J’ai choisi de partager cette résolution sur la libération de la femme algérienne, adoptée lors du premier congrès de la Fédération de France de l’Union des syndicats de travailleurs algériens (USTA) qui s’est tenu à Paris en juin 1957. Le texte a été publié dans le journal La Commune (n°4, juillet 1957), qui était l’organe du Comité de liaison et d’action pour la démocratie ouvrière (CLADO) au sein duquel se regroupaient les militants français plutôt favorables au Mouvement national algérien (MNA).
Il ne peut y avoir d’égalité entre l’homme et la femme dans un pays comme l’Algérie où les hommes eux-mêmes ne jouissent d’aucun droit politique. La libération de la femme algérienne implique donc sa participation à la lutte pour la libération de l’Algérie de l’oppression coloniale. En conséquence, le premier Congrès de la Fédération de France de l’U.S.T.A. lutte en premier lieu pour que, sur le plan des droits politiques, liberté de la presse, de réunion, liberté d’organisation, élections libres, etc., la démocratie soit appliquée en Algérie pour tous les algériens, quel qu’en soit le sexe, la race, l’origine ou la religion.
La libération de la femme algérienne présuppose sur le plan économique toute une série de mesures permettant à l’Algérie de sortir de ce moyen-âge économique où vit l’écrasante majorité du peuple algérien et qui ne sert qu’à asseoir la domination économique d’une infime minorité de gros colons et de féodaux musulmans.
Construire dans le pays un réseau moderne de maternité, de crèche, de dispensaire, installer des services de protection maternelle et infantile, une sécurité sociale au bénéfice de tous et non d’une minorité, édifier des écoles, des hôpitaux, des maisons de repos, des bâtiments pour colonies de vacances, supprime les bidonvilles et bâtir des logements modernes, avec l’eau, le gaz et l’électricité. Assurer un pouvoir d’achat décent à ceux qui par millions n’ont pas de pouvoir d’achat du tout.
Telles sont les premières mesures réelles qui permettront de libérer la femme algérienne, de sortir de l’analphabétisme, de la misère et de la maladie un peuple de 10 millions d’humains, dont le poids retombe surtout sur la femme.
Il n’y a pas de libération de la femme algérienne en dehors de la réalisation de ces objectifs que s’assigne l’USTA.
Concernant certains problèmes spécifiques intéressant la femme algérienne, le peuple algérien dénonce la politique colonialiste qui légalise la prostitution, plaie de notre jeunesse où se perdent corps et âmes par milliers et milliers, des jeunes algériennes musulmanes. Le premier Congrès de la Fédération de France de l’USTA exige la suppression immédiate des « Maisons closes » qui, en Algérie sont toujours autorisées ; le châtiment exemplaire de tous ces « Glaouis » algériens, européens et musulmans qui édifient des fortunes scandaleuses par la « traite des blanches ».
L’USTA revendique une aide économique substantielle à l’installation des jeunes ménages, leur permettant par une prime d’installer un véritable foyer.
Le premier Congrès de la Fédération de France de l’USTA fait sienne les revendications de la femme algérienne travailleuse :
– A travail égal, salaire égal.
– Maximum de travail par jour : 8 heures.
– Deux jours de repos par semaine.
– 12 semaines de congé maternité payées : 6 semaines avant l’accouchement, 6 semaines après la naissance.
– Interdiction absolue d’utiliser la main-d’œuvre féminine à des travaux pénibles et malsains.
Tels sont quelques-uns des premiers points du programme sur lequel la centrale syndicale algérienne appelle les femmes algériennes à se rassembler et à s’organiser dans l’U.S.T.A.