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Pour que cessent les assassinats entre Algériens : un appel de Messali Hadj

Appel de Messali Hadj paru dans La Révolution prolétarienne, n° 140, juillet-août 1959, p. 20.

Les premiers coups de feu ont été tirés à Paris il y aura bientôt trois ans. Depuis, ils se sont multipliés et ont fait des victimes tant parmi les Nord-Africains que dans la population française.

Ainsi, tous les matins, nous apprenons dans la presse, que des actes de terrorisme et des règlements de compte ont été commis dans Paris et dans toute la France. Les nationalistes algériens ne sont pas les seuls victimes de ces luttes fratricides. Des balles atteignent d’inoffensifs passants, parfois des femmes et des enfants. De plus en plus l’opinion publique française est très fâcheusement impressionnée.

Pour ma part, j’ai toujours condamné l’assassinat comme méthode pour le triomphe des idées et des doctrines. Le 1er septembre 1957, j’ai adressé un appel à mes compatriotes alors que j’étais en exil à Belle-Isle-en-Mer. Le 1er janvier 1959, j’ai renouvelé cet appel. Après mon retour dans la région parisienne je n’ai cessé d’exhorter tous les Algériens, sans distinction d’appartenance politique, à cesser les luttes fratricides profondément néfastes au succès de la cause algérienne. Durant ces quatre derniers mois, un certain apaisement s’était produit. Mais depuis quelques jours les attentats sont en recrudescence et ont fait de nombreuses victimes algériennes et françaises.

Nous désirons absolument que cette situation cesse et nous appelons les démocrates français à nous aider à mettre fin à ce fléau qui salit la révolution algérienne et risque de compromettre pour le présent et l’avenir les rapports d’amitié entre le peuple français et le peuple algérien.

Récemment l’un de nos compatriotes Me Ould Aoudia, a été assassiné en plein Paris. Nous condamnons, de la façon la plus énergique, ce crime qui a justement soulevé l’indignation des milieux démocratiques. C’est un réconfort, dans ce malheur que plusieurs centaines de personnes, Français et Algériens réunis, aient tenu à manifester leur sympathie au défenseur et à sa famille en assistant à ses obsèques.

Mais si odieux que soit ce crime, par les conditions dans lesquelles il a été commis, par la qualité d’avocat de la victime, il ne faut pas oublier toutes les victimes de tant d’autres attentats et les milliers de femmes et d’enfants jetés soudain dans la misère et le malheur.

Nous devons tout tenter pour mettre fin aux luttes sanglantes qui déchirent les Algériens entre eux et éloignent d’une cause profondément juste un grand nombre de travailleurs et de démocrates français.

C’est pourquoi je me permets, au nom de l’idéal de liberté et de fraternité humaine, de suggérer une Initiative qui serait susceptible, à mon sens, d’avoir les plus heureuses conséquences en Algérie et en France.

Si les démocrates français, qui ont toujours manifesté leur sympathie au peuple algérien, quelles que soient leurs nuances de pensée, si les défenseurs des détenus algériens, quel que soit le parti de ces détenus. se réunissaient pour lancer un appel commun à tous les nationalistes algériens afin que cessent au plus tôt ces attentats. je suis persuadé qu’un tel appel ne demeurerait pas sans effet, qu’il sauverait de nombreuses victimes éventuelles, y compris celles du contre-terrorisme qui serait obligé de reculer. L’une des conséquences les plus favorables de la situation ainsi créée serait de rapprocher la masse des travailleurs français et algériens.

Pour ma part, je me mets immédiatement à la disposition des bonnes volontés, d’où qu’elles viennent, car l’essentiel est que le sang cesse de couler et que les balles perdues ne fauchent plus dans la rue de malheureux passants.

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