomtesse de la Barre de Nanteuil, née du Paty de Clam, qui savait tout de ses activités. Il y a là tout un symbole. Le nom de du Paty de Clam est étroitement lié aux entreprises de l’antisémitisme en France. C’est le colonel du Paty de Clam, grand-père de l’actuelle vicomtesse, qui arrêta le capitaine Dreyfus en 1894 ; il joua en cette Affaire un rôle prépondérant, dans le camp de l’injustice et de la haine, ce qui lui valut d’être arrêté à son tour en 1899 et mis à la retraite d’office. Un autre du Paty de Clam, fils du précédent, devait devenir le troisième « Commissaire aux questions juives » du gouvernement de Vichy, après Xavier Vallat et Darquier de Pellepoix.
Les liaisons de l’O.A.S. dans les milieux traditionnels de l’antisémitisme militant ne sauraient étonner. Il s’agit tout au plus d’une confirmation. L’O.A.S. n’a-t-elle pas été constituée, au départ, autour de groupes ouvertement antisémites, tels que « Jeune Nation », qui lui fournit son insigne – la croix celtique – ainsi que force cadres et nervis.
LE NATUREL PREND LE DESSUS …
Au cours des enquêtes sur l’O.A.S., la police arrêtait, au début de juillet, Pierre Sidos, et tout récemment, Jacques Sidos, son frère : ce sont précisément les fondateurs, les animateurs de « Jeune Nation », dont les commandos inscrivaient les croix gammées sur les murs de Paris, au début de 1960, et se sont spécialisés, depuis, dons les plastiquages, les agressions et les hold-hup.
C’est dans des réunions clandestines de « Jeune Nation », a-t-on révélé, que les trois tueurs hongrois impliqués dans l’attentat du Petit-Clamart avaient rencontré leurs complices Naudin et Watin, ce dernier remplaçant de Canal comme organisateur des commandos O.A.S. en métropole. Et Vincent, le plastiqueur qui a défiguré et rendu aveugle la petite Delphine Renard, déclarait l’autre jour à son procès :
« Je suis rentré dans un des mouvements de jeunesse qui ont été la cause ou le prétexte du 13 mai » …
Si ce n’est pas « Jeune Nation », c’est, sans aucun doute, l’une de ses organisations-sœurs. Les Sidos appartiennent à une famille d’anciens « miliciens ». De même Rouvière, l’un des tueurs jugés à Troyes pour l’attentat de Pont-de-Seine : son père fut condamné à mort au lendemain de la Libération.
Au hasard des noms d’« activistes » cités ces derniers temps, il faut signaler aussi Claude Jacquemart, qui, avant de disparaître, était rédacteur en chef du torchon antisémite « Charivari » ; ou encore J.-M. Ferré, ex-directeur de « C’est-à-dire » qui poursuivait les mêmes objectifs dans un style plus « distingué ».
On ne doit jamais oublier ces faits, lorsque les bandits de l’O.A.S. se présentent en « patriotes », déchirés par de nobles cas de conscience. On ne doit pas oublier non plus que l’organisation factieuse compte parmi ses troupes et ses chefs un certain membre d’anciens S.S., déserteurs de la légion, au domicile desquels ont découvrit parfois, à Alger, des drapeaux à croix gammées.
Si aujourd’hui l’O.A.S.-C.N.R. ne fait pas preuve ouvertement d’antisémitisme, ne nous y laissons pas tromper ! Il s’agit, sans aucun doute, d’un hommage du vice à la vertu, d’une tactique visant à ménager l’opinion française, qui est profondément hostile à tout ce qui rappelle le régime nazi. Mais on ne peut imaginer que les éléments racistes et antisémites qui truffent l’O.A.S., aient renoncé, pour toujours, comme par enchantement, à leur doctrine.
Le naturel, d’ailleurs, ne manque pas de prendre le dessus, à maintes occasions : quand les plastiqueurs envoient des lettres d’insultes à telles personnalités juives, quand ils menacent de faire sauter un monument aux juifs morts en déportation, quand ils souillent les plaques et les monuments commémorant la Résistance contre le nazisme … Le racisme est un tout : les violences meurtrières déchaînées contre les musulmans d’Algérie, au lendemain des accords d’Evian, nous renseignent assez sur l’état d’esprit et les méthodes qui prévalent à l’O.A.S.
L’INTERNATIONALE NEO-NAZIE
Lorsque Bidault et Soustelle, dirigeants avec Argoud du « C.N.R. », ont été expulsés d’Italie, cet été, ils devaient y tenir, selon l’agence Reuter, une « réunion au sommet du conseil national de la Résistance, à laquelle devaient être invités les représentants de tous les mouvements extrémistes d’Europe ».
Quels sont ces « mouvements extrémistes » ? Nous ne pouvons en donner la liste exacte. Mais il résulte d’articles, de déclarations en très grand nombre, que l’internationale néo-nazie voit dans l’O.A.S. un exemple et un modèle.
Tenus à moins de précautions que les dirigeants de l’O.A.S., ceux des groupes racistes des autres pays lui expriment bruyamment leur sympathie – sans parler de Franco et Salazar, qui offrent systématiquement refuge et facilités aux comploteurs fascistes.
Il y a plusieurs mois déjà que les liaisons de l’O.A.S. avec un groupement homologue de Belgique, le « Mouvement d’Action Civique » (M.A.C.) ont été révélées. Outre l’aide matérielle, le M.A.C. apportait à l’O.A.S. l’appui de sa publication, « Nation-Belgique-Jeune-Europe », ornée de la croix celtique, sur le plan de la propagande et de l’organisation.
Or, le M.A.C. entretient lui-même d’étroites relations – et ne s’en cache pas – avec de nombreux groupes néo-nazis, en Suède (Mouvement Social Européen du « théoricien » raciste Per Engdahl), en Allemagne (Jeunesse Nationale, Parti du Reich Allemand, etc … ), au Danemark, (Runebevaegelsen), en Argentine, en Afrique du Sud, en Grande-Bretagne, en Espagne, etc …
La Suisse est devenue, elle aussi, une plaque tournante de l’organisation fasciste en Europe. Récemment une interpellation faite au Grand Conseil Vaudois attirait particulièrement l’attention sur le groupement qui s’intitule le « Nouvel ordre Européen » (N.O.E.), et à la direction duquel participe Léon Degrelle, le chef « rexiste » belge, réfugié en Espagne. L’interpellateur, qui réclamait des mesures contre ces activités fascistes et racistes, cita plusieurs articles exaltant l’O.A.S. parus dans « L’Europe réelle », organe du N.O.E.
Même propagande dans l’hebdomadaire allemand « Deutsche Soldaten Zeitung » qui écrit : « L’opposition nationale allemande doit soutenir l’O.A.S. ». Ou encore dans les publications des néo-nazis suédois, qui organisèrent une manifestation pro-O.A.S. contre un meeting destiné à saluer l’indépendance algérienne.
« Nous sommes prêts à aider l’O.A.S. », a déclaré de son côté le chef nazi américain Rockwell en débarquant à Montréal, après son récent voyage en Grande-Bretagne, où il participa au congrès de l’internationale néo-nazie. Quant à la John Birch Society, organisation fasciste à laquelle Rockwell apporte son soutien, elle va plus loin : elle fait circuler des pétitions pour la libération de Salan, et se trouve à l’origine d’un « Comité américain de soutien à l’O.A.S. » !
D’AUTRES SOUTIENS …
Triste destin pour un Bidault et un Soustelle que de se trouver solidaires de tels milieux, en France comme à l’étranger. Il est vrai qu’ils peuvent se targuer d’autres liaisons apparemment plus honorables jusque dans certains cercles officiels, et d’une étrange mansuétude des pouvoirs publics, qui constitue pour eux et leurs complices le plus précieux des encouragements.
Condamnations dérisoires et pluies d’acquittements, libération de détenus retrouvés peu après les armes à la main, discours ouvertement O.A.S. tenu par des « témoins » à la barre des tribunaux, bienveillance de certains chefs militaires envers les comploteurs fascistes, répugnance à engager des poursuites contre les chefs responsables de l’O.A.S. : autant de faits qui suscitent l’inquiétude indignée de la grande masse des démocrates.
Tous ceux qui entendent s’opposer au racisme et à l’antisémitisme, ont le devoir d’exiger avec tous les antifascistes, des mesures efficaces, pour qu’il soit mis fin à cette menace mortelle qui pèse sur la sécurité des citoyens et sur l’avenir de la France.
Albert LEVY.
Le problème des repliés : y voir clair
Par Fernand Benhaïem
AVANT le combat des Algériens pour leur indépendance, était couramment appelé Algérien, celui qui vivait en Algérie. Depuis, pour une grande partie de l’opinion publique française, il y a les Algériens auxquels, consciemment ou non, l’on accole l’épithète de musulmans, et les repliés d’Algérie, ou les rapatriés d’Algérie, ou les Français d’Algérie ou les Pieds-noirs. Complexité des dénominations due à une complexité de situation dont le caractère est maintenant devenu évident, mais qui prend naissance avec la conquête de l’Algérie.
Des ouvrages récents et singulièrement celui de Lacoste, Nouschi et Prenant (1) donnent son véritable sens à la conquête de l’Algérie par la France. Il ne s’agit plus d’une querelle de moutards : « Tu frappes mon consul et encore sans y mettre les gants, avec un chasse-mouche, et je me venge en t’envoyant mes soldats », ni d’un redressement de torts cher aux lecteurs de bandes dessinées, provoqué par les actes de piraterie barbaresques. Admirez au passage les subtiles évocations du terme « barbaresques ».
La réalité est plus simple, plus compréhensible. Il s’agissait de satisfaire les intérêts sordides de certains milieux financiers. A partir de cette volonté délibérée commence la conquête de l’Algérie et la colonisation qui va prendre de plus en plus, avec des vicissitudes, un aspect systématique. Les aïeuls de nos actuels repliés sont venus à des titres et en des temps divers : soldats de l’armée de conquête, que leurs généraux tentent de fixer en Algérie ; affairistes et spéculateurs venus dans les « fourgons » de l’armée ; Saint-Simoniens et déportés de 1848 ; chômeurs des ateliers nationaux ; adversaires politiques de Napoléon III ; Alsaciens-Lorrains, Corses et main-d’œuvre du Midi.
Cela pour l’origine spécifiquement française. Mentionnons égaiement les Français d’Algérie d’origine espagnole, maltaise ou italienne, dont la naturalisation devient automatique depuis la loi de 1889. Ils forment une importante minorité et n’ont aucun lien affectif direct avec la France et n’ont jamais connu, serait-ce par tradition, la pensée démocratique française.
Mentionnons également les juifs, devenus français principalement depuis le décret Crémieux, mais qui sont en réalité d’origine algérienne. Naguère, les laudateurs officiels disaient de l’Algérie qu’elle était le creuset où se brassaient différentes races. Voire !
UNE LIGNE DE FORCE : LE RACISME
L’on facilitait la naturalisation pour les besoins de la cause coloniale, mais le cloisonnement ne sautait pas pour autant. L’on avait tenté de maintenir certains privilèges économiques au profit des Français d’origine.
De par sa structuration spécifiquement agricole, l’Algérie coloniale nourrissait essentiellement un esprit de religion, de caste, de race. Mais surtout, s’il y a un lien entre tous les éléments européens, c’est le racisme à l’égard des Algériens musulmans. Ce racisme qui prend des expressions différentes mais qui est le dénominateur commun essentiel des Français d’Algérie. Les musulmans y étaient affublés de tous les vices : paresseux, ignorants, sales, fanatiques, sanguinaires et même de vices contraires.
Elevés dans le colonialisme, les enfants comme les adultes ont eu le sentiment que la conquête de l’Algérie était presque un mythe, qu’ils n’étaient pas là en raison de la loi du plus fort, mais par une sorte de fatalité, d’heureuse fatalité même, car c’est la loi de la nature que les plus capables viennent en aide aux arriérés, car c’est la vocation de la France généreuse de venir en aide aux pays déshérités et d’apporter ainsi à l’Algérie le gout de l’hygiène, de la belle architecture, des belles routes, le goût du goût. Ce sentiment généreux a l’air de contredire le racisme foncier évoqué plus haut. En réalité, cette générosité d’esprit fait elle-même partie du racisme. Elle permet, l’âme sereine, d’accuser les musulmans d’ingratitude, par-dessus le marché. Et quand bien même fallait-il parler de conquête ! Oui ! Il y a eu conquête. Oui ! la France a envoyé un corps expéditionnaire. Ces Arabes sont si mal élevés ! Frapper le consul de son éventail ! D’ailleurs l’Algérie, ca n’existait pas avant cela. L’histoire de l’Algérie n’est qu’une suite de conquêtes. La prend qui le désire. Et ce sont les conquérants qui y laissent les plus belles choses. Voyez les vestiges romains. Voyez la France qui n’a fait que continuer, en mieux souvent, naturellement, l’œuvre de Rome. Cet état d’esprit était fort courant avant l’indépendance. Il était entretenu par les milieux officiels et singulièrement dans l’enseignement.
Nous connaissons tous le « Nos ancêtres les Gaulois » des manuels d’histoire d’Algérie. C’est plus révélateur qu’il ne semble. Il ne s’agit pas seulement d’inculquer aux juifs, aux Espagnols, Italiens, etc … , ainsi qu’aux musulmans, par une sorte de guerre psychologique, qu’ils sont Français par filiation et que leur histoire, même en Algérie, se confond avec celle de la population de France, mais d’autre chose encore. Cette petite phrase, c’est la négation même de la communauté musulmane d’abord et surtout, et des antécédents des Français qui ne le sont pas de souche. C’est la négation de l’existence musulmane. Les musulmans ne comptent pas.
ILS NE SAVENT PAS …
L’histoire de l’Algérie est bâclée. Cela se comprend. L’Algérie n’a pas d’histoire. Avant la France, c’était le marasme. Ah oui ! il y a bien Abd-el-Kader et sa somptueuse smala, mais il a été battu. Il a été très chevaleresque, il faut bien le dire. Il s’est rendu à la France qui l’a traité avec égards. Lorsqu’on fait le silence sur les autres insurrections, sur les multiples soulèvements des Algériens, Abd-el-Kader apparaît alors comme une noble figure de Don Quichotte. Ces omissions augmentent le mépris pour l’Arabe, appellation raciste de tout ce qui est musulman.
Le racisme est le fruit conséquent de cette mentalité orientée en fonction d’un système économique féroce : le colonialisme. Peu de Français d’Algérie ont appris qu’ils vivaient non seulement dans une colonie, mais dans un régime colonialiste. Que les colons ne peuvent prospérer qu’au détriment des fellahs. Que les musulmans dans leur ensemble, s’appauvrissent de plus en plus parce qu’on les a expropriés, parce que, vivant dans un régime tribal plus ou moins communautaire, ils ont été astreints intentionnellement, au régime de la propriété privée qui a ruiné leur économie. Que les biens destinés à leur éducation religieuse, à leur culture, leur ont été enlevés.
Les Français d’Algérie, la masse des petites gens, n’ont jamais appris tout cela. Ils ne savent pas pourquoi ils traitent avec mépris les musulmans d’indigènes, alors qu’eux-mêmes le sont bien souvent, comme l’a si cruellement fait sentir aux juifs le régime de Vichy. C’est que les musulmans sont avant tout indigènes parce qu’ils relèvent du code de l’indigénat. L’indigénat est une institution juridique éminemment raciste.
L’indigénat remet aux administrateurs de commune mixte les pouvoirs d’un juge : ainsi s’efface la traditionnelle séparation des pouvoirs » (Nouschi, Prenant, Lacoste). Et nous faisons ainsi deux découvertes : C’est que la loi, le Droit, sont la loi et le Droit d’une classe dominante et que le racisme s’alimente dans un système économique d’oppression.
L’effet contraire, involontaire de cette oppression, c’est la prise de conscience de cette exploitation par les Algériens. Les frontières de cette exploitation précisent celles de l’Algérie.
VICTIMES SANS LE SAVOIR
Il était possible malgré leur racisme originel, d’intéresser les masses de statut français à la construction de l’Algérie nouvelle à la condition d’en faire la politique. Cela n’a jamais été voulu. Et lorsque le droit à l’autodétermination a été reconnu, l’O.A.S. a repris directement à son compte, ce qui se faisait au nom de la France qui, pour elle, ne jouait plus le jeu que l’on connaît.
Par ses actes, elle a fait apparaître que la haine, le mépris et la violence ont été considérés en Algérie comme de rentables investissements. En suite de quoi, la masse des petites gens de statut français quittent l’Algérie, sentent confusément le lien essentiel entre leur présence et la violence, mais ne sachant point que leurs intérêts profonds sont en contradiction avec ceux des personnages qui faisaient l’Algérie coloniale, en contradiction dynamique, surtout.
La concentration des terres entre les mains de gros riches a chassé, de plus en plus les petits colons qui viennent grossir le prolétariat ou l’artisanat des villes. Et cette situation des petits colons ne pouvait aller qu’en s’aggravant, en vertu des lois de la concentration foncière.
Les masses européennes auraient dû se désolidariser de leurs chefs de file, porte-parole des gros colons et lutter contre eux. Après la guerre, ils l’avaient commencée, cette lutte, en votant en nombre peu négligeable pour les partis de gauche, pour les communistes. Mais cette lutte, pour avoir des chances de succès aurait dû rassembler européens et musulmans. Les gros colons contre lesquels ils luttaient, c’est le colonialisme qui les produit. Pour être mené jusqu’à son terme logique, le combat aurait dû être dirigé contre le colonialisme et passer par le nationalisme algérien. L’Algérie aurait alors surement fait l’économie de plusieurs étapes. Mais cela, les petites gens français d’Algérie ne le voulaient pas. Victimes des gros colons, ils étaient en même temps leur clientèle. Ils bénéficiaient eux-mêmes par rapport aux masses musulmanes, d’avantages économiques, culturels, qui leur faisaient croire à une supériorité de droit divin faisant partie de leur essence même.
Ils étaient pris dans leurs contradictions de base. Il eût fallu les éclairer politiquement, faciliter leur intégration dans l’Algérie qui se créait par de franches discussions. Cela n’a pas été voulu. La masse européenne éclairée, cela aurait donné un contenu encore plus dynamique à la révolution algérienne. Les barrières du racisme emportées, les cadres européens auraient apporté leur savoir-faire et dans une certaine mesure, les traditions révolutionnaires et démocratiques de la France.
Y a-t-on pensé ? A-t-on pensé que les spéculateurs du pétrole auraient pu être balayés par cette puissante montée fraternelle qui aurait pris a son compte et pour le profit du peuple, l’exploitation des richesses industrielles de l’Algérie ? Le programme idéal était celui-ci, mais les gouvernants ni l’O.A.S. n’en ont pas voulu. Les uns voulaient le pétrole, les autres la terre et entre les deux une multitude d’imbrications. Mais de place pour le menu peuple dons leur calcul ? Point.
PARMI LES DEMOCRATES
Les repliés quittent donc leur pays pour rejoindre la France, envers laquelle grand est leur ressentiment. Ils doivent savoir que les démocrates écoutés, ils auraient peut-être maintenant vécu dans une ambiance fraternelle en Algérie. Ils doivent savoir que les démocrates écoutés, ils pourront, les petites gens, les petits artisans, mieux défendre leurs intérêts profonds.
Ils devront perdre les réflexes acquis par 130 ans de colonialisme. Si en France, l’exploitation de certaines minorités ethniques est plus facile, celle des prolétaires, des petits artisans est réelle, et sérieuse. Et elle ira en s’amplifiant, dans le cadre du Marché commun.
Les repliés connaîtront les mêmes problèmes que les Français de même condition. Il s’agit donc pour ceux qui restent en France de ne pas vivre avec le passé, de ne pas obéir à de puérils sentiments de vengeance qui ne les servent pas, et de reconnaitre objectivement l’évolution inéluctable de l’histoire.
La page de l’Algérie coloniale est définitivement tournée. Toute excitation à la haine, au racisme, ne peut donc servir que d’autres intérêts n’ayant plus rien à voir avec le problème algérien.
Ces intérêts seront nécessairement en contradiction essentielle avec ceux des petites gens repliés d’Algérie. Ceux-ci devront changer leurs conditionnements réflexes, la structure économique n’étant plus la même.
Leur place devra se trouver parmi les démocrates qui les aideront politiquement, à la rejoindre.
(1) A Nouschi, A. Prenant et Yves Lacoste : L’Algérie, passé et présent (Editions Sociales).
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