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Idir Amazit : Le calvaire des Nord-Africains

Article d’Idir Amazit paru dans Le Libertaire, n° 309, 11 avril 1952, p. 1-2

VERITABLES déracinés en cette terre qui se réclame des Droits de l’Homme, les travailleurs nord-africains continuent à subir les offensives racistes « sur tous les fronts », pour employer le jargon des culottes de peau. Aux brigandages systématiques gouvernementaux dans le régime des allocations familiales dus aux artifices juridiques des tripoteurs de la 4e République ; aux brimades racistes éhontées de la police et instrument d’exécution des basses œuvres au service des actuels fermiers généraux de la politicaille, s’ajoute cette permanente campagne de presse, par la quasi-totalité des journaux français, dont la moralité comme en conviendraient tous les esprits indépendants et saints, les destine tout juste à l’usage en ce lieu où même les rois vont à pied. Le moindre méfait dont un Nord-Africain a le malheur d’être l’auteur est montré en épingle à la « une » en romance dramatique fielleuse, alors que de véritables monstres humains sévissent journellement en France et ailleurs pour n’avoir droit qu’a quelques lignes perdues dans la rubrique des chiens écrasés. Encouragés par les exemples des Pouvoirs publics, des organisations privées n’hésitent plus à faire entendre leur voix dans cet odieux concert de la mare aux crapauds. Les vibrants sentiments nazistes et haineux de ces néo-aryens s’expriment en une verve dont à la violence s’allie une superbe éloquence ordurière, comme il sied à de piètres émules du grand Rabelais. Est-ce cela que vous avez voulu, ouvriers et paysans de 1789 qui avez déchaussé et déculotté vos bourgeois de l’époque pour équiper l’armée des sans-culottes sur ordre de Saint-Just ?

Et vous communards de Paris ? Non ! bien sûr. Morts et vivants de la vraie France, jugez vos pairs dégénérés ! Parmi les prostitués du stylo et de la politique, qui vitupèrent contre les mêmes travailleurs nord-africains dont ils louaient hier encore la bravoure et les traditions guerrières pour des considérations de champs de bataille, un certain « Comité de défense du Voisinage » de la rue Gustave-Rouanet dans le 18e, enlève la coupe de l’ignoble avec une respectable longueur d’avance, laissant bien loin derrière les célèbres docteurs ès racisme, Rosenberg et Malan. Vous lirez en 2e page le texte d’un tract que ledit Comité adresse aux habitants du 18e.

Les lecteurs du Lib ne seront pas surpris, mais avouons que l’incartade d’aujourd’hui est de taille. La faune bourgeoise se traîne elle-même dans la boue. Au lieu d’entreprendre un effort de compréhension sur le drame des travailleurs nord-africains par une documentation impartiale, ces ribauds et ces ribaudes de la rue Gustave Rouanet préfèrent la solution – combien facile – qui consiste à éluder ce douloureux problème avec un volcan d’injures et de vulgarités. Quel superbe aveu d’impuissance intellectuelle ! Et pour cause, à l’instar de tous les bourgeois pourris qui forment la cohorte des marchands du Temple, ces « sélectionnés » orgueilleux comme tous les sots, ne sont que de pauvres cerveaux rétrécis et desséchés ! D’actualité de plus en plus brûlante, le problème colonial ne sera pas résolu pour autant par de violentes diatribes, fussent-elles dans le meilleur style de la langue verte. Les opprimés de tout poil apporteront la solution révolutionnaire qui, seule, viendra à bout des junkers du colonat qui seront écrasés par l’inexorable et puissant char de l’histoire. Les temps sont révolus où les colonisés ne naissaient que pour être des « sujets loyaux », taillables et corvéables à merci, en un mot, pour croupir dans le fumier de la résignation.

Au fait, pendant que les centaines de milliers de travailleurs nord-africains se font tondre, injurier et brimer impunément, que font nos « élus », en particulier, les quinze députés eunuques du « sérail Bourbon », les Bendjelloul, Cadi Abdelkader, Bengana, etc. ? En dignes politiciens de l’époque, ils traient, eux aussi, la vache à lait pour faire leur fromage et beurrer leurs épinards. Ils ripaillent, ils plastronnent avec leurs maîtres, ils livrent nos travailleurs pieds et poings liés à la surexploitation. Et quel gré leur en a-t-on, à part une vile et peu substantielle récompense du tube digestif, sinon le plus souverain des mépris qu’ont tous les conquérants pour les traîtres qui leur livrent les clés de la citadelle ? En vérité, nous n’exprimons là aucune amertume, aucune déception, car nous n’attendons rien de ce côté-là. L’émancipation des travailleurs sera l’œuvre des travailleurs eux-mêmes, nous dit, à juste raison, l’internationale révolutionnaire. Les bourgeois, ces cochons gras qui veulent mourir de vieillesse, encore faut-il que je m’excuse auprès des porcs pour leur assimiler ces puants bipèdes, ne se laisseront pas déraciner de leurs monstrueux privilèges par les prières et les lamentations. L’action fraternellement unie des travailleurs français et nord-africains contre nos oppresseurs communs, à l’usine, sur le chantier, peut-être demain derrière les barricades, saura leur faire rendre gorge et plier le genou.

IDIR AMAZIT.


COMITE DE DEFENSE DU VOISINAGE
18e Art.

MM

Le Comité de Défense du Voisinage, dont les bureaux sont installés, rue Rouanet, vous invite à communiquer la présente à tous vos locataires

CE QUE VOS LOCATAIRES DOIVENT SAVOIR

On lit dans l’Aurore du 22 septembre 1951 :

Des « Nord-Africains » envahissent un hospice lyonnais.

Vers 19 h. 30, le 21-9-51, un agent de service au centre des « Nord-Africains » de Part Dieu à Lyon, demandait du renfort pour dégager l’entrée obstruée par de nombreux « Nord-Africains », ils voulurent pénétrer de force, ils étaient 300.

Leur intention fut de s’emparer des lits pour y coucher. Une bagarre sérieuse s’ensuivit pour s’approprier de l’hospice afin d’y régner en maître.

Deux agents furent blesses et hospitalisés.

MORALITE

Il fallait tout simplement actionner quelques mitrailleuses, ils auraient compris !

D’ici qu’un évènement semblable se produise à Paris, il n’y a pas loin !

Qu’attend donc le Gouvernement pour chasser ces salopards dans leur bled ?

Paris est pourri de « Nord-Africains » !

TOUT MONTMARTRE AUX ABOIS !