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Ameziane Rafik : Algérie. A la recherche de l’homme providentiel

Article d’Ameziane Rafik paru dans Inprecor, n° 82-83, 31 juillet 1980, p. 21-24

« Le Président Chadli Bendjedid à la clôture des travaux du Congrès extraordinaire du Parti : Clarté et continuité révolutionnaire » (photo publiée dans El Djeich, n° 206, juillet 1980, p. 5)

UN an aura suffi pour faire éclater la coalition des différentes fractions de la bourgeoisie, coalition réalisée après de dures batailles autour d’un homme de compromis : Chadli. Le Bureau politique mis sur pied lors du 4ème Congrès du FLN était conçu dès le départ comme un cadre pour canaliser les luttes inter-bourgeoises. Ce qui n’a pas empêché les chefs de file de se comporter publiquement comme des prétendants (1).

Cela s’est traduit par une paralysie totale au moment des prises de décision, que ce soit dans le domaine économique ou bien face aux mobilisations de masse.

La dernière en date, en Kabylie, autour du problème berbère, a fait voler en éclats cette pseudo-collégialité.

HORIZON 80, PAS DE MIRACLE ALGERIEN

La crise du capitalisme mondial a des effets démultipliés sur l’économie algérienne, rançon de sa dépendance par rapport au marché mondial.

Malgré sa rente pétrolière, la bourgeoisie algérienne n’a pas cessé d’emprunter sur le marché capitaliste pour réaliser son « accumulation » L’industrialisation s’est révélée un gouffre financier, les détournements de fonds, la gabegie et l’inflation importée ont engendré des sur-coûts qui atteignent pour certains projets quatre fois le montant prévu, avec des délais de réalisation supérieurs. Certains projets ont été abandonnés. quant à ceux qui ont été réalisés, ils ne tournent qu’à 30 à 40 pour cent de leur capacité, et de nombreuses réalisations n’ont jamais fonctionné : ammoniaque d’Arzew, machines agricoles de Bel-Abbes, Sonic de Mostaganem et Saïda…

Les installations réalisées fonctionnent indépendamment les unes par rapport aux autres, se font concurrence et importent les produits qui leur sont nécessaires, mais que fabriquent d’autres entreprises nationales.

Le secteur des hydrocarbures, conçu comme créateur de devises permettant de financer les autres secteurs et, par conséquent, tourné vers le marché mondial, a fonctionné pour son propre compte, en se reproduisant uniquement par rapport aux besoins du marché mondial. C’est ce secteur qui reçut la plus grosse partie des investissements industriels prévus dans les différents plans, renforçant le sous-développement des autres secteurs : mécanique, chime, etc., et son effet d’entraînement sur le reste de l’économie est nul.

L’intégration économique, censée être réalisée par les « industries
industrialisantes » est un leurre. Le régime impute son échec au modèle de De Bernis. Pour le ministre de la Planification, c’était un modèle valable pour les pays européens au 19ème siècle. Il a donc été greffé sur la « spécificité algérienne ». Le rêve disparaît dès que l’on jette un coup d’œil sur l’agriculture où l’échec est flagrant, d’autant plus que les « progrès en organisation » (Réforme agraire) intégrés dans le modèle sont eux aussi sujets à caution.

Peu de gros propriétaires fonciers ont été touchés par la réforme. 40 pour cent des recours ont été acceptés alors que la majorité des terres distribuées lors de la première et de la deuxième phase appartenaient à l’Etat. Cette dernière phase a été déclarée close.

Les mandataires, momentanément écartés, sont revenus sur la pointe des pieds du temps de Boumédienne ; ce retour est aujourd’hui légalisé par la dernière circulaire du ministère de la Réforme agraire.

Pendant ce temps, toutes sortes d’obstacles sont dressés devant les coopératives, ce qui a pour effet une faible augmentation de la production et la stagnation de certaines cultures alors que la population augmente, elle, de 3,2 pour cent par an.

Ce constat d’échec est reconnu par toute la bourgeoisie, aussi bien par la tendance « libéralisante » que par les tenants de la « continuité », d’où leur accord sur les « réajustements » ; à plus forte raison parce que les conditions de vie des masses rendent la situation explosive et peut-être incontrôlable. Les exemples tunisiens et égyptiens sont présents dans les esprits.

La situation des masses est en effet intenable; trouver un logement relève du miracle, sauf pour ceux qui peuvent payer 50 à 100 000 dinars (*) de « pas de porte », (le soi-disant plan de résorption de la crise du logement, en tenant compte de leurs hypothèses qui prévoyaient la construction de 200 000 logements par an, ne permettra de ne revenir qu’en l’an 2020 au taux d’occupation de 1964 !). Quant à l’auto-construction, étant donné le prix des terrains et celui des matériaux de construction, elle ne touchera que les bureaucrates occupant des postes élevés et la bourgeoisie.

On trouve la même situation dans le domaine des transports urbains et suburbains, qui sont utilisés surtout par les couches populaires.

C’est encore plus dramatique dans le secteur de la santé, à tel point que les masses vivent dans la hantise de la maladie. Pour obtenir un rendez-vous à l’hôpital, il faut attendre jusqu’à un an, ou bien soudoyer le personnel dont les salaires sont très bas. Et cette situation profite surtout aux médecins du secteur privé.

L’enseignement, fleuron des « réalisations », connaît aussi une situation catastrophique ; la sélection opère à tous les niveaux, du primaire au moyen, du moyen au secondaire, le baccalauréat étant le barrage le plus sélectif (23 pour cent de reçus). Seuls les enfants de la petite bourgeoisie parviennent à franchir ces obstacles à l’aide de cours privés (100 dinars de l’heure), qui sont un salaire d’appoint pour les enseignants, étant donné le bas niveau des salaires.

Cet échec sur toute la ligne peut être résumé par les chiffres suivants : 40 pour cent de la population active est au chômage, 70 pour cent de l’économie nationale est aux mains des multinationales ; la dette extérieure s’élève à 110 milliards de dinars, le service de la dette à 23 pour cent des exportations (soit 13 milliards de dinars), la dépendance alimentaire s’accroît avec un tiers de la rente pétrolière consacré à l’importation de produits alimentaires (15 milliards de dinars) ; la balance commerciale est déficitaire depuis 68. Pour les masses, ce bilan se traduit par une détérioration constante de leur niveau de vie, le SMIC étant de 950 dinars, alors qu’une étude du ministère du Travail évalue à 2 000 dinars le budget minimum familial.

Dans le même temps, des fortunes colossales se constituent ; certains dignitaires du régime se font construire des villas dont le prix atteint un milliard de centimes. Pour s’en sortir, la bourgeoisie algérienne entend combiner des mesures économiques allant dans le sens de l’infitah (libéralisation) et des mesures répressives à l’égard de la classe ouvrière, par la discipline au travail, codifiée par un nouveau « Statut général du travailleur » et par les atteintes aux libertés syndicales.

POUR UN SYNDICAT AUTONOME, POUR UNE UGTA DE CLASSE

L’emprise de Boumedienne sur la classe ouvrière commençait à montrer des signes de faiblesse de son vivant. La série de grèves de l’été 77, menées en dehors et contre les bureaucrates syndicaux, l’avait amené à réformer l’UGTA pour la rendre plus crédible aux yeux des travailleurs, d’autant plus que les bureaucrates en place sont un obstacle à son projet de construction d’un parti intégrant les staliniens du PAGS. L’élimination partielle de cette caste bureaucratique a permis l’émergence d’une nouvelle génération de syndicalistes combatifs, non corrompus, certes minoritaires, mais influents.

Après le 5ème Congrès de l’UGTA, on compte globalement trois tendances : les staliniens du PAGS, les bureaucrates du FLN et des syndicalistes combatifs encore prisonniers de l’idéologie populiste. Différées momentanément par l’agonie, puis la mort de Boumedienne, les luttes des travailleurs reprennent à la veille de l’élection de Chadli, annonçant la ferme détermination des travailleurs de ne pas faire les frais de la crise économique, conséquence de l’incapacité de la bourgeoisie.

Dans la plupart des cas, la bourgeoisie a cédé aux revendications des travailleurs, se contentant de lock-outer certaines entreprises à la veille des congés. Pressée par les travailleurs à la base, craignant de ne pouvoir contrôler la situation, la bureaucratie syndicale a élaboré, au mois de juillet, un cahier de revendications, ce qui est un pas qualitatif important dans la vie syndicale.

En effet, depuis le coup d’Etat de 1965 et la décapitation de l’UGTA par Boumedienne, ce dernier décidait selon son bon vouloir des augmentations de salaires. Ce cahier de revendications reste bien sûr très en-deçà des revendications des travailleurs ; d’autre part, les revendications telles qu’elles sont présentées, par catégories, divisent les travailleurs. Il faut des revendications unifiantes. Enfin, la façon dont a été élaboré ce cahier de revendications, en dehors des travailleurs, sans discussions à la base, est anti-démocratique et ne permet pas de les mobiliser pour faire aboutir ces revendications. Seule une prise en charge effective par les travailleurs de leurs revendications élaborées, discutées en assemblées générales, peut faire reculer l’Etat bourgeois, et non pas des négociations en coulisses telles que les mène la direction syndicale.

Il n’y a pas d’illusion à se faire sur cette direction. Elle est complètement intégrée à l’Etat bourgeois, et trahit à chaque occasion les travailleurs en dévoyant leurs luttes, comme lors de la grève générale des Postes et Télécommunications où le secrétaire général, Demene a traité les syndicalistes de « fauteurs de troubles » et leur a intimé l’ordre d’accepter les 200 dinars accordés par le gouvernement ; seule l’intransigeance des travailleurs a permis de faire reculer le pouvoir et d’obtenir les 450 dinars demandés. De même, cette direction accepte le « Statut général du travailleur » qui remet en cause les acquis de la précédente législation du travail.

Au moment où les libertés syndicales sont bafouées dans toutes les entreprises, où des sections syndicales entières sont arrêtées et envoyées en prison, (comme à l’Institut algérien du pétrole, comme Boufarik, etc.), la direction syndicale n’a pas mobilisé les travailleurs pour riposter, se contentant de protestations timides, sans perspectives.

Au moment où la bourgeoisie lance une offensive contre les syndicalistes combatifs (voir les modifications des statuts du FLN, obligeant les responsables syndicaux à adhérer au FLN), la lutte pour l’indépendance de l’UGTA à l’égard de la tutelle du FLN et de l’Etat bourgeois, est une nécessité vitale pour la classe ouvrière.

RENAISSANCE DU MOUVEMENT DE MASSE

Pris au dépourvu, effrayé par la détermination de la classe ouvrière, le pouvoir bourgeois va tenter une démonstration de forces, ayant pour but d’intimider les masses. En septembre-octobre 1979, les brigades anti-émeutes, aidées de chiens, les « forces de l’ordre » arrêtent, matraquent les ouvriers, les jeunes, et envoient dans des camps de travail tous ceux qui ont protesté contre cet abus de pouvoir. Ce déploiement de forces baptisé « campagne d’assainissement » n’a fait qu’exaspérer les masses et ne les a nullement intimidées.

La preuve en est donnée par la lutte menée par les lycéens quelques semaines plus tard. Ponctuée de manifestations, d’affrontements avec les forces de répression pendant une semaine entière, cette lutte a fait reculer honteusement le pouvoir qui a dû céder devant les « gamins ».

POUR UN SYNDICAT ETUDIANT AUTONOME, POUR UNE ARABISATION FONDEE SUR L’ARABE POPULAIRE

A peine en avait-on fini avec les lycéens que les étudiants des sections arabisées entament une grève qui se généralise rapidement dans toutes les universités du pays, touche certains lycées et une partie des enseignants. Les étudiants refusaient la politique démagogique qui fait d’eux un alibi et les laisse sans possibilité d’embauche à la fin de leurs études.

L’arabisation est encouragée par une fraction au sein du pouvoir qui, par sa formation arabophone, se trouve exclue des prises de décision économiques et dont les possibilités de se servir de cette formation sont pratiquement nulles. L’arabisation des secteurs économiques élargirait donc ses possibilités d’enrichissement.

Cette politique d’arabisation s’explique par le dilemme devant lequel se trouvait la bourgeoisie : industrialisation rapide et arabisation lente ou l’inverse.

Etant donné le type d’industrie choisi, à technologie de pointe et, par conséquent, la nécessité de former des cadres, des ouvriers qualifiés, il n’y avait pas d’autre possibilité de choix que la première solution. Le combat pour une arabisation basée sur l’arabe populaire et la suppression de la langue française comme langue dominante doit être mené aussi bien par les étudiants « francophones » qu’« arabophones ». L’utilisation du français ou de l’arabe classique exclut les masses populaires de l’information et donc ne leur permet pas un contrôle sur toutes les décisions.

POUR UN MOUVEMENT DES FEMMES AUTONOME

Par la constitution de « groupes de travail d’étudiantes », les étudiantes algériennes, vont, dans un premier temps, poser publiquement le problème de l’oppression des femmes en Algérie, de la discrimination dont elles sont l’objet dans le domaine du travail, leur enfermement à la maison et leur soumission au bon vouloir de l’homme. La rediscussion du Code de la famille va relancer la mobilisation et l’étendre à des syndicalistes de l’Université et à certaines femmes travailleuses.

Le pouvoir entend élaborer un Code de la famille en dehors des principaux intéressés, les Algériennes et les Algériens, en confiant l’élaboration du projet à une commission composée en majorité de membres du clergé et qui ne compte qu’une seule femme.

Il faut refuser tout code non discuté et amendé par toute la population algérienne. L’organisation des colloques d’Alger et d’Oran, la mobilisation du 8 mars indiquent la possibilité de mobiliser de plus en plus de femmes et d’hommes. L’UNFA, complice du pouvoir, n’a pas protesté protesté contre cet arbitraire.

Les femmes algériennes ne pourront lutter contre leur oppression qu’en s’organisant en dehors de l’UNFA, dans un mouvement autonome.

Cette renaissance du mouvement de masse a atteint son point culminant avec la lutte pour la reconnaissance de la langue Tamazirt (berbère).

POUR LA RECONNAISSANCE DE LA LANGUE TAMAZIRT, POUR L’ARABE POPULAIRE

Influencé dès sa constitution par l’idéologie jacobine, centralisatrice et uniformisante, le PPA-MTLD a imposé en son sein l’unité culturelle algérienne. Issue dans sa grande majorité des rangs du PPA, la petite-bourgeoisie algérienne qui a investi l’appareil d’Etat colonial a traduit dans les faits cette « Unité culturelle », par des attaques systématiques contre l’expression culturelle et linguistique berbère, en supprimant l’enseignement du berbère à l’Université, en boycottant dans les organes d’information la chanson et la poésie berbère, et en tentant, en 1962, de supprimer la chaîne de radio berbère.

Menée au début uniquement par les étudiants de Tizi-Ouzou, la lutte pour la langue berbère et l’arabe populaire s’étendra à l’Université d’Alger, à la suite de la répression sauvage de la manifestation du 7 avril 1980.

Les étudiants d’Alger se mettent en grève et exigent la libération des 125 détenus. Pendant 3 jours, les tentatives de manifestation sont réprimées et les meetings se succèdent jusqu’à la libération des 125. A partir du 19 avril, date à laquelle l’assaut contre l’Université de Tizi-Ouzou fut donné et qui s’est soldé par 500 blessés, la lutte s’étend à toute la Kabylie, touchant toute la population.

Les grèves et les affrontements entre les CNS (Corps national de sécurité) et la population se poursuivent pendant 3 jours. La mobilisation reprend à Alger.

Le pouvoir tente alors d’isoler la lutte en répandant mensonges et calomnies au travers de ses organes d’information, prétendant que le mouvement est en réalité un complot néo-colonial et attisant le chauvinisme anti-kabyle.

INDEX DES SIGLES
UGTA – Union générale des travailleurs algériens
PAGS – Parti d’avant-garde socialiste (ancien PCA)
UNFA – Union nationale des femmes algériennes
PPA – Parti du peuple algérien, devenu MTLD, Mouvement pour le triomphe des libertés démocratiques

Mais ni les calomnies, ni les mensonges, ni la répression ne viennent à bout de la détermination des masses à faire aboutir leur revendications et obtenir la libération des 24 détenus pour « complot contre la sécurité de l’Etat ». En s’organisant en comité populaire, regroupant enseignants, étudiants, ouvriers et employés, en comités d’instituts coordonnés entre eux, les masses et les étudiants ont montré la nécessité de l’auto-organisation pour faire aboutir les luttes, la nécessité de construire un syndicat étudiant autonome et qui soit au côté des masses.

La lutte pour la langue berbère, pour l’arabe populaire, pour un syndicat étudiant sont inséparables de la lutte pour les libertés démocratiques en général, pour le droit de s’organiser librement, le droit d’avoir sa propre presse.

UN CONGRES DE DUPES POUR PLEBISCITER CHADLI

Convoqué pour adopter le Plan 80-84, ce congrès s’est transformé en concert de louanges pour Chadli ; les grandes décisions économiques ayant été prises lors des comités centraux de décembre et d’avril, la seule fausse note fut l’agriculture.

Le projet du pouvoir, clairement énoncé dans le rapport de la commission économique du Parti, prévoyait le démantèlement du secteur de la Réforme agraire et la transformation du secteur autogéré selon les normes industrielles. C’est le PAGS qui a engagé publiquement la bataille contre ce projet, et ce, avant le comité central d’avril, en organisant des discussions dans l’UGTA qui furent ensuite publiées dans la presse, ce qui lui valut de violentes critiques de la part du régime et des menaces de la commission économique du Parti. Le secrétaire général de l’UGTA s’est fait rappeler à l’ordre, accusé d’être manipulé par le PAGS.

Les difficultés soulevées par la politique agricole, les bévues en Kabylie, tout cela a paralysé le gouvernement et, pour s’en sortir, la bourgeoisie s’en remet à Chadli.

Pour Chadli, consacré homme providentiel par la bourgeoisie afin de juguler le mouvement de masse et de préserver son pouvoir, le congrès sera donc l’occasion de renforcer ses positions.

Alors que quelques mois plus tôt la collégialité était présentée comme la qualité principale du régime, ce qui permettait de décocher au passage des flèches au « pouvoir personnel » de Boumedienne, les dignitaires se mobilisent tout à coup derrière Chadli. Il n’y a pas d’intervention qui se fasse sans référence à la « parole de Chadli » ; les staliniens du PAGS enfourchant le même cheval de bataille pour « préserver les acquis de la Révolution ».

Le PAGS est en fait dans une impasse. Son projet d’intégration au FLN a été freiné par la mort de Boumedienne et il n’est toléré que s’il fait preuve de docilité. Il est d’autre part largement rejeté par une fraction du régime. S’il ne veut pas perdre sa base qui se rétrécit de jour en jour, surtout à l’Université, il est obligé de se faire le défenseur des « acquis de la Révolution », sur lesquels la bourgeoisie passera dans sa marche vers la « sadatisation ».

Les attaques ouvertes dont il a été l’objet pendant le congrès sont un avertissement et préparent une « chasse aux sorcières ». Les amendements aux statuts du FLN sont en fait des manœuvres pour l’acculer à s’intégrer au FLN.

La direction stalinienne du PAGS continue à induire en erreur les militants de base et à entretenir des illusions sur ce régime pourri, sur son anti-impérialisme de façade, alors que la dépendance du pays vis-à-vis de l’impérialisme ne cesse de se renforcer : dépendance technologique, dépendance alimentaire, contrôle de l’industrie nationale par les multinationales, endettement croissant.

Il ne s’agit pas pour les marxistes-révolutionnaires de rester « neutres » dans la bataille que se livrent les différentes fractions de la bourgeoisie sur la « Révolution agraire ».

Ils doivent se battre contre la remise des terres aux propriétaires fonciers, contre la privatisation des terres appartenant à l’Etat, tout en continuant à dénoncer cette Réforme agraire bourgeoise limitée.

Ils exigent la nationalisation intégrale sans indemnisation de toutes les propriétés des « absentéistes », en premier lieu des capitalistes et des dignitaires du régime.

Ils doivent lutter contre le retour des mandataires dans le circuit de distribution, pour la nationalisation du commerce de gros, exiger la nationalisation de tous les capitaux étrangers, l’application effective du monopole sur le commerce extérieur, tout en sachant les limites et l’incapacité de cette bourgeoisie à réaliser ces tâches démocratiques.

30 juin 1980


NOTES

(1) Yahiaoui : tenant de la « continuité » autour duquel se retrouve l’appareil du parti qu’il a mis en place depuis sa nomination à sa tête en 77, les staliniens du PAGS et la bureaucratie syndicale.
Bouteflika : homme de la bourgeoisie d’affaires et des technocrates « ouvert » à une libéralisation économique.
Le compromis s’est fait au détriment de ce dernier.

(*) Un dinar algérien vaut 0,88 francs français.

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