Éditorial paru dans Combat, 19 mars 1962, p. 1

A midi, les armes devraient se taire, en Algérie. Trois ministres français ont apposé hier signature, sur des documents officiels de trêve, en caution de celle d’un ministre algérien.
Éditorial paru dans Combat, 19 mars 1962, p. 1
A midi, les armes devraient se taire, en Algérie. Trois ministres français ont apposé hier signature, sur des documents officiels de trêve, en caution de celle d’un ministre algérien.
Article paru dans Combat, 16 mars 1962, p. 2
POUR de nombreux Algérois, l’O.A.S. s’est montrée hier, après le massacre d’El Biar, sous un visage révoltant.
Article d’Albert Camus paru dans Combat, 21 novembre 1946
Ni victimes ni bourreaux
SI l’on admet que l’état de terreur, avoué ou non, où nous vivons depuis dix ans, n’a pas encore cessé, et qu’il fait aujourd’hui la plus grande partie du malaise où se trouvent les esprits et les nations, il faut voir ce qu’on peut opposer à la terreur. Cela pose le problème du socialisme occidental. Car la terreur ne se légitime que si l’on admet le principe : « la fin justifie les moyens ». Et ce principe ne peut s’admettre que si l’efficacité d’une action est posée en but absolu, comme c’est le cas dans les idéologies nihilistes (tout est permis, ce qui compte c’est de réussir), ou dans les philosophies qui font de l’histoire un absolu (Hegel, puis Marx : le but étant la société sans classe, tout est bon qui y conduit).
Article de Maurice Nadeau paru dans Combat, 12 janvier 1950, p. 4
LE futur historien des idées sera sans doute sensible au désarroi de l’intelligentsia révolutionnaire après cette guerre. Le fait que des écrivains et artistes — ralliés plutôt que partisans — quittent aujourd’hui le parti communiste n’en est que l’aspect le plus spectaculaire et le moins important ; plus significatifs sont, par exemple, le duel Rousset-Sartre à propos de l’attitude qu’a prise le premier sur la question des camps de concentration soviétiques, les « révisions » qu’opèrent du marxisme Burnham, Koestler ou Michel Collinet, les congés sourds ou publics que prennent enfin maints anciens révolutionnaires.
Article de Jacques Lemarchand paru dans Combat, 19 décembre 1949, p. 2
NOUS réentendons dans Les Justes — avec joie — le grand ton d’Albert Camus, auteur dramatique. Je yeux dire le ton du Malentendu. J’ai aimé et admiré Caligula, mais mon amitié — et chaque relecture l’a confirmée — allait toujours au Malentendu. Elle ira maintenant aussi, je pense, à ces Justes, parce que si Albert Camus y a retrouvé l’accent si net, si nu, de la première oeuvre dramatique que nous ayons connue de lui, cet accent mêle là à son âpreté une douceur humaine, une tendresse profonde, directe, et parfois bouleversante, pour l’homme lui-même, pour ce bizarre et compliqué mammifère qu’est l’homme. Cela s’entendait déjà, naturellement, dans l’oeuvre de romancier et d’essayiste d’Albert Camus. Dans son théâtre, cela ne m’avait jamais été si sensible que dans Les Justes. L’âpreté, la dureté même, et irréprochable, du dialogue n’en sont en aucune façon diminuées. Même, cette grande amitié pour l’homme — et que je crois très éloignée de la pitié — c’est à la réflexion qu’on en prend vraiment conscience.
Article de Pierre Champromis paru dans Gavroche, n° 15, 7 décembre 1944, p. 2
FAUT-IL présenter au grand public la personnalité d’Albert Camus ? On sait que celui-ci s’est révélé en 1942 par un essai : le Mythe de Sisyphe et un roman, l’Etranger qu’on a généralement salués comme les œuvres les plus marquantes parues depuis le début de la guerre. On sait qu’il a cette année publié deux pièces Le Malentendu et Caligula. Bien qu’il ait la discrétion de ne pas les signer, on sait surtout qu’il est l’auteur de ces éditoriaux de Combat que leur pensée ferme, leur belle langue simple et classique détachent sur le fond un peu terne de la presse quotidienne.
Article de Yacine Kateb paru dans Combat, 21 septembre 1948, p. 4
CONVERSATIONS AFRICAINES
JE traverse la Seine dans un autobus plein de gamins, je me perds dans les rues d’Asnières, et me voici enfin dans un salon sombre comme un temple devant Léopold Sedar Senghor.
Article de Maurice Nadeau paru dans Combat, 31 mars 1949, p. 4
QU’EST-CE que le marxisme ? Une idéologie, une méthode d’explication du monde, une philosophie, une stratégie de la révolution, une religion, ou tout cela à la fois ? En l’impossibilité où l’on est de le définir congrûment pourrait résider une des sources de la « tragédie » (1) où Michel Collinet estime qu’il est tombé et qui fait que des millions d’hommes s’en réclament sans en avoir toujours d’autre représentation que vante mais exclusive. En son nom, sur un sixième du globe, on régente et on blâme, on emprisonne et on commet parfois des assassinats ; ailleurs, des philosophes, historiens, économistes, politiques et artistes l’utilisent à des fins diverses, parfois excellentes, parfois nocives. Malheureusement, pour l’ensemble de ces marxistes « orthodoxes » ou hérétiques, « étroits » ou « ouverts », la lettre a souvent tué l’esprit et la référence au dogme remplacé la recherche vivante.
Article de Roger Worms alias Roger Stéphane paru dans Combat, 25 juillet 1947, p. 2
NOUS n’avons malheureusement pas eu l’occasion de lire une réfutation de Nietzsche par M. Clément Vautel. La critique du colonel Lawrence par M. Edgar Morin, dans « Les Lettres Françaises » du 18 juillet 1947, vient toutefois de nous en donner un avant-goût.
Article de Yacine Kateb paru en quatre parties dans Combat, 4 août 1948, p. 4 ; 17 août 1948, p. 4 ; 18 août 1948, p. 4 ; 24 août 1948, p. 4.
« Peuple français, le moins raciste du monde… »
DES qu’il est question de l’Algérie, on rencontre dans la métropole beaucoup de curiosité et de bonne volonté, mais aussi, il faut le dire, une ignorance inquiétante des problèmes de ce pays. Problèmes qui, à force d’incurie, sont devenus de véritables drames. La presse a-t-elle, ici, rempli son rôle ? A-t-elle informé les Français comme elle le devait, même si elle avait à leur apprendre des échecs ? Le pouvait-elle ?
Article de Maurice Nadeau paru dans Combat, 3 octobre 1946, p. 1 et 3
ARTHUR KOESTLER est arrivé de Londres mardi soir par la « Flèche d’Or ». Ses éditeurs, qui savaient qu’il devait venir à Paris ces jours-ci, furent moins favorisés qu’un petit nombre d’amis qui, prévenus, l’attendaient à la gare. Il a passé, en compagnie de ceux-ci, une nuit probablement agitée, et s’excuse, en me recevant à une heure assez matinale, de n’être pas tout à fait « dans son assiette ». Un beau désordre règne dans la chambre. On dirait que ses vêtements, doués pour un soir d’une vie autonome, l’ont quitté un à un et se sont posés au hasard des sièges.
Article de Maurice Nadeau paru dans Combat, 23 juin 1949, p. 4
PARMI les adversaires en stalinisme il est de bon ton d’affirmer qu’Aragon a du talent. Il est communiste, dit-on, et c’est dommage, mais de ce terrain vague qu’est la littérature on peut bien lui concéder quelque parcelle et reconnaître qu’il y exécute ses tours avec grâce. Et puis, ajoute-t-on, il nous a rendu tant de services ! Au moment où nos énergies défaillantes réclamaient un barde, il s’est présenté, en livrée de troubadour. Quand nous avons failli glisser dans la littérature malsaine, celle des Joyce, des Kafka et des Faulkner, il a courageusement revendiqué le droit d’écrire comme Octave Feuillet, un Octave Feuillet « noir ». Qu’il ait affublé de l’épithète « socialiste » le vieux réalisme exsangue du siècle dernier ne nous effraie pas. Nous avons nous aussi les idées larges et savons pratiquer le « fair play ». Alors, reconnaissons que le poète et romancier communiste Aragon possède un fichu talent !
Article de Maurice Nadeau paru dans Combat, 6 juin 1947, p. 2
LE 5 avril 1944, le « Daily Worker », quotidien communiste des Etats-Unis, apprenait à ses lecteurs qu’un
« soi-disant fonctionnaire de la Commission d’achats soviétique de Washington, Victor Kravchenko, venait de trahir la confiance qu’avait placée en lui le peuple de l’U. R. S. S. »
Article de Maurice Nadeau paru dans Combat, 8 juin 1950, p. 4
COMME tout était simple, pour l’intellectuel d’Occident, il y a vingt ans ! Comme il lui était facile de choisir ! Comme il pouvait aisément se donner bonne conscience ! Quand il avait compris la nature de son rôle : lutter contre l’état de choses existant, pas moins qu’aujourd’hui injuste et fondé sur des valeurs perverties, ne lui suffisait-il pas de regarder vers l’Est pour prendre confiance en lui-même, donner à son espoir et sa révolte une signification qui le dépassait ?
Articles parus dans Combat, 11 juillet 1947, p. 2
LA réputation de Richard Wright a précédé chez nous la traduction de ses œuvres. « Black Boy » (1) et « Native Son », premier ouvrage publié en librairie (2), montrent que cette réputation n’est pas usurpée. Avec Wright, nous nous trouvons, en vérité, devant un des grands écrivains du moment. Dire qu’il est noir et Américain n’est pas plus le définir que de considérer seulement Kafka comme Juif et Tchèque, ou Tolstoï comme noble et Russe. Par quelque endroit, le génie transgressé les catégories raciales, sociales et nationales au sein desquelles il est né et a prospéré. De moins grands que Wright, le pittoresque Claude Mc Kay ou l’émouvant Langston Hugues laissent clairement voir leurs caractères ethniques. Ils se définissent d’abord par eux. Quand nous lisons « Native Son », nous oublions la nationalité de l’auteur et la couleur de sa peau.
Propos recueillis à Mexico par Victor Alba et parus dans Combat, 16 novembre 1947, p. 1 et 3
ON sent, devant le visage presque immobile de Victor Serge, et surtout en l’écoutant parler, qu’on se trouve en face d’un homme de comité, de cercle, et que nulle question ne le prend au dépourvu, qu’il a tout pesé et réfléchi.
Article de Maurice Nadeau paru dans Combat, 11 mai 1946, p. 1
SUR les quais de la gare Saint-Lazare. Le train spécial ayant embarqué au Havre les passagers du « Brazil » a du retard. Le soleil matinal n’arrive pas à percer les hautes verrières enfumées ; un petit vent frais souffle en courant d’air.
Article de Maurice Nadeau paru dans Combat, 22 novembre 1946, p. 2
DEPUIS qu’est paru en français « Le Zéro et l’Infini », Arthur Koestler suscite à la fois l’injure et le dithyrambe. Certains le tiennent pour l’une des nombreuses têtes de l’hydre trotskyste et tournée de préférence vers l’« Intelligence Service », d’autres se réjouissent de penser qu’est enfin née et mise au point la machine de guerre contre l’U.R.S.S., le parti communiste et le mouvement révolutionnaire en général. Koestler lui-même s’aperçoit qu’il s’est placé sur une pente « cirée par les larges derrières des idéalistes passés au cynisme », qu’il est difficile de s’y cramponner et que « on y est bien seul ». Approuvé parfois par ceux qu’il méprise, méprisé d’autres fois par ceux dont il a été le compagnon de lutte, il se tient, en effet, dans une position qui manque de confort.
Article de Jean Vita paru dans Le Libertaire, n° 251, 12 janvier 1951, p. 2
POUR la noblesse de son style et de sa pensée qui contrastent tellement avec la manière constipée de Gide, Albert Camus a rapidement acquis sur la jeunesse de ce temps une influence virile et virilisante, qui relaie heureusement celle du tortueux Ménalque.
Article paru dans Le Libertaire, n° 6, juin 1945, p. 3
Le parti communiste, utilisant, les événements pour ses fins propres, présente la crise algérienne comme l’explosion de la dernière bombe hitlérienne. C’est se prononcer sur des faits mal connus et simplifier une énorme question. « Le Monde », plus sérieux, examine « l’affaiblissement de l’armature française » (luttes politiques en Afrique du Nord depuis 1942, secteurs anti-britanniques, antigaullistes, antisémites), la poussée nationaliste arabe, la participation des Nord-Africains à la guerre et leur élimination de la vie politique, et enfin la cause immédiate du conflit, une terrible crise économique. Les événements de Sétif sont, en effet, la manifestation aiguë d’un malaise latent entre la France et l’Afrique du Nord. Ils sont aussi un des épisodes sanglants des luttes chroniques entre la France et chacune de ses colonies depuis plus d’un siècle. Il convient donc de les replacer dans l’ensemble de l’histoire coloniale française pour en comprendre le sens et la portée.
Article de Paul Bénichou paru dans Masses, n° 2, février 1939, p. 93-94
A relever dans le numéro de novembre de cette revue d’extrême-droite, dont les prétentions à la largeur de vues dissimulent mal le rabâchage des mythes réactionnaires les plus éculés, un article de Th. Maulnier, sur les résultats de la crise internationale de Septembre. L’auteur, ancien collaborateur de l’Insurgé, et qui continue de s’insurger avec la plus grande véhémence contre la possibilité de la révolution européenne, explique avec une louable franchise les raisons de la répugnance des partis de droite à faire la guerre à Allemagne :
Article paru dans Perspectives anarchistes-communistes, n° 1, février 1967
Pour ce premier texte, nous choisissons l’ALGERIE parce qu’elle est proche de nous, et pas seulement dans le temps et dans l’espace, mais nous connaissons mieux les problèmes de nos camarades algériens qui viennent de publier un texte dont le préambule est :
« Nous souhaitons qu’il soit pour tous les révolutionnaires, une contribution qui nous aidera à la clarification nécessaire aux luttes en cours. »
Article paru dans Combat, 10 octobre 1957.
C’est le quatrième dirigeant parisien de l’U.S.T.A. condamné à mort par l’U.G.T.A. (pro-F.L.N. et membre de la C.I.S.L.)
Le secrétaire général adjoint de l’Union syndicale des travailleurs algériens (U.S.T.A.), M. Filali Abdallah, a été victime d’un attentat rue d’Enghien. Atteint de quatre balles dans le dos, le syndicaliste algérien a été transporté dans un hôpital parisien. Son état est critique.
Article publié dans Le Monde, le 29 juin 1968
M. Maurice Clavel écrit dans Combat sous le titre « Asile » ;
« Mon général, j’ai suivi le procès Pétain. Je fus le moins âpre des journalistes issus de la Résistance. Le seul crime qui m’apparut inexpiable, sur lequel la défense faiblit et se déroba, le seul qui emporta, selon moi, la condamnation capitale de principe, ce fut d’avoir livré à l’ennemi les étrangers antifascistes, Allemands, Espagnols, Italiens, qui avaient asile en France.
Article de Jean Rous paru dans Combat, le 21 juin 1974
Messali Hadj est mort. Depuis 1936 période où je l’ai connu en luttant à ses côté pour la défense de « l’Etoile nord-africaine », il était à mes yeux non seulement le pionnier de l’émancipation algérienne mais un vieil ami rencontré le plus souvent dans ses résidences forcées et ses lieux d’exil plutôt qu’en liberté. Je ne l’avais pas revu depuis un certain temps, j’ignorais la gravité de sa maladie et j’ai donc été vivement touché en rentrant à Paris le mardi soir 4 juin d’apprendre sa mort. J’ai pensé aussitôt à sa longue vie de lutte et à l’Algérie révolutionnaire dont il avait inlassablement depuis 1925 éveillé la conscience nationale et le vouloir vivre. Le lendemain le premier journal que j’ouvris fut « El Moudjahid » le porte parole de l’Algérie nouvelle. Il disait simplement : « Messali Hadj cofondateur de l’Etoile nord-africaine, président du PPA et du MTLD n’est plus ». Dans son laconisme cette dépêche contenait en raccourci toute une leçon d’histoire. Ainsi au-delà des règlements e comptes fratricides que la bonne volonté fut impuissante à empêcher, l’inéluctable et souveraine mort accomplissait son œuvre réconciliatrice. Messali entrait officiellement dans l’histoire comme le père du nationalisme algérien. Peu de temps après on devait apprendre qu’informé de sa maladie, le président du Conseil de la révolution algérienne, Houari Boumédienne avait autorisé son transfert à Tlemcen pour qu’il puisse mourir dans sa patrie. Désormais Messali repose à côté de son père dans cette terre qui fut le berceau du nationalisme algérien et même nord-africain.
Article paru dans La Voix du travailleur algérien, avril 1958.
Le jeudi 20 mars 1958, notre camarade Bédioune Amar, marié et père de deux enfants, secrétaire de la section USTA de Sedan (Ardennes), a été lâchement assassiné par le FLN-UGTA.