Article paru dans Travailleurs immigrés en lutte. Mensuel ouvrier révolutionnaire, n° 19, mars 1978, p. 12-13.
Voilà quelques années que le pouvoir a promulgué la « gratuité des soins ». Il prétendait de cette façon résoudre les carences du système de santé. La « gratuité des soins » était (elle l’est encore) présentée comme une preuve de la nature socialiste du régime.
Indépendamment de la démagogie du pouvoir, la situation de la santé en Algérie est catastrophique. Les équipements sanitaires sont très insuffisants. On a, par exemple, 23 lits d’hôpital pour 10 000 habitants. La répartition des hôpitaux est très inégalitaire : plus de la moitié des hôpitaux est concentrée dans les trois grands centres urbains que sont Alger, Oran et Constantine. Le personnel médical est peu nombreux et sous-qualifié.
Pour un malade, se faire soigner est une véritable expédition. Cela commence par la queue à l’hôpital ou au dispensaire, des heures à attendre son tour, et cela sans être sûr de pouvoir toucher le médecin. Quand il y arrive, le malade en question est ausculté à la va-vite, et il se voit expédié avec une ordonnance. Et c’est à nouveau les queues, les médicaments introuvables, etc..
Si l’on est obligé d’être hospitalisé, on découvre un monde cauchemardesque. Les hôpitaux sont surchargés, les conditions déplorables. La nourriture est infecte.
Le matériel des soins les plus élémentaires fait défaut (pénurie de stéthoscopes ! ) ; ne parlons pas de la négligence et du mépris des médecins. En un mot, guérir tient bien des fois du miracle.
Cela n’est qu’une très brève évocation des problèmes auxquels se heurtent les travailleurs ou tout individu faisant partie des catégories les plus démunies : paysans pauvres, … qui doivent avoir recours à la médecine en Algérie. Car effectivement ce sont eux les plus touchés, d’abord parce que ce sont les plus susceptibles de tomber malades du fait de leurs conditions de vie ( insalubrité et manque de logement, malnutrition, …) et de travail (accidents, maladies professionnelles, …) ; ensuite parce qu’ils sont mal soignés.
Il est évident que les bourgeois n’ont pas de problèmes de soins. Ils bénéficient d’un traitement de faveur à cause de leur possibilité de piston, etc… Ils peuvent par ailleurs payer pour être bien soignés (la médecine payante subsiste).
Et dans certains cas, ils vont même se soigner à l’étranger. Tout le monde sait que les hauts bureaucrates se font régulièrement soigner en Suisse, en France et ailleurs… Ce sont ainsi principalement les masses laborieuses qui subissent le problème de la santé en Algérie.
A un autre niveau, il est important de ne se faire aucune illusion sur la notion de gratuité des soins. Le fait de ne pas avoir à payer directement pour être soigné, si ça ne veut pas dire que l’on va être bien soigné, cela ne veut pas dire non plus que l’on ne va pas payer d’une autre manière.
Car c’est sur les travailleurs que repose le financement des hôpitaux,
etc… et de toute l’infrastructure médicale sociale. Et c’est avec une partie des salaires (salaire différé) prélevée par les capitalistes, par l’État, que les travailleurs payent (entre autres) la gratuité des soins.
On voit donc que la prétendue gratuité des soins qu’a instituée le régime est un leurre. Plus, cela nous montre quelle importance il accorde à la santé des travailleurs. Il nous considère comme des marchandises nombreuses et peu coûteuses : en effet, les capitalistes savent qu’un travailleur épuisé, malade, voire même mort, peut facilement être remplacé ; alors ils se moquent éperdument de ce qui peut nous arriver.
De toute façon, il est dans la logique du système capitaliste de nous miner la santé, et c’est ce que font nos bureaucrates en bons capitalistes qu’ils sont. C’est aussi dans la logique du système de ne pas ou de mal nous soigner, parce que n’est pas rentable. Comprendre cela est vital pour les travailleurs. A la base, résoudre les problèmes de la santé passera obligatoirement par la destruction du système qui les créé et les entretient.
Les travailleurs sont malades de l’esclavage salarié !