Article d’Edgar Morin paru dans Arguments, n° 1, décembre 1956-janvier 1957, p. 1-7
Remarques à propos de : Abdoulaye Ly : Les masses africaines et l’actuelle condition humaine ; Dia Mamadou : Réflexions sur l’économie de l’Afrique Noire ; Cheikh Anta Diop : Nations nègres et culture (tous ces ouvrages aux Editions Présence Africaine) et du 1er Congrès International des Écrivains et Artistes Noirs, Paris, 19-22 septembre 1955, organisé par Présence Africaine.
Article de Pierre Naville paru dans Arguments, n° 4, juin-septembre 1957, p. 1-4.
Les jeunes camarades se sont intéressés à l’action des Conseils ouvriers dans les événements de Pologne et de Hongrie depuis octobre 1956, et depuis quelques années en Yougoslavie. Mais pourquoi s’imaginent-ils que l’apparition de tels Conseils est un fait absolument nouveau ? Et pourquoi font-ils souvent à leur sujet de la métaphysique au lieu d’étudier avec soin leur rôle, les transformations de leurs fonctions, les résultats de leur activité, etc… ?
« Interview d’un ancien militant du M.N.A., qui fut l’un des créateurs de l’Union syndicale des travailleurs algériens (USTA), la première organisation syndicale algérienne », parue dans Tribune algérienne, n° 7, juillet 1976, p. 3-5
Spiritual Leader Of the Algerian Independence Messali Hadj In Gouvieux, France, in 1962. (Photo by Keystone-France/Gamma-Rapho via Getty Images)
T.A. : Que penses-tu de la situation politique actuelle, de la discussion sur la Charte ouverte par le pouvoir ?
R. : La situation politique en Algérie est arrivée à un tournant décisif. Pour la première fois depuis le coup d’état militaire du 19 juin 1965, Boumedienne qui a fait de l’Algérie sa propriété personnelle, et de la lutte du peuple algérien depuis l’Etoile Nord Africaine une simple introduction à son régime d’arbitraire, a été contraint, parce que son régime n’avait aucune assise dans la classe ouvrière, la paysannerie, a été contraint, de tenter de mystifier une fois de plus le peuple algérien avec sa campagne sur la Charte.
Extrait de la conférence prononcée par Albert Camus à l’Université d’Uppsala le 14 décembre 1957 et reproduite dans ses Œuvres, Paris, Gallimard, 2013, p. 1344-1346
SWEDEN – DECEMBER 12: The French writer and essay writer Albert CAMUS (1913-1960) in Stockholm, Sweden. He was there for the awarding of the Nobel Litterature Prize by King GUSTAV VI ADOLPH and all the members of the royal family of Sweden : prince BERTIL, Queen LOUISE, princess MARGUARETHA, prince WILHELM and princess DESIREE. (Photo by Keystone-France/Gamma-Keystone via Getty Images)
Depuis un siècle environ, nous vivons dans une société qui n’est même pas la société de l’argent (l’argent ou l’or peuvent susciter des passions charnelles), mais celle des symboles abstraits de l’argent. La société des marchands peut se définir comme une société où les choses disparaissent au profit des signes.
Mon dernier article intitulé « Mémoires torturées – Maurice Audin et les fantômes de la guerre française en Algérie » vient de paraître dans le mensuel de critique et d’expérimentation sociales CQFD, n° 169 (octobre 2018).
Extrait de Maurice Clavel, Le jardin de Djemila, Paris, René Julliard, 1958, p. 19-22.
CHRONIQUE
Paris, février-avril 1957
I
J’avais quelques amis au Mouvement National Algérien et je m’en méfiais plaisamment : trop français. En eux semblaient revivre nos vieux révolutionnaires, dont il ne reste plus les noms que dans quelques rues vastes et laides, métros aériens, cœurs désuets : Barbès, Blanqui – ces gens qui ont peu agi dans leur siècle, ayant passé en prisons bourgeoises trop de leur vie, sans rien semer plus loin, la liberté s’étant faite science et police. Mes amis étaient une résurrection étrange, d’un naturel que le dépaysement accusait.
L’idée ne nous était pas venue de parler d’Albert Camus à l’occasion du Prix Nobel. Certes, semblable distinction nous réjouit, parce qu’il est toujours agréable de voir un jury d’intellectuels reconnaître le talent là où il existe, saluer une conscience authentique, récompenser un homme qui a su tracer sa voie à lui seul sans jamais proclamer qu’elle fût géniale. Mais la « R.P. » n’avait pas la prétention de confirmer ou de critiquer l’attribution d’une distinction à la fois littéraire et morale. Après les flashes des photographes, après les grandes interviews, après les monceaux de télégrammes de félicitations au lauréat, nous pensons pouvoir un jour serrer la main de Camus avec un peu plus de solennité peut-être, à l’occasion d’une rencontre.
C’est le quatrième dirigeant parisien de l’U.S.T.A. condamné à mort par l’U.G.T.A. (pro-F.L.N. et membre de la C.I.S.L.)
Le secrétaire général adjoint de l’Union syndicale des travailleurs algériens (U.S.T.A.), M. Filali Abdallah, a été victime d’un attentat rue d’Enghien. Atteint de quatre balles dans le dos, le syndicaliste algérien a été transporté dans un hôpital parisien. Son état est critique.
Article paru dans Nouvelle Gauche, n° 21, 11 au 24 février 1957.
En poursuivant pendant 13 jours la grève de la faim pour obtenir le bénéfice du régime politique, les 40 militants du M.N.A. dont nous avons déjà parlé dans ce journal n’ont pas seulement gagné la partie en ce qui les concerne, ils ont aussi suscité un grand mouvement d’unité à la prison de Fresnes, et leur victoire profitera dans l’avenir, à tous ceux, militants algériens et français, qui tomberont sous le coup de l’article 80 (atteinte à la sûreté extérieure de l’état).
Article paru dans La Vérité, n° 442, 25 janvier 1957.
C’est dans le cadre des Journées d’études sur l’Afrique du Nord, organisées par le Mouvement de Libération du peuple (MLP) et qui se sont tenues les 19 et 20 janvier au centre administratif et social d’Asnières, que Robert Barrat a traité d’un sujet brûlant entre tous « les bases de la négociation en Algérie ».
Extraits de la chronique de Jean-Marie Domenach parue dans Esprit, n°312, décembre 1962, p. 1039-1041.
Chaque fois que j’ai rencontré un responsable de la Résistance algérienne, je me suis trouvé en face d’une intransigeance totale, qui allait jusqu’à l’apologie inconditionnelle de la violence. Lorsque, en 1957, je rencontrai Abbane Ramdane, à Tunis, le simplisme brutal de ses propos m’épouvanta ; prenant une brochure sur la table (curieusement, c’était la Revue de défense nationale !), il s’écria : « l’Algérie, c’est très simple, c’est comme ce livre : vous me l’avez pris, rendez-le moi ! », et il m’exprima sa volonté de conduire l’action terroriste jusqu’à la victoire totale. On dira qu’il s’agissait d’un exalté (d’ailleurs généreux d’après ceux qui le connurent).
Extraits d’un article paru dans Afrique Informations, n°47, 15-31 janvier 1957.
Aux premiers jours de l’année, de trois éléments principaux paraissait dépendre la solution du problème algérien :
I. – LA DECLARATION d’INTENTIONS du gouvernement français comportant elle-même ses répercussions sur le prochain débat à l’O.N.U. Il s’agissait alors d’un élément inconnu.
II. – LES PERSPECTIVES ET LES REACTIONS DES REBELLES, et des deux organisations nationalistes, F.L.N. et M.N.A. qui en constituent l’expression politique, compte tenu de la rivalité entre les deux organisations.
Article de Louis Houdeville paru dans Nouvelle Gauche, n° 29, 9-22 juin 1957
Three-Hundred Menfolk Slaughtered by Terrorists. Near La Casbah, Algeria: This pathetic group of women was found in the mountains near La Casbah, eastern Algeria, where they fled when Algerian terrorists descended upon their village and slaughtered every male over the age of 15. A few males, left for dead by the terrorists, later crawled away and were found in the mountains by the French.
Nous sommes de ceux pour qui l’anticolonialisme militant constitue une raison de vivre. Nous sommes de ceux qui n’avons jamais cessé de dénoncer les crimes commis au nom de la raison d’Etat, de la Nation ou des « impératifs » de la présence. Nous sommes de ceux qui n’avons cessé de lutter contre les bourreaux pour que justice et réparation soient rendues aux victimes.
Massacre de Melouza, crime de masse perpétré par le FLN contre les 303 habitants du village de Melouza (Mechta-Kasbah) sous prétexte qu’ils soutenaient le mouvement indépendantiste MNA, rival du FLN, le 28 mai 1957 à Melouza, Algérie. (Photo by Keystone-France\Gamma-Rapho via Getty Images)
Gilles Martinet, Claude Bourdet, René Capitant, Jean Rous, Georges Suffert, Pierre Stibbe, Jean Nantet, André Philip, Pierre-Henri Simon, Jean Daniel et Robert Barrat ont signé le texte suivant :
Le massacre de Melouza a bouleversé l’opinion française et surtout ceux qui, depuis des années, se sont attachés à dire la vérité sur le drame algérien.
Intervention de M.K. au 1er congrès de l’U.S.T.A publiée dans La Voix du travailleur algérien, n°5, juillet 1957
M.K. (Déléguée féminine de Roubaix). – Traite de la condition de la femme algérienne.
« Il faut avouer que certaines personnes ont été étonnées de voir présente à ce Congrès une délégation de femmes algériennes. Cela est normal car cette apparition est sans aucun doute la première qu’ait effectuée la femme algérienne pour sortir de l’ombre où elle a été volontairement plongée. A ceci nous pouvons affirmer comme l’a déclarée une sœur hier, que le colonialisme n’y est pas étranger. Cependant, d’ores et déjà nous pouvons assurer à la classe ouvrière masculine algérienne que, dorénavant, et quelles que soient les circonstances, elle nous trouvera à ses côtés, prêtes à lutter, à mourir afin de faire échec à l’exploitation économique, sociale et culturelle du colonialisme française.
Source : Mahmoud Bouzouzou, « De deux prisons à la liberté », in Gabriel Marcel (dir.), Un changement d’espérance. A la rencontre du réarmement moral, Paris, Plon, 1958, p. 67-78.
Je suis né dans une ville de la côte algérienne, Bougie, qui fut, à une époque de l’histoire, la capitale de tout le Maghreb oriental, c’est-à-dire de toute l’Algérie, et le centre d’un grand rayonnement culturel pour toute l’Afrique du Nord. Ses habitants l’appellent depuis très longtemps « la petite Mecque », à cause du nombre important des saints qui y reposent.
Source: André Breton ,Écrits sur l’art et autres textes, Œuvres complètes, IV, éditions de Marguerite Bonnet publiée, pour ce volume, sous la direction d’Etienne-Alain Hubert avec la collaboration de Philippe Bernier et Marie-Claire Dumas, Paris, Gallimard, 2008.
Questions
I° Mohamed Maroc, dont vous avez sans doute entendu parler, est un intellectuel algérien qui s’est formé lui-même.L’une des raisons essentielles de sa révolte est que, selon lui, le colonialisme est source d’ignorance et d’inculture.Qu’en pensez-vous ?
Le militant infatigable, MOUCI ZAHAR, est né le 10 novembre 1911 à Aït Saad, Commune mixte d’Azazga. Issu d’une famille honorable et profondément attachée aux principes de l’Islam, il apprit très jeune le Coran à la Zaouia Sidi Abderrahmane. Il poursuivit ses études à la mosquée Sidi Lakhdar de Constantine que dirigeait avec dévouement le regretté Cheikh Abdelhamid BENBADIS.
Article paru dans La Dépêche quotidienne d’Algérie, 1er février 1958.
Tribunal militaire d’Alger.
Un membre du M.N.A.
capturé dans la région de Médéa
condamné à mort
Meziane Slimane, 21 ans, cordonnier à Bouïra, membre d’un groupe M.N.A., qui avait été capturé le 27 mai 1957 au cours d’un accrochage dans la commune de Tirghane (Médéa) a été jugé, hier, pour association de malfaiteurs et tentatives d’assassinats.
Article paru dans le quotidien La Dépêche de Constantine, les 24-25 novembre 1957
Abdallah Fillali, secrétaire général adjoint des syndicats algériens USTA, victime d’un attentat FLN le 7 octobre dernier, est décédé cet après-midi à l’hôpital Lariboisière, à Paris.
Il avait reçu quatre projectiles et dut subir cinq interventions chirurgicales.
Article paru dans le quotidien La Dépêche de Constantine, le 10 octobre 1957
Le secrétaire général adjoint de l’Union syndicale des travailleurs algériens (USTA),Filali Abdallah, a été victime d’un attentat rue d’Enghien. Atteint de quatre balles dans le dos, le syndicaliste algérien a été transporté dans un hôpital parisien. Son état est critique.
Article paru dans le quotidien Le Monde, le 5 septembre 1957
Comme les couches de charbon qu’ils arrachent au sous-sol, on rencontre les musulmans de part et d’autre de la frontière.
C’est dans ce paysage au crayon noir, sous ce ciel que strient de toutes parts, dans un hallucinant graphisme, les câbles des treuils, les lignes à haute tension et les filins d’acier, qu’est venu se déverser le trop-plein de la misère méridionale.
The French writer and essay writer Albert CAMUS (1913-1960) in Stockholm, Sweden. He was there for the awarding of the Nobel Litterature Prize by King GUSTAV VI ADOLPH and all the members of the royal family of Sweden : prince BERTIL, Queen LOUISE, princess MARGUARETHA, prince WILHELM and princess DESIREE. (Photo by Keystone-France/Gamma-Keystone via Getty Images)
J’ai choisi de partager dans ce billet deux textes publiés à la suite de l’attribution du Prix Nobel de littérature à Albert Camus. Après un premier billet dans lequel je revenais sur trois documents datés de 1955 à 1958, il m’apparaissait important de revenir sur la célèbre citation par laquelle les commentateurs (souvent hostiles) réduisent la pensée et l’action d’Albert Camus au moment de la révolution algérienne : « Je crois à la justice, mais je défendrai ma mère avant la justice. »
J’ai choisi de partager trois documents rédigés par Albert Camus entre 1955 et 1958. Connus des spécialistes, ils demeurent rarement cités par ceux qui, de part et d’autre de la Méditerranée, instruisent des procès à charge ou à décharge, sans chercher à restituer l’ambiguïté, la complexité ou la tension inhérentes à chaque trajectoire individuelle.
J’ai choisi de partager cette résolution sur la libération de la femme algérienne, adoptée lors du premier congrès de la Fédération de France de l’Union des syndicats de travailleurs algériens (USTA) qui s’est tenu à Paris en juin 1957. Le texte a été publié dans le journal La Commune (n°4, juillet 1957), qui était l’organe du Comité de liaison et d’action pour la démocratie ouvrière (CLADO) au sein duquel se regroupaient les militants français plutôt favorables au Mouvement national algérien (MNA).