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Lettre d’Algérie : Le Parti de Messali Hadj. Parti de l’Indépendance Algérienne

Article signé Etargin paru dans La Vérité, n° 120, 28 avril 1946, p. 3

Dans notre dernier numéro, dans l’article « Stratégie, tactique ou … trahison », notre camarade Lévan a bien décrit la position de notre parti vis-à-vis du problème algérien.

Des camarades nationalistes algériens nous ont communiqué une lettre dont nous publions ci-dessous les principaux passages. Nous donnerons la prochaine fois une étude détaillée sur la structure, l’organisation et le programme politique du parti du peuple algérien.


… Le peuple algérien, qu’un colonialisme abject a écrasé pendant des dizaines d’années, a fait, au cours de cette dernière décade, d’immenses progrès. Il est né non seulement à la vie politique, mais aussi et surtout à l’action révolutionnaire.

Evolué et voulant tout naturellement se mêler à la vie politique de son pays, le peuple algérien s’est vu persécuté avec le mépris des hommes qui ont foi dans la force brutale.

Des martyrs surgirent et autour d’eux se cristallisèrent toutes les forces vives d’un peuple traditionnellement attaché à la liberté.

D’abord, le corps de ce qu’on appelle les Oulemas s’est consacré pendant des années au travail social. Le maraboutisme, cet instrument servile de l’impérialisme, fut battu en brèche. Le peuple, revenu à sa véritable religion musulmane, brisa toutes les idoles des confréries qu’entretenait une administration rétrograde. Il réapprit sa langue et fit bâtir lui-même ses propres écoles, ses medersas …

Dans le domaine politique, le peuple algérien, se fiant à son seul bon sens, a remporté une victoire éclatante. D’ingénieuses et savantes combinaisons lui ont été proposées afin de le détourner de sa voie naturelle. Ces théories machiavéliques furent exposées et défendues par des Algériens, valets de l’impérialisme. Il s’agit, en l’occurrence, de cette assimilation chère à Viollette et à la Fédération des élus représentée par le triste Bendjelloul.

Des ouvriers, de simples ouvriers algériens, défiant toutes les méthodes du colonialisme, se sont levés pour dire « non » à l’assimilation.

C’est ainsi qu’est né le Parti du Peuple algérien. Mais ne revenons pas sur l’histoire de ce grand parti politique qui, aujourd’hui, groupe derrière lui la grosse majorité du peuple algérien. Disons tout simplement que ses chefs sont de grands démocrates qui ont fait leurs preuves et qui, condamnés et déportés par Daladier et Vichy, sont encore détenus par la IVe République.

Que voulaient-ils, en fait ? Le suffrage universel en Algérie, pour élire une Constituante qui décide du sort de leur pays.

Et qui peut donc leur reprocher cela ?…

Si, en France, on se révolte devant les massacres d’Oradour, tout Algérien vous dira, quand il a confiance en vous : « Mais chez nous, il y a eu les massacres d’El Ouffia, de Guelma et les fours crématoires d’Héliopolis et de Kherrata. »


Le P.P.A. n’a jamais fusionné avec les amis du Manifeste comme on a cherché à le faire croire pour le discréditer. Il est vrai que quelques Algériens, subjugués par le style ronflant d’Abbas, ont cru à l’étoile naissante de ce dernier ; mais il ne s’agissait que de certains romantiques et d’une clique de caïds éblouis par la grandiloquence de Ferhat. Mais le peuple algérien, lui, ne s’est pas trompé et ne se trompera pas. Il n’a pas oublié que Ferhat avait nié, quelque temps auparavant, toute personnalité au peuple algérien. Il déclarait, ce bâtard, que la France c’était lui, comme son acolyte Bendjelloul, cet autre adepte de Viollette. Il voulait, lui aussi, sans consulter le peuple algérien, venir faire de beaux discours au Palais-Bourbon. Et d’ailleurs, nos compatriotes en France auront bientôt le déplaisir de voir ce comédien jouer le révolutionnaire au Quartier Latin comme … député, évidemment.

Il est vrai que, dans son manifeste de 1943, il avait osé, et sûrement par caprice, lui, le caméléon, demander une Assemblée constituante algérienne élue par le peuple.

Quelques mois de prison l’en ont guéri et son manifeste partait en fumée …

D’ores et déjà, le peuple algérien l’a vomi, mais il aura cependant joué un petit rôle – assez triste d’ailleurs – dont il rendra compte devant l’histoire de l’Algérie. Car son romantisme de « jeune Algérien » nous a valu tout de même et l’enterrement du congrès d’Alger et les sanglants événements de 1945.

Dans cet article, nous tenons surtout à souligner l’évolution certaine du peuple algérien, son émancipation, son esprit révolutionnaire, sa volonté inébranlable de diriger les destinées de son pays, réalités avec lesquelles les impérialistes français devront absolument compter, car le peuple algérien a aussi pour allié puissant le peuple français avec lequel il compte se trouver coude à coude pour abattre l’ennemi commun : le capitalisme international.

ETARGIN.