Article d’Abdelaziz Menouer alias El Djazaïri paru dans Le Paria, troisième année, n° 29, septembre 1924, p. 1

Encore un crime de l’impérialisme français. L’arbitraire qui sévit dans les colonies poursuit les indigènes jusque dans la Métropole.
L’ouvrier colonial qui, poussé par la faim et fuyant la trique du colonialisme, vient offrir sa force de travail sur le marché métropolitain se voit déjà en butte aux mêmes procédés de violence, aux mêmes iniquités qui en font un matériel humain facile à exploiter.
Malgré la haine de race, perfidement semée par le capitalisme, les travailleurs nord-africaine qui côtoient dans l’usine des ouvriers français, se solidarisent avec leurs frères de misère pour la lutte de classe.
Dans deux meetings imposants, des milliers d’entre eux ont acclamé des orateurs communistes qui les ont exhortés à se grouper dans les organisations révolutionnaires, les seules qui, sans considération de race ni de couleur, s’opposent à l’exploitation patronale.
Cette masse de travailleurs coloniaux a montré que sa léthargie n’était qu’apparente. Ces milliers de parias courbés sous le faix de l’oppression couvent, sous cette indifférence qu’on leur prête, la haine la plus farouche contre leurs exploiteurs.
Cette haine s’est manifestée rue Blanche, boulevard Auguste-Blanqui. L’Impérialisme français en a été épouvanté. Alors, le colonialisme immonde soudoie sa presse prostituée qui, sur un ordre précis est partie en guerre contre les malheureux parias qui osèrent défendre leurs droits. Comme une salve d’artillerie, tous les torchons de la finance et de l’industrie crachent sur eux mille insultes, vocifèrent des appels de haine et alarment les prolétaires français contre le danger qui menace … Say, Citroën, Renault et Cie, Haro sur le bicot qui se réveille à la lutte de classe !
Depuis le clown du Journal, Clément Vautel, jusqu’à cet imbécile de Gervaise du Paris-Soir qui parle « de péril multicolore », tous les salariés de la plume bourgeoise bavent contre le prolétariat algérien pour dresser l’opinion publique contre lui.
Et, aussitôt, les esclavagistes de profession ont dressé leur appareil de répression. Comme les lois arbitraires sont alors vite appliquées ! Plus de lenteur dans le rouage administratif ; il ne s’agit plus de la suppression de l’Indigénat ou de la loi d’amnistie.
Tous les négriers du gouvernement se démènent avec une célérité qui leur était inconnue. C’est Godin, conseiller municipal de Paris, et ses complices Besombes et Massard qui déposent une monstrueuse proposition pour l’installation, à la préfecture de la Seine, d’un bureau de répression contre les ouvriers nord-africains.
C’est le sinistre Mirante, directeur des affaires indigènes au gouvernement général d’Algérie, et ses horribles chaouchs qui viennent monter la nouvelle annexe de l’ignoble « Indigénat » au sein même de la ville lumière.
Et, pour justifier leur dessein criminel, ils disent cyniquement que ce nouveau bureau de commune mixte, avec ses gardes-chiourmes, sera un bureau chargé de la « protection » morale et matérielle des indigènes nord-africains résident ou de passage à Paris.
Nous savons ce que cette « protection » signifie. Elle s’étend déjà sur 60 millions de coloniaux et elle devient pour eux si écrasante que partout le mécontentement gronde. Devant le réveil de la plèbe coloniale, le capitalisme épouvanté ordonne à ses larbins du Bloc des Gauches, de suivre la politique esclavagiste de leurs prédécesseurs de droite.
Parmi ces radicaux, ces socialistes, ces Moutet qui se servirent de la question indigène comme d’un tremplin pour monter au pouvoir, aucun n’a élevé la voix pour s’indigner contre les procédés infâmes dont on châtie ces ouvriers qui n’ont pas la même couleur que leurs nationaux.
La presse de gauche a été plus perfide dans sa campagne que l’Action Française. Les masses indigènes ne s’illusionnent plus sur les partis libéraux. L’antagonisme de classes, dans la situation économique actuelle, est si manifeste, qu’on ne peut leurrer les masses par la phraséologie.
L’action seule peut convaincre et c’est pour cela que les peuples opprimés se dirigent vers les organisations syndicales révolutionnaires et vers le seul parti qui les défend contre l’exploitation et la démagogie. Les peuples coloniaux le comprennent bien.
Le Parti Communiste, partout, sur le terrain économique comme dans le domaine politique, combat inlassablement les crimes perpétrés contre eux et malgré la répression, il luttera énergiquement pour l’émancipation de ces opprimés et les organisera pour les dresser contre l’ennemi commun : le Capital.
EL DJAZAIRI.
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