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Anti-racisme

Articles parus dans Informations rassemblées à Lyon, n° 29, été 1979, p. 10-11

Aujourd’hui les expulsions, demain les déportations

La grève entamée il y a deux mois et demi par les 50 femmes de ménages immigrées de l’INSA pour obtenir des meilleures conditions de travail « transport, salaires décents, travail toute l’année ou chômage technique etc » se poursuit actuellement, au rythme de deux heures par jour, dans l’indifférence quasi-générale. L’enjeu de cette grève est particulièrement important. En effet, elle a lieu au moment où les lois Stoleru et Bonnet adoptées dernièrement par l’assemblée nationale, les pratiques policières racistes « rafles, tabassages, et contrôles » et les mesures d’expulsion qui se généralisent, ainsi que les prises de position nationalistes de certains partis ou syndicats, marquent l’offensive délibérée du pouvoir à l’encontre des immigrées, la recrudescence des idéologies racistes et l’instauration de l’arbitraire en matière sociale. C’est pourquoi des luttes comme celle de l’INSA, dans l’immédiat et à plus long terme, resterons révélatrices et à plus d’un titre. C’est un combat qui avec d’autres, permettra, notamment à l’Etat, d’apprécier le degré de mobilisation et de résistance du mouvement anti-raciste et donc déterminera d’une certaine façon, l’application des mesures répressives prises par rapport à l’immigration.

En ce qui me concerne, j’ai commencé à m’intéresser de près aux problèmes des femmes de ménages de l’INSA en participant à la grève de la faim entreprise par une vingtaine de personnes devant les locaux de l’administration de l’INSA le dimanche 13 mai. En quelques jours, j’ai pu me rendre, de manière générale, de la médiocrité de la magouille des syndicats ainsi que la démobilisation des étudiants. Pendant toute la durée de la grève de la faim, les négociations inter-syndicales-étudiants-administration se sont poursuivies chaque jours. L’objectif premier constitué par les revendications des femmes de ménage s’est rapidement vu relégué en seconde position au profit de la levée des inculpations de 5 étudiants accusés de séquestration (incident avec Hamelin, directeur de l’INSA). Les délégations syndicales ont assez vite accepté le chantage d’Hamelin, parlant « d’une grande victoire » : l’administration s’engageait à retirer les plaintes concernant les 5 étudiants si, d’une part ; le campement des grévistes de la faim et de ceux qui les soutenaient disparaissaient, et, d’autre part les étudiants en grève depuis les inculpations, reprenait les cours. La collaboration des organisations syndicales avec le pouvoir s’est ainsi une fois de plus confirmée. L’acceptation des conditions d’Hamelin par les dites organisations dans l’euphorie d’un réformisme béat, malgré la vive opposition et les mises en garde d’une partie des grévistes regroupés autour du campement, a conduit :

– à la démobilisation des étudiants de l’INSA, à leur reprise des cours le jeudi matin avec la promesse de leur part de reconduire la grève. Le mardi matin suivant (ce qui n’a évidemment pas eu lieu car l’INSA est en période d’examen yehh).

– à la disparition du soutien constitué par les grévistes de la faim dont la forme de lutte était jugée dangereuse et irresponsable, sortant de la routine (de plus il y avait le spectre largement mis en évidence d’une intervention policière dans la nuit). Cependant, les grévistes de la faim, étaient d’accord pour la poursuite de la grève.

– par conséquent, à l’échec des revendications des femmes de ménage, qui, lors d’une AG s’étaient prononcées pour le maintien de la grève estudiantine.

Ce que je pense sur un plan plus global, et qui n’est pas nouveau, c’est que les instances syndicales actuelles en place sont totalement inaptes à la résolution des conflits sociaux hors du cadre institutionnel étatique et que le mouvement estudiantin – s’il existe – est incapable, dans sa majorité, d’une solidarité effective envers les luttes extérieures à son milieu.

– malgré leur isolement les femmes immigrées continuent actuellement une grève de deux heures par jour, le matin soutenu à la fois par le syndicat CFDT qui seul montre une certaine honnêteté, malgré son hostilité vis à vis du comité de soutien des femmes de ménage. Il est extrêmement important qu’une mobilisation effective qui, si elle ne peut pas se réaliser avec les étudiants de l’INSA se fera à partir d’éléments extérieurs à l’INSA, se développe le plus rapidement possible car il reste une dizaine de jours avant les vacances, période idéale pour les expulsions (elles sont dans une période de renouvellement de leur carte de séjour). Il faut noter que le peu de garanties et de promesses obtenues depuis le début de l’année ne tiennent absolument pas compte de ce risque.

Il est possible de contacter le comité de soutien des femmes de ménage par l’intermédiaire du comité anti-expulsions qui se réunit tous les mercredis soirs, à partir de 21 H, à la MAJO impasse Metrai à Villeurbanne. Les annonces des réunions lieux, dates et heures seront ainsi faites à la Librairie La Gryffe 5 rue Sébastien du même nom à Lyon : on peut également exercer un soutien efficace en étant présents au piquet de grève, les matins du lundi au vendredi 6H 8H : rendez-vous entrée administration.

Yves


Très important les anti-racistes ont rendez-vous à Lyon les :

– vendredi 22 juin à Vaise (salle des fêtes) avec J.M Le Bihan poil aux dents – langage robot – stop.

– samedi 23 juin à 18H à Bellecour (rassemblement re poil aux dents – puis cortège de manif) et à 20H30 à la mairie du 6ème …


L’Afrique du Sud est un pays raciste

Le 6 juin Marchais donne une surboum au Palais des Sports à Gerland. Le matin, à l’INSA, comme tous les matins, les femmes de ménage immigrées font piquet de grève (vous êtes tous invités). La CFDT leur explique qu’il faut aller à Gerland, pour ramasser des sous : ces gens-là sont avec nous, ils sont gentils, ils donneront des sous. Je me permis quand même de contredire le permanent CFDT en rappelant que le PC n’est pas si gentil que ça, qu’il y a des racistes au PC, que le PC ne fait rien contre le racisme et les expulsions, ni pour l’égalité des droits entre français et immigrés.

J’aurais pu m’éviter cette peine, le PC se chargeant de la démonstration.

Certaines, déjà sceptiques, ne vont pas à Gerland. Les autres se pointent avec leurs banderoles. D’abord le PC n’aime pas les gens en groupe. Ensuite, il n’aime pas les gens qui ne veulent pas prendre leur carte, surtout quand ce sont des immigrées et des femmes de surcroît. Allons donc c’est la moindre des choses quand on va voir Marchais, de prendre sa carte ! Ces arabes ni connaissent pas la politesse !

Donc elles voulaient entrer, elles voulaient collecter des sous, et elles ne voulaient pas leur carte. Ca n’a pas cogné, mais presque. Un ouvrier de Manufrance, venu de Saint-Etienne, a entamé le dialogue : « retourne dans ton pays ».

Elles n’ont pas vu Marchais, mais ce qui est sûr, c’est que Marchais n’a pas dit « retourne dans ton pays ». Marchais sait avoir du tact.

Le lendemain, la CFDT se contenta de dire : c’est parce que on est pas de la CGT. Ca manque un peu de profondeur. Le permanent m’a expliqué, la CFDT ne veut pas parler du racisme, c’est trop difficile, les ouvriers et ouvrières français sont trop racistes ; la CFDT préfère parler de la précarité de l’emploi (des racistes), de l’intérim, du chômage (des racistes).

Je reproche à la CFDT de prendre les gens pour des cons. Au PC je ne reproche rien. Demain il n’y aura peut-être plus de chômage, d’intérim,
pour les français et françaises et assimilés. Les immigrés actuels seront tous retournés chez eux, on en importera d’autres, pour trois mois, six mois, de pays où on aura pas encore appris à ouvrir sa gueule. Mais ils resteront, invisibles, comme ça on ne sera plus racistes.

Les babas seront cools, les ouvriers qualifiés et les ingénieurs de gauche. Nous gueulerons tous contre l’Afrique du sud, pays raciste comme chacun sait.

L’anarcho-stalinien

2 réponses sur « Anti-racisme »

Donc il fallait plutôt dénoncer le racisme en Afrique du Sud !!! 😂😂

Comme quoi, il a toujours été plus facile pour certains de prendre position sur des problématiques lointaines, sur lesquelles ils n’ont pas prise.

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