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Les communistes et la question des libertés démocratiques

Article paru dans El-Oumami, organe des communistes-léninistes algériens, n° 4, janvier 1983, p. 7-9

Introduction

Depuis l’accession de l’Algérie à l’indépendance, les masses populaires sont écartées de la vie politique, marginalisées et étouffées : la répression, l’intimidation et la terreur psychologique ont été érigées en méthodes de gouvernement. La classe dominante a trouvé dans l’ANP, seule force organisée du pays, son principal point d’appui politique.

Il s’en suit que si l’actualité historique de la révolution socialiste en Algérie ne fait aucun doute depuis l’indépendance, il n’en demeure pas moins que sans l’entrée en scène du prolétariat et des masses exploitées, il serait illusoire d’imaginer l’ouverture d’un quelconque processus révolutionnaire, à moins de tomber dans une conception putschiste ou blanquiste de l’histoire.

Nous établissons donc un lien dialectique entre notre stratégie (la révolution socialiste en Algérie dans le cadre de la révolution prolétarienne mondiale) et notre tactique qui consiste à favoriser les conditions concrètes auxquelles nous sommes confrontés l’émergence autonome du prolétariat et des masses prolétarisées et exploitées sur la scène politique, émergence sans laquelle il serait fou d’envisager le passage au stade de la préparation de l’insurrection révolutionnaire qui devra balayer les institutions bourgeoises pour instaurer la dictature du prolétariat.

Comment expliquer l’absence de libertés démocratiques en Algérie

L’absence des libertés démocratiques élementaires qui signifie pour les masses l’interdiction pure et simple des droits d’expression, de grève, de réunion et d’association ne relève pas bien évidemment du hasard. Il s’agit d’un état de fait qui sanctionne avant tout un rapport de forces entre les classes qui ont participé, pour des raisons différentes, à la guerre de libération nationale. Les fractions de la petite et moyenne bourgeoisie qui ont investi l’appareil d’Etat au lendemain de l’indépendance ont pu le faire parce qu’elles avaient réussi auparavant à s’assurer le contrôle et la direction du FLN et de l’ALN.

Malgré les mouvements de protestation sporadiques, malgré la résistance des ouvriers agricoles et de certains secteurs de l’UGTA, qui ont marqué la vie sociale et politique durant les premières années de l’indépendance, le mouvement des masses n’a pas eu la force de contrecarrer efficacement l’usurpation des fruits de la révolution par les couches sociales qui ont conquis l’appareil d’Etat.

En l’absence d’organisations de classe indépendantes capables de coordonner et de centraliser les mouvements de résistance et de protestation, une profonde démoralisation s’est emparée des masses populaires, la démobilisation sociale et politique qui s’en est suivie a été mise à profit par le pouvoir qui a su organiser, par la répression et le mensonge, une vaste opération de dépolitisation des masses.

Le rapport de forces était donc tel que les masses n’ont même pas pu imposer au pouvoir leurs droits élémentaires à l’expression et à l’organisation.

Mais l’absence de libertés démocratiques s’explique également par la forme de domination politique correspondant à la nature de la nouvelle classe dominante qui a remplacé en Algérie l’ancienne bourgeoisie coloniale. En effet, les fractions de la petite et moyenne bourgeoisie qui ont profité de l’accession du pays à l’indépendance pour se lancer à l’assaut du pouvoir d’Etat étaient relativement faibles et avaient donc besoin de renforcer leur assise économique et sociale en s’appuyant directement sur l’appareil d’Etat d’une part pour écraser les masses populaires, et d’autre part pour neutraliser provisoirement les fractions de la bourgeoisie privée qui voulaient de leur côté profiter de l’indépendance en vue de s’assurer l’hégémonie politico-économique et rempalcer l’ancienne bourgeisie coloniale.

L’Etat fort était donc une nécessité objective pour les fractions qui allaient constituer la nouvelle classe dominante. Elles avaient et ont toujours peur que les masses populaires profitent de la moindre brèche, de la moindre liberté pour s’y engouffrer avec leurs revendications sociales et politiques propres. Il faut ajouter à cela l’absence de grands appareils réformistes politiques et syndicaux à l’Européenne capables d’amortir les luttes ouvrières en vue de les canaliser et de les détourner de leurs objectifs de classe et l’impossibilité matérielle pour la classe dominante algérienne d’entretenir un véritable « syndicalisme rose » (démocrate-réformiste) de type occidental qui a nécessité d’énormes dépenses en vue de corrompre une « aristocratie ouvrière » capable de former l’épine dorsale d’un appareil réformiste qui aurait pour fonction spécifique d’embrigader la classe ouvrière.

Une revendication juste et légitime

Dans un pays où tout mouvement social tant soit peu important est systématiquement confronté à la répression bourgeoise, il est clair que pour se mettre en mouvement et s’organiser à vaste échelle, le prolétariat et les masses prolétarisées et paysannes pauvres seront amenées objectivement à faire accompagner leurs revendications sociales de cette revendications centrale, à savoir la liberté de s’exprimer et de s’organiser indépendamment des institutions et des structures officielles. L’ensemble des libertés qui ont trait aux droits de faire grève, de s’exprimer, de se réunir, de s’organiser, de se rassembler et de manifester, ajoutées à l’exigence de l’égalité complète entre les hommes et les femmes et de la reconnaissance des langues populaires passent aujourd’hui ou sont plus connues sous le nom de libertés démocratiques d’une part parce qu’au XIXe siècle la satisfaction de ces revendications étaient liée à la victoire de la révolution démocratique et d’autre part parce que ce sont des revendications qui intéressent plusieurs classes sociales à la fois.

N’en déplaise à ceux qui préfèrent dénaturer nos positions en nous faisant passer pour des « ultra-gauchistes » qui condamneraient purement et simplement le mot d’ordre des libertés démocratiques sans autre recours, il a toujours été clair pour nous que nous considérons les libertés démocratiques comme une revendication juste, légitime et urgente à l’étape actuelle de la lutte des classes en Algérie. En effet, dans cette question comme dans toutes les autres, nous nous en tenons aux positions du marxisme révolutionnaire restaurées par Lénine à la fois contre les opportunistes de droite (réformistes) et de gauche (ultra-gauche infantile).

Dans la question des libertés démocratiques, le marxisme a toujours combattu deux déviations symétrique apparemment contradictoires mais qui se rejoignent dans la pratique. D’une part, l’indifférentisme qui rejette la lutte pour les libertés démocratiques sous prétexte que celles-ci sont compatibles avec l’ordre bourgeois et intéressent d’autres classes que le prolétariat. D’autre part, le frontisme qui, inversement, appelle le prolétariat à faire front avec la petite bourgeoisie et reléguer au second plan ses revendications socialistes sous prétexte qu’il faut d’abord réaliser les libertés démocratiques et seulement après se consacrer à la lutte pour le socialisme.

Contre ceux qui appelaient le prolétariat à l’ « abstention » politique, Engels écrivait :

« Les libertés politiques, le droit de réunion et d’association, la liberté de la presse, telles sont nos armes. Et nous devrions accepter de limiter l’armement et faire de l’abstention, lorsqu’on essaie de nous en priver ? On prétend que toute action politique signifie reconnaître l’ordre existant. Or si ce qui existe nous donne les moyens pour protester contre l’état existant, dès lors l’utilisation de ces moyens n’est pas une reconnaissance de l’ordre établi » (1).

Dans un autre texte Engels écrivait dans le même sens :

« Même au cas extrême où, par peur des ouvriers, la bourgeoisie se réfugierait dans le giron de la réaction en faisant appel à la puissance de ses ennemis pour se protéger des ouvriers, il ne resterait au parti ouvrier qu’à poursuivre, en dépit des bourgeois, l’agitation trahie par eux en faveur des libertés bourgeoises, de la presse, du droit d’association et de réunion. Sans ces libertés, il ne peut avoir lui-même les coudées franches ; il y lutte pour son élément vital, pour l’air qu’il lui faut afin de respirer » (2).

Contre ceux qui appelaient le prolétariat à s’unir avec la petite bourgeoisie afin d’arracher en commun les revendications démocratiques, Marx écrivait :

« Une telle union tournerait uniquement à l’avantage des petits bourgeois démocratiques et tout à fait au désavantage du prolétariat. Le prolétariat perdrait en totalité sa situation indépendante, achetée par tant de peines, et retomberait au rang de simple annexe de la démocratie bourgeoise officielle. Cette union doit donc être repoussée de la façon la plus catégorique » (3).

Par la suite, cette idée a été développée par Lénine :

« Tout en montrant la solidarité qui unit tels ou tels groupes d’opposition aux ouvriers, les social-démocrates mettront toujours les ouvriers au premier plan ; ils s’attacheront toujours à expliquer le caractère temporel et conditionnel de cette solidarité ; ils souligneront toujours que le prolétariat est une classe à part qui, demain, peut se trouver opposée à ses alliés d’aujourd’hui. On nous dira : « cette mise au point affaiblira tous ceux qui combattent à l’heure actuelle pour la liberté politique ». Une telle mise au point, répondrons-nous, fortifiera tous ceux qui combattent pour la liberté politique. Seuls sont forts les combattants qui s’appuient sur les intérêts réels, bien compris de classes déterminées ; et tout escamotage de ces intérêts de classe, qui jouent dès à présent un rôle prépondérant dans la société moderne, ne fera qu’affaiblir les combattants » (4).

Comment donner à la revendication des libertés démocratiques un contenu de classe prolétarien ?

Si l’interdiction des libertés d’expression, de réunion, d’association et de manifestation ne touchait que le prolétariat, si les discriminations juridiques et sociales ne touchaient que les femmes issues du prolétariat, la question aurait été simple. Le problème c’est que l’interdiction des libertés d’expression, de réunion et d’association, les discriminations qui frappent les femmes et l’oppression culturelle intéressent en Algérie plusieurs classes sociales à la fois. Ceci dit, parce qu’elles intéressent plusieurs classes sociales à la fois, ces revendications ne peuvent pas ne pas prendre un contenu de classe différent suivant qu’on se place du point de vue des intérêts de telle ou telle classe sociale. Chacune des classes sociales intéressées par ces revendications est objectivement amenée à leur donner un contenu social et politique correspondant à ses intérêts de classe propre.

a/ Pour la bourgeoisie libérale la revendication des libertés démocratiques signifie essentiellement l’atténuation de l’hégémonie économico-poliitque de la bourgeoisie d’Etat et la réhabilitation du secteur privé, ce qui suppose l’abolition du monopole d’Etat sur le commerce extérieur et une plus grande participation de la bourgeoisie privée aux affaires publiques :

b/ Pour la petite bourgeoisie marchande et artisanale, écrasée par le capitalisme mais vivant après tout de la propriété privée, la revendication des libertés démocratiques signifie la libéralisation économique et l’allègement des contraintes bureaucratiques qui entravent le procès de circulation des matières premières, des marchandises et de l’argent ;

c/ Pour la petite bourgeoisie intellectuelle et technocratique étouffée par la concentration et la centralisation bourgeoise mais vivant après tout de la division sociale du travail instaurée par le capitalisme, la revendication des libertés démocratiques signifie la porte ouverte au carriérisme « loyal » et « honnête » basé sur le savoir et les diplômes ;

d/ Pour le prolétariat et les masses prolétarisées et exploitées qui ne disposent d’aucune réserve économique et culturelle dans la société bourgeoise, la revendication des libertés démocratiques signifie la possibilité concrète de s’organiser à vaste échelle pour d’une part mener le combat pour les revendications socio-professionnelles urgentes et pour d’autre part se préparer à renverser violemment tout l’ordre social existant.

Aujourd’hui, la lutte des classes en Algérie n’a pas encore atteint le degré de maturation qui permette de distinguer clairement les différentes classes sociales les unes des autres sur le terrain de la lutte politique bien que des indices nous encouragent à penser que dans le mouvement social la radicalisation des masses a eu raison des courants petits bourgeois démocratiques qui prêchaient la modération et le dialogue avec l’Etat bourgeois. Comment dans ces conditions, nous, militants de la cause du prolétariat et du socialisme, arriverons-nous à donner un contenu de classe prolétarien à la revendication des libertés démocratiques ? (5)

1/ Donner à la revendication des libertés démocratiques un contenu de classe prolétarien c’est éviter que la mobilisation des masses ne serve les intérêts et les objectifs de la bourgeoisie libérale et de la petite bourgeoisie commerçante, artisanale, intellectuelle et technocratique. C’est dire donc que la revendication des libertés démocratiques doit être constamment liée aux revendications socio-professionnelles de la classe ouvrière et des masses prolétarisées et exploitées (austérité, licenciements, logement, santé, transport, allocations de chômage, service national, etc…).

2/ Donner à la revendication des libertés un contenu de classe prolétarien c’est éviter que le mouvement des masses qui d’instinct se place sur le terrain de la force et de la violence, ne soit contaminé par le pacifisme et le démocratisme des courants bourgeois et petits bourgeois. C’est dire donc que la revendication des libertés démocratiques doit être inséparable de l’agitation pour l’emploi des méthodes de classe, de l’action directe, de l’auto-défense prolétarienne et de la violence de masse.

Lutter pour la revendication des libertés démocratiques dans la perspective de la révolution prolétarienne

Si la mise en avant des revendications socio-professionnelles et l’emploi des méthodes de classe sont indispensables pour éviter que la revendications des libertés démocratiques ne soit déviée sur un terrain réformiste, il doit être clair que pour arriver à déjouer effectivement et à long terme les manœuvres réformistes des courants bourgeois et petits bourgeois, il est nécessaire de rattacher constamment la revendication des libertés démocratiques à la seule perspective révolutionnaire possible à notre époque, à savoir la perspective de la révolution socialiste prolétarienne. « Jamais à aucun moment, le social-démocrate ne doit oublier l’inévitable lutte de classe du prolétariat pour le socialisme contre la bourgeoisie et la petite bourgeoisie, si démocratique et si républicaine qu’elles puissent être », écrivait Lénine (6).

Il s’en suit que dans notre propagande et notre agitation, la dénonciation des solutions et des courants démocratiques-réformistes, qu’ils soient de droite ou de gauche, doit constituer un axe permanent et fondamental (7).

Dans cette perspective, nous devons dénoncer avec la dernière énergie la position défendue par les courants trotskystes qui soutiennent que pour arracher les libertés démocratiques, ils peuvent être amenés à établir des « accords tactiques » avec des fractions bourgeoises et petites bourgeoises (8). L’attitude réformiste et opportuniste des trotskystes renvoie directement à la conception fausse qu’ils ont du processus révolutionnaire dans un pays comme l’Algérie où il faudrait, selon eux, passer d’abord par la réalisation du « programme démocratique révolutionnaire ».

Dans la réalité, les Trotskystes sont en retard d’une révolution car la société algérienne souffre aujourd’hui plus des tares inhérentes au développement capitaliste que des séquelles du colonialisme même s’il est vrai que des tâches démocratiques restent à réaliser dans certains domaines (question agraire par exemple). En tout état de cause, la nature de classe bourgeoise de l’Etat en place en Algérie ne permet plus désormais d’envisager une solution politique révolutionnaire autre que la solution prolétarienne. C’est pourquoi il est absolument faux de transposer mécaniquement en Algérie le mot d’ordre d’Assemblée Constituante qui était historiquement valable dans la situation de la Russie tsariste.

Pour nous, l’Etat bourgeois n’est pas à démocratiser ni à réformer, mais à détruire. La lutte pour arracher les libertés démocratiques doit être menée sur un terrain de classe dans la perspective de la mobilisation du prolétariat et des masses exploitées en vue de renverser la bourgeoisie et instaurer la République des Conseils des Ouvriers et Paysans pauvres. Toute autre perspective et notamment celle de l’Assemblée Constituante ne pourra que servir de soupape de sécurité aux fractions bourgeoises qui voudraient sauver leurs privilèges au prix de quelques concessions, déboucher sur le rafistolage des institutions bourgeoises en crise et détourner le prolétariat de la tâche fondamentale que lui dicte l’actualité historique de la révolution socialiste : la destruction des institutions de l’Etat bourgeois et la mise en place de ses propres organes de pouvoir.


(1) F. Engels, « Sur l’action politique de la classe ouvrière », 1871, in Marx-Engels, La Commune de 1871, Paris, 1971, p. 210.

(2) F. Engels, « La question militaire prussienne et le parti ouvrier allemand », 1865, in Marx-Engels, Écrits militaires, l’Herne, Paris, 1970, p. 490.

(3) K. Marx, « Adresse du Conseil Central à la Ligue », 1850, in K. Marx devant les jurés de Cologne, Ed. Costes, Paris, 1939, pp. 239-240.

(4) Lénine, Oeuvres, T. 2, p. 341.

(5) Telle était la préoccupation de la Gauche Communiste d’Italie, courant dont nous nous proclamons, qui intégrait dans son projet de programme d’action de 1922 la défense des libertés de grève, de réunion et d’association mais en insistant sur la nécessité impérative d’employer à cette fin des méthodes de classe : « Ces revendications, que le parti communiste avancera comme des objectifs d’une action du prolétariat tout entier, peuvent être de nature économique strictement syndicale (…) ; elles peuvent enfin concerner la politique de l’Etat, comme le droit d’organisation, le droit de grève, etc. Toutes ces revendications sont admissibles et peuvent encadrées dans les luttes du parti communiste, à la condition qu’elles soient présentées comme un objectif à atteindre par la lutte et l’action directe des masses, qui doivent forcer aussi bien les partis bourgeois que leurs propres chefs sociaux-démocrates à tenir les promesses » (Projet de programme d’action du Parti Communiste d’Italie présenté au IVe Congrès de l’Internationale Communiste, 1922).

(6) Lénine, « Deux tactiques de la social-démocratie dans la révolution démocratique », Œuvres, T. 9.

(7) Ces courants sont au nombre de quatre en Algérie :
– l’Union nationale pour la liberté et la démocratie (UNLD) exprime les intérêts de la bourgeoisie libérale.
– l’Union de la Gauche Socialiste (UGS) regroupe les partisans d’une alternative autogestionnaire autour de l’ancien représentant de la « Gauche » du FLN, Mohamed Harbi.
– le Front des Forces Socialistes (FFS) s’est appuyé sur le mouvement culturel berbère pour réclamer la démocratisation du régime.
– enfin, les Ben Bellistes viennent de constituer en France des « Comités de soutien à l’action de Ben Bella pour la démocratie ». Aucun de ces courants n’exprime véritablement les intérêts historiques de la classe ouvrière et des masses populaires. L’UNLD, le FFS et les Ben Bellistes refusent de prendre en compte la lutte des classes qui traverse la société algérienne. Quant aux sociaux-démocrates de l’UGS, ils voudraient dévier la lutte sociale et politique vers des objectifs réformistes puisque sous prétexte de lutter contre le système bureaucratique, ils leur proposent de changer le mode de gestion en vigueur sans toucher aux rapports de production bourgeois (marché, salariat, entreprise), ce qui revient à proposer aux travailleurs… de gérer eux-mêmes leur esclavage capitaliste !

(8) Dans les thèses adoptées par sa conférence mondiale de décembre 1980, le courant trotskyste-lambertiste auquel est affilié l’Organisation Socialiste des Travailleurs d’Algérie (O.S.T.), soutenait notamment : « La nature de la bourgeoisie nationale des pays arriérés, classe exploiteuse et semi-opprimée, détermine en de nombreuses occasions la nécessité d’accords temporaires avec les organisations nationalistes bourgeoises de masse, dans le cadre du Front unique anti-impérialiste (FUA), la nécessité de développer des actions contre les gouvernements dictatoriaux et répressifs, de lutter pour les pleins droits démocratiques et les libertés individuelles, nous impose fréquemment d’établir des accords tactiques avec des secteurs petits bourgeois et même bourgeois et leurs partis » (Tribune Ouvrière, n°7, octobre 1981). Inutile de rappeler que l’autre courant trotskyste représenté en Algérie par le « Groupe Communiste Révolutionnaire » (G.C.R.) partage complètement ce genre de position frontiste et n’hésite pas à aller jusqu’à soutenir les réformistes du PAGS lorsque ces derniers se rangent au côté de la bourgeoisie technocratique contre la bourgeoisie privée.

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