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Habib : Les élections municipales ou le « programme commun » contre les immigrés

Article d’Habib paru dans Informations et réflexions libertaires, n° 50, avril-mai 1983, p. 5


La foire électorale qu’à vécue la France depuis quelques semaines a été un sujet de polémiques et de discussions diverses alimentées par des dizaines de sondages sur les chances de telle ou telle liste de remporter les municipales. Dans une telle ambiance, on serait tenté de penser qu’effectivement les programmes diffèrent d’un parti à l’autre et qu’il y aurait sûrement des gagnants parmi eux.

En effet, on ne se serait pas beaucoup trompé. Il se serait agi seulement d’une nuance au niveau des termes employés. Il y avait bien deux camps ; ceux qui cherchaient le pouvoir et ceux qui cherchaient et cherchent depuis toujours à vivre et vivre libres. Il y avait aussi un « programme commun » entre la gauche et la droite contre les boucs émissaires de la crise : les Immigrés.

Sans entrer dans une polémique stérile sur le vote en général, il serait intéressant de rappeler certains événements anti-immigrés qui ne s’expliquent que par un racisme honteux :

– toutes les lois décrétées lors du septennat de Giscard, et avant, qui limitent la liberté et les droits des étrangers.

– la campagne du P.C.F. à Vitry lors des présidentielles en Mai 1981.

– la nouvelle version socialiste (quelle honte) de la loi « sécurité et liberté ».

– le fichier « anti-terroriste ».

– les bavures et les déclarations qui entrent dans le cadre de la dernière campagne électorale.

Depuis quelques années les mots immigration et insécurité ont été déclarés synonymes. Ceci n’est pas étonnant surtout quand on sait que tous les Dieux du mal sont unis pour faire des voleurs, des violeurs, des assassins et j’en passe…

A Marseille, par exemple, plus on s’approchait du 2ème tour, plus se dévoilait le contenu du « Programme commun » : on pouvait lire sur les murs de la ville :

« A Marseille, la sécurité c’est Defferre »
« Pour votre sécurité votez R.P.R. »

Un très beau jeu de mots : Defferre serait-il R.P.R. ? d’après les déclarations de son ami, AUTAIN, secrétaire d’état à l’immigration, il serait pire ; n’a-t-il pas déclaré avec satisfaction qu’en 1982 le ministre de l’Intérieur « a procédé à 45.000 refoulements » avant d’ajouter non sans fierté « chiffres sans précédents » (1). Ceci veut dire aussi que d’ici aux prochaines municipales de 1988 il pourra procéder à 225.000 refoulements.

Pour mémoire, il faut enregistrer le geste méprisable du même Defferre et sa suite qui par peur d’être taxés « Pro-immigrés » ont empêché des Algériennes qui voulaient serrer la main du candidat socialiste de le faire (2).

Si le problème restait au niveau des bavures habituelles, on pourrait peut-être ne pas faire attention, du moins faire semblant. Mais il s’agit là d’un programme apparemment bien étudié, et c’est d’autant plus grave et inquiétant qu’il devient le cheval de bataille de toutes les institutions politiques y compris celles du pouvoir central.

Les listes communes F.N. et RPR dans certaines municipalités de Province et les contacts entre les socialistes et la liste « Marseille sécurité » sont les preuves irréfutables de cette alliance contre les immigrés. Quant aux résultats ils risquent d’être lourds et graves ; les multiplications des refoulements, des ghettos, de xénophobie et de violence verbale et physique en seront les aspects les plus apparents.

Ceci me paraît d’autant plus évident que le programme a été parrainé et lancé par le premier ministre : n’a-t-il pas déclaré il y a quelques semaines que les ouvriers du secteur de l’automobile, qui étaient en grève, étaient manipulés par des forces religieuses et politiques étrangères ? à noter que malgré les protestations il n’est pas revenu sur sa déclaration, il a même concrétisé son idée par le coup des flics contre Ben Bella (pour qui je n’ai par ailleurs aucune sympathie).

Pendant ce temps-là, 100.000 familles immigrées sont toujours en quête d’un logement décent (3) pour ne citer que cet exemple parmi tant d’autres.

Attention, la « Délinquance bronzée » peut faire sauter un « Programme commun ».

HABIB

(1) et (2) Libération 11 Mars 1983.

(3) le Monde du 14 Mars 1983.

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