Éditorial de Maxime Rodinson paru dans le Bulletin du Groupe de recherche et d’action pour le règlement du problème palestinien, n° 1, 1968, p. 1-4

Nous l’avons dit souvent depuis bientôt un an, mais de l’avoir beaucoup répété, ce n’en est pas devenu plus faux, le G.R.A.P.P. est né d’un sursaut. En mai et juin dernier, ceux qui l’ont créé et ceux qui ont répondu aussitôt à son appel étaient d’opinions divergentes sur bien des points. Sans même parler des opinions qui visaient des problèmes sortant du cadre israélo-arabe, ils avaient bien des idées différentes sur la distribution exacte des responsabilités dans le conflit et dans sa perpétuation, sur les solutions souhaitables et sur les moyens de s’en rapprocher. Mais quelque chose les unissait, ils avaient été tous indignés de l’aveuglante partialité de la presse et de la radio européennes dans leurs principaux organes, de leur façon de ramener le conflit en cours à une lutte d’archanges sans tache et sans reproche contre des démons grimaçants, hideux et pervers. Plus que tout peut-être était choquante la conviction enracinée profondément selon toute apparence chez journalistes, speakers, correspondants de presse, simples lecteurs écrivant à leur quotidien habituel qu’aucun doute n’était permis ni même concevable, que le problème était simple et clair, une attaque gratuite d’un peuple désarmé par des hordes haineuses que guidaient des tyrans fanfarons, féroces et stupides.