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Lucien Kiner : Les manifestations des Algériens en France sont des formes de la lutte de classe

Article de Lucien Kiner paru dans Nouvelle Gauche, 1ère année, n° 2, 30 avril 1956

DEPUIS plusieurs semaines, à tour de rôle, les travailleurs algériens en France débrayent dans les diverses régions.

Le branle a été donné par la manifestation du 9 mars à Paris, organisée par le MNA. Les deux mots d’ordre essentiels sont : « Indépendance de l’Algérie », « Libérez Messali Hadj ».

Ces actions revêtent la plus haute importance politique, une importance sur laquelle personne ne se trompe, et surtout pas les possédants : c’est l’entrée en lutte, en France, d’une armée de 500.000 ouvriers. C’est la possibilité de la jonction de ce mouvement avec celui de la classe ouvrière pour ses revendications contre la guerre d’Algérie.

Nous pouvons lire dans « Les Echos » des conseils dans le genre de : « Mais on ne saurait trop recommander, particulièrement à la maîtrise subalterne, d’éviter à leur égard toute parole blessante. »

Leur résolution leur a déjà au moins valu cela, les patrons découvrent que ce sont des êtres humains.

Leur volonté et leur discipline sont remarquables. Le MNA, animateur de ces mouvements, est réduit, comme toutes les organisations nationalistes algériennes, à la clandestinité.

Les consignes sont données de bouche à oreille : les débrayages, dans la plupart des cas, se font dans l’isolement le plus complet. La seule solidarité qui est organisée l’est spontanément, en dehors des consignes des confédérations syndicales.

F.O. ne s’exprime publiquement que très peu sur ce sujet. La direction de la CGT prend de fait position contre ces mouvements, estimant pour sa part qu’ils dressent les travailleurs algériens contre les travailleurs français.

Ces grèves et manifestations se produisent en France au moment même où les travailleurs français engagent la bataille contre le rappel du contingent.

Les prolétaires algériens et français se battant sur un objectif commun, en France, dans l’unité, voilà le spectre qui fait frémir la bourgeoisie et tous ceux qui ne veulent lutter contre elle que par des armes loyales, sans douleurs et dans le calme !

C’est cependant cette jonction politique qui se trouve posée dans les faits. Elle peut être déterminante pour l’évolution des événements en France.

L. K.

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