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L’Amicale frappe à Belfort

Article paru dans El-Oumami n° 24, avril 1982, p. 16

L’ancien président algérien Ahmed Ben Bella, l’ancien premier ministre soudanais Sadeq al-Mahdi et l’évêque melkite Hilarion Capucci lors de la Conférence internationale du Conseil islamique à Paris le 22 septembre 1982. (Photo by Jean-Claude FRANCOLON)

L’ « Amicale des Algériens en Europe » semble revenir à ses vieilles méthodes dans le but de semer la peur dans les rangs des travailleurs émigrés. C’est ce qui se dégage en tout cas du récent incident qui a lieu le 28 mars dernier à la Maison du Peuple de Belfort au cours d’une réunion publique organisée par Ben Bella et ses partisans. Plusieurs dizaines de nervis de l’Amicale sont intervenus violemment à coups de barres de fer en scandant le nom de Boumediene et ont ainsi réussi à mettre un terme à la réunion, espérant en même temps décourager la présence des travailleurs émigrés à ce type de réunion.

L’Etat algérien prétend évidemment que l’action du commando de l’Amicale n’a pas été téléguidée par lui mais était une action spontanée de la part de « militants » algériens soucieux de sauvegarder le prestige de leur pays à l’étranger. Cela ne l’a pas empêché bien sûr d’intervenir auprès des autorités françaises dans le but de mettre un terme aux déclarations publiques de Ben Bella contre le régime, étant entendu que venant d’une personne aussi bien placée que Ben Bella, ces déclarations – sur la corruption qui ronge le régime notamment – ont valeur d’aveux. L’Etat algérien a même utilisé l’argument des gros contrats commerciaux pour « convaincre » le gouvernement français de faire taire Ben Bella. Le Ministère français des Affaires Extérieures a finalement répondu positivement à la requête des autorités algériennes puisqu’il a rendu public un communiqué invitant Ben Bella à respecter le « devoir de réserve » en France.

Ce n’est pas notre objet de parler ici de la campagne publicitaire lancée par Ben Bella et ses partisans. Nous avons déjà eu l’occasion de montrer que les travailleurs n’ont rien à attendre d’un charlatan comme Ben Bella qui, même s’il revenait au pouvoir avec son projet de «république islamique», ne fera pas mieux que ce qu’a fait et continue de faire en Iran Khomeiny (1). Nous reviendrons là-dessus une prochaine fois. Ceci dit, il nous semble important d’attirer l’attention de nos lecteurs dans l’émigration sur le fait que l’attaque du commando de l’Amicale n’est pas seulement une attaque contre les partisans de Ben Bella. S’il ne s’agissait que de cela, nous n’aurions pas éprouvé le besoin d’en parler. Dans la réalité, il s’agit d’une attaque contre une réunion où l’on dénonce publiquement devant des centaines de travailleurs le régime actuel en Algérie. C’est surtout cela que les officines du régime ne peuvent tolérer. Il nous faut donc nous attendre à ce que ce type d’attaques se multiplie pour viser sans discernement tout groupe de travail-leurs cherchant à sensibiliser les milieux de l’émigration sur les conséquences catastrophiques de la politique économique et sociale de l’Etat bourgeois en Algérie et sur la nécessaire mobilisation en vue de contribuer aux côtés de nos frères de classe restés au pays à la lutte contre le système des capitalistes, des profiteurs et des corrompus.

Il est inutile de rappeler qu’on n’a rien à attendre des autorités françaises qui fermeront les yeux à chaque fois que l’Amicale frappera mais qui montreront du zèle lorsqu’il s’agira de poursuivre et de faire taire les opposants algériens. La seule perspective réaliste pour ceux qui veulent se battre effectivement contre le régime algérien afin de lui arracher les libertés politiques et syndicales élémentaires consiste à se préparer dès aujourd’hui pour répondre coup pour coup aux attaques de l’Amicale. Les groupes de travailleurs et les comités qui existent dans l’émigration doivent apprendre à s’entraider et à coopérer — par delà leur diversité politique et idéologique — dans l’organisation des piquets de surveillance et la mise sur pied de services d’ordre efficaces au cours des réunions publiques, rassemblements, etc.


(1) voir l’article « les travailleurs n’ont rien à attendre de Ben Bella » dans El-Oumami n°14, février 1981

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