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Idir Amazit : L’Afrique terre de la Révolution

Article d’Idir Amazit paru dans Le Libertaire, n° 367, 2 juillet 1953, p. 2

Le glas du colonialisme

EN Europe, les traditions de lutte et l’enthousiasme prolétarien ont été entamés dans leur virilité par le chancre d’une politicaillerie prônée par une caste de saltimbanques maîtres en versatilités et trahisons. Les sociaux-démocrates attardés et les bureaucrates de la 3e Internationale portent une écrasante responsabilité de cette criminelle situation devant le monde ouvrier.

En refusant de s’enrégimenter dans les principales formations syndicales à la dévotion des traîtres sociaux-démocrates de F.O., des hommes en noir de la curie romaine de la C.F.T.C. et des opportunistes outrageants de la C.G.T., la classe ouvrière n’a pas perdu pour autant ses facultés d’indignation.

Sa léthargie n’est que momentanée et les maîtres de l’heure qui sont des observateurs sagaces sont les premiers à ne pas douter de son réveil prochain. En attendant cette terrible échéance où les vainqueurs et les vaincus d’aujourd’hui auront une dernière et définitive explication, la métropole du capitalisme tend à se déplacer vers les contrées africaines jugées plus hospitalières. Là-bas, la bourgeoisie capitaliste de la vieille Europe tentera de créer dans les commodes conditions colonialistes, un nouvel Eldorado du capital par l’industrie à bon compte des matières premières et … de l’indigène.

Nous affrontons l’avenir pour ce qui nous concerne avec un calme serein, persuadés que Jupiter a décidé de perdre ces chevaliers de l’industrie qui croient à leur pérennité.

C’est de pied ferme que nous accueillerons les requins du capitalisme et leurs argousins. D’Abidjan à Nairobi, de Tombouctou à Johannesburg, toute l’Afrique de couleur est secouée par de réconfortantes convulsions à contenu révolutionnaire non négligeable. Le Nord de l’Afrique est entré dans une phase de permanente ébullition. L’issue de cette gigantesque guerre de classe avec ses aspects divers ne peut être que l’explosion générale des systèmes présents et la projection aux quatre coins de la terre de tous les oppresseurs, européens et africains.

Dans le combat des vaillants peuples africains, il ne saurait y avoir de place aux spéculations sentimentales, aux ménagements, aux demi-mesures, Si par malheur les Africains méconnaissaient les enseignements révolutionnaires intransigeants, ils retomberaient à coup sûr après leur libération du colonialisme, par la grâce des requins de la politique, dans la mare et la pourriture des régimes sociaux-démocrates qui émasculent une notable fraction du prolétariat d’Europe.

Les Africains devront frapper à ricochet pour anéantir le colonialisme des Européens et détruire irrémédiablement par le même coup les diverses institutions féodales et anachroniques locales. Briser sans nostalgie du passé ni faiblesse sentimentale les cercles étroits sociaux, philosophiques, religieux ou traditionnels, qui confèrent à la société africaine un esprit médiéval, est une nécessité impérativement déterminante dans l’orientation positive de la révolution des prolétaires africains.

Les embûches ne manqueront pas. Le ramassis de minus arrivistes sans vergogne, la maffia des créatures serviles du colonialisme, la bourgeoisie conservatrice et férocement égoïste, tous ces animaux qui peuplent l’arche de Noé colonialiste savent qu’ils feront un naufrage sans espoir avec leur ordre colonial.

C’est dire qu’il faut s’attendre de leur part à des soubresauts de résistance désespérée. Ce serait une erreur mortelle pour les militants de la révolution sociale et anticolonialiste que de tenter la moindre récupération de ces éléments, de leur jeter la moindre planche de salut, de faire le moindre quartier à cette faune dont la trahison remonte par continuité familiale jusqu’à l’aurore du colonialisme.

La vigilance des éléments prolétariens de formation révolutionnaire, exercée sans relâche et avec intransigeance, décèlera et dénoncera impitoyablement toutes les fissures et intrigues dans le camp de la révolution sociale et anticolonialiste. Leur obstination balayera tous les écueils, avec la solidarité fraternelle de tous les révolutionnaires internationaux.

Le colonialisme qui est le maillon le plus solide dans la chaîne du capitalisme, ne sera plus qu’un dantesque souvenir pour le plus grand bien de l’ensemble du prolétariat international.

I. AMAZIT.