Article paru dans Combat communiste, n° 5, mai 1975, p. 8

Engendré par la surexploitation de millions de travailleurs immigrés que le patronat s’efforce de couper de leurs camarades français, exacerbé par les guerres coloniales, le racisme sévit de façon plus ou moins diffuse depuis bien longtemps en France. Mais, depuis l’été 1973, il semble que la racaille fasciste et raciste relève la tête et ait entrepris une campagne d’agression systématique contre les ouvriers immigrés et nous assistons à une recrudescence d’attentats et de crimes racistes.
La nationalisation des compagnies de pétrole françaises par l’Algérie en juillet 1973 marque le début de cette offensive raciste : les nostalgiques de l’OAS et de l’Algérie française ont sans doute espéré que cette mesure faciliterait leur démagogie raciste et leur permettrait de dresser une partie de la population française contre les immigrés. Un simple fait divers – l’assassinat d’un traminot marseillais par un déséquilibré d’origine algérienne – devait servir de prétexte à cette campagne ignoble.
Le lendemain, le torchon raciste local Le Méridional (qui est en cheville avec le journal du maire – socialiste – Defferre) écrivait un article ordurier et insultant contre les travailleurs algériens. Ce tissu d’ignominies était immédiatement suivi d’effets : en trois semaines, onze travailleurs algériens étaient assassinés et de nombreux travailleurs immigrés étaient lâchement agressés et blessés. Des grèves de travailleurs immigrés éclataient dans un certain nombre d’entreprises mais les syndicats et les partis de gauche se gardaient bien d’engager une offensive sérieuse contre la montée des crimes racistes. Ils étaient et sont bien trop occupés à défendre les intérêts de « l’économie nationale » (traduisez des patrons).
Depuis deux ans les attentats racistes se multiplient. Les crapules qui se livrent à ces actions ne sont évidemment neuf fois sur dix pas arrêtées car les policiers ont dans leur majorité des sympathies racistes et ne sont pas payes pour protéger les travailleurs. Témoin le brigadier Canto, assassin de Ladj Lounès …
La liste des attentats racistes des deux derniers mois est à elle seule effrayante. Le 12 février des voyous tirent sur des travailleurs immigrés de Bernard Moteurs qui sortaient de leur travail. Le 16 mars à Vanves, un ouvrier tunisien est tué d’une balle par l’un de ses voisins français. La police alertée arrivera cinq heures après le drame. Le 25 mars des individus en 204 tirent sur un ouvrier algérien de Carbone Lorraine qui regagnait son domicile. Le 27 mars un travailleur algérien est tabassé par une milice – à Marseille, livre aux flics, tabassé par la police et puis par les gardiens de la prison des Baumettes. Il meurt une semaine après faute de soins. Le 29 mars un travailleur marocain sortant du cinéma est roué de coups par des policiers car il protestait contre un contrôle d’identité abusif.
Le 10 avril deux gardiens de la paix abattent un travailleur algérien, malade nerveux, dans les locaux de l’hôpital Saint-Vincent-de-Paul.
Le racisme gangrène toute cette société pourrie jusqu’à la moëlle.
Le racisme n’est pas seulement une conception stupide, réactionnaire et anti-scientifique. Le racisme n’est ni « éternel » ni « naturel », c’est un produit de la société de classe, une arme aux mains des exploiteurs. Les patrons l’utilisent pour opposer les travailleurs français aux travailleurs immigrés et opposer entre eux les travailleurs immigrés de différentes nationalités.
Dans la période actuelle de crise, le racisme peut être un moyen dangereux pour faire accepter les licenciements et le chômage.
En Allemagne de l’Ouest, par exemple, ce sont des mesures ouvertement racistes qui viennent d’être prises par le gouvernement : interdiction de se déplacer et de choisir librement son lieu de travail pour les immigrés, refus d’accueillir des immigrés des villes en comptant déjà 12 % parmi leurs habitants, priorité absolue d’embauche pour les Allemands, etc. En France, les mesures gouvernementales sont pour l’instant limitées au blocage de l’entrée de nouveaux travailleurs immigrés et à des tracasseries supplémentaires concernant les cartes de travail et de séjour qui entrainent de nombreuses expulsions.
Mais, si le besoin s’en fait sentir, la bourgeoisie française peut demain prendre de nouvelles mesures racistes et même éventuellement faire appel à la pègre raciste et fasciste qu’elle se contente aujourd’hui de tolérer avec bienveillance.
Le mépris des travailleurs les plus exploités (quelle que soit la couleur de leur peau) le mépris de la misère se conjugue au mépris pour les peuples coloniaux. Lorsqu’une partie des travailleurs méprise une autre partie plus exploitée, c’est en fait qu’elle accepte sa propre exploitation.
Le racisme empêche les travailleurs de prendre conscience de leurs intérêts de classe. C’est pourquoi seuls les communistes révolutionnaires qui n’ont ni patrie, ni frontières à défendre peuvent véritablement combattre les préjugés et les comportements racistes, comme tous les préjugés produits par la société bourgeoise.
Nous devons à l’usine comme au bureau, dans la rue comme dans notre entourage, faire la guerre aux attitudes, aux réflexions racistes, Lorsque les paroles se traduisent logiquement en actes elles aboutissent aux meurtres comme celui de Laïd Moussa et un jour aux camps de concentration, aux fours crématoires et à la barbarie fasciste.
SOUTENONS L’ACTION DU COMITE POUR LA VERITE SUR L’ASSASSINAT DE MOHAMED BECHIR RASSAA
Le dimanche 16 mars, l’ouvrier tunisien Mohamed Bechir Rassan a été assassiné à coup de fusils par des racistes à Vanves. Ce crime était prémédité : la victime avait été menacée par ses futurs assassins. La police alertée avait refusé d’intervenir. Seul l’assassin lui-même a été arrêté : ses complices, ceux qui l’ont aidé et les flics qui se sont rendus coupables de non assistance à personne en danger sont toujours en liberté !
Pour que toute la vérité soit faite sur cet odieux crime raciste, un Comité pour la vérité sur l’assassinat de Mohamed Bechir Rassaa s’est constitué à l’initiative de parents et amis de la victime et est soutenu par Lutte Ouvrière et d’autres organisations. Combat communiste a fait connaître son adhésion à ce comité et s’associe à toutes ses initiatives. Déjà à Vanves, le Comité a recueilli les signatures de milliers de personnes qui affirment leur volonté de mettre le racisme hors-la-loi.
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