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Guy Martin : L’enfer colonial. Les futurs maîtres

Article de Guy Martin paru dans Le Libertaire, n° 278, 3 août 1951


EXTRAIT d’un article intitulé « La Patrie », paru dans l’organe nationaliste « La République Algérienne » du 1er juin 1951 :

« …Soyons très fiers d’être Algériens musulmans, rendons à notre pays le tribut d’admiration que les étrangers eux-mêmes ne lui refusent pas. Soyons fiers de notre origine ; nul peuple ne descend d’une race plus vaillante et plus généreuse… Algérien… quand, dans un très proche avenir, ton pays sera débarrassé entièrement de l’odieux joug colonial qui l’opprime, jeune soldat, tu t’exerceras dans le métier militaire, tu défendras le drapeau, tu te feras craindre et respecter… tu entoureras d’un culte reconnaissant la mémoire des martyrs de la liberté, tu obéiras aux lois, tu payeras l’impôt sans murmurer, tu honoreras les magistrats, tu voteras avec réflexion et conscience… » (1).

Une telle charte rend bien difficile l’intégration des nationalistes dans les rangs révolutionnaires, cette prose prometteuse ressemble étrangement à ce qu’un quelconque Déroulède aurait pu écrire dans le manuel du parfait patriote. L’étonnant n’est pas que de pareilles élucubrations aient été pensées par un jeune bourgeois aux dents longues et aux idées courtes, alors que par méthode expérimentale nous savons ce que cache d’exploitations, d’intérêts sordides, et de bêtise tyrannique, l’expression bon citoyen, l’étonnant est qu’un tel article de foi paraisse dans l’organe imprimé d’un parti qui se dit progressiste.

Mais à la réflexion, l’étonnement naïf s’estompe car n’est-ce pas sur la culture du bon citoyen que sont basés étatisme et capitalisme, ces deux mamelles de l’exploitation éternelle. Le triste de cette histoire, c’est qu’avant même que l’analphabétisme soit vaincu, la presse décervelante a mis en place ses batteries et c’est là, la première pâture intellectuelle qui s’offre au révolté.

Les anarchistes ont une belle oeuvre de débourrage de crâne à accomplir en Algérie, il y a des idoles qu’il faut déboulonner avant qu’elles ne soient hissées sur leurs socles : la bigoterie, le chauvinisme, le conformisme et le militarisme impérialiste.

Guy MARTIN.
(M.L.N.A.)


(1) C’est nous qui soulignons.

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