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Pierre Naville : Le bilan de la guerre en Algérie

Article de Pierre Naville paru dans Perspectives socialistes, n° 25, juin 1959, p. 3-8

VOILA plus de quatre ans que la guerre se poursuit en Algérie. Guerre qualifiée de nationale et de patriotique par le F.L.N., de rébellion et de révolte par les gouvernements français, de théâtre d’opérations de la guerre mondiale par les chefs de l’armée française, de guerre civile par certains socialistes. Quel que soit son sens, en tout cas, il s’agit d’une guerre, tout comme celle qui s’est menée au Vietnam pendant sept ans sans qu’on ait voulu le reconnaître. Bien entendu, les gouvernements français n’ont jamais admis officiellement que l’Etat fut « en » guerre, puisqu’il ne s’agit pas d’un conflit avec une puissance étrangère. Mais les conflits armés qui n’ont pas lieu entre Etats reconnus n’en sont pas moins des guerres, lorsqu’ils atteignent une certaine ampleur, et qu’ils mettent en branle des masses nationales. La France a fait la guerre au Maroc pendant des dizaines d’années, jusqu’à la « révolte » d’Abd el Krim en 1925. En Algérie, la colonisation avait été assez puissante, depuis la destruction des forces d’Abd el Kader, et après l’écrasement des révoltes de 1871, pour instaurer un état de paix fondé sur l’oppression permanente et savamment organisée de la population autochtone. Mais, depuis 1954, les chefs militaires français ont compris qu’ils avaient sur les bras une véritable guerre. Ils sortaient à peine de la guerre du Vietnam – conclue, celle-là, par une bataille dans les règles – et venaient tout juste d’éviter d’en engager une de grande envergure dans tout le Maghreb, à partir des foyers d’insurrection de Tunisie et du Maroc. Sans le retour de Mohamed V sur son trône et l’accession de la Tunisie à l’autonomie, puis à l’indépendance, il est clair que le soulèvement algérien (qui se serait inévitablement produit) aurait entraîné une lutte générale d’Agadir à Gabès, c’est-à-dire sur un front de mer et de terre de plusieurs milliers de kilomètres ; guerre d’indépendance qui aurait vite pris un tour international, et qui aurait conduit la France à accorder en bloc ce qu’elle a partiellement cédé en détail sur les deux ailes du Maghreb. Au fond, Edgar Faure et P. Mendès-France, en accordant au Maroc et à la Tunisie la quasi-indépendance, n’ont nullement « trahi » les intérêts de la puissance colonisatrice, contrairement à ce que prétendent les ultras de la colonisation. Tout au contraire ! Ils ont permis à la France d’engager la guerre d’Algérie – surtout au point de vue militaire – dans les seules conditions où elle pouvait prétendre la gagner, ou du moins l’espérer.

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Yves Dechézelles : Problème social et guerre d’Algérie

Article d’Yves Dechézelles paru dans Perspectives socialistes, n° 25, juin 1959, p. 25-28

JUSQU’A une date relativement récente, il n’existait aucun document d’ensemble faisant ressortir l’ampleur des conséquences sociales de la guerre d’Algérie. Les renseignements dont l’on disposait, si révélateurs qu’ils soient, visaient le plus souvent des faits limités dans l’espace et le temps et résultaient en général de témoignages individuels et par là-même contestables. Aussi véridiques qu’ils fussent, une grande partie de l’opinion publique, intoxiquée par la propagande officielle et toujours sensible aux arguments chauvins, demeurait sceptique. De toute manière, des gens de bonne foi avaient toujours la ressource de penser que les faits relatés étaient exceptionnels.

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Robert Bonnaud : Ni Sakiet ni Budapest

Lettre de Robert Bonnaud parue dans Perspectives socialistes, n° 9, 15 avril 1958, p. 15-16 ; suivie d’une réponse de Georges Ducaroy parue dans Perspectives socialistes, n° 9, 15 mai 1958, p. 19-20 ; puis de l’article « Ni Budapest ni Alger » paru dans Perspectives socialistes, n° 13-14, juillet 1958, p. 1-2


APRES quelque débat, le comité de rédaction de « Perspectives Socialistes » a décidé de passer des extraits importants de l’article de notre camarade Robert Bonnaud, de Marseille.

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Guy Germinal : Complot clérical et combat laïque

Article de Guy Germinal paru dans Noir et Rouge, n° 15-16, printemps-été 1960, p. 1-32.

 

 

AVANT-PROPOS

 

L‘historien Michelet, plusieurs fois cité, écrivait : « La liberté du catholicisme dans un gouvernement républicain est uniquement et simplement la liberté de conspiration. »

Il peut sembler paradoxal que la bourgeoisie conspire au sein de son propre régime alors que les représentants de la classe ouvrière en sont réduits bien souvent à lutter pour une « légalité ». Le problème se résume à savoir si l’idéal révolutionnaire peut mieux se développer dans les masses au sein d’un régime de liberté qu’au sein d’un régime de dictature…