C’est le 29 et 30 juin que siègera à Kladno, au cœur du bassin minier tchécoslovaque, la Conférence des Groupes tchèques de l’Opposition de droite. Cette Opposition qui a à sa tête Jilek, Bolen, Muna, Neurath, etc., décida de ne pas reconnaitre le Comité Central (Gottwald, Reimann) élu au 5e Congrès du Parti Communiste tchécoslovaque ; elle désigna un autre Comité Central comprenant tous les chefs de l’Opposition de droite.
Les grèves et les manifestations par lesquelles les ouvriers de Tchécoslovaquie ripostèrent à la « réforme monétaire » du 30 mai furent rapidement mises au second plan par le soulèvement du prolétariat de l’Allemagne de l’Est, survenu quelques jours après. Ce n’est certainement pas l’ouvrier de Pilsen, d’Ostrava ou de Kladno, qui éprouvera le regret de la primauté qu’il dut si vite céder à ses camarades de Berlin-Est ou de Magdebourg : le cri prodigieux « Nous sommes des ouvriers, nous ne voulons pas être des esclaves » retentit dans les rues de la capitale allemande au moment où l’ouvrier tchèque commençait à se rendre compte, au lendemain de sa révolte, que celle-ci n’avait pas eu d’écho chez les travailleurs des autres pays, qu’il avait eu tort de s’attendre à des manifestations de solidarité. Le soulèvement des travailleurs dans l’Allemagne occupée vint rompre cette solitude pénible.
Article paru dans Pouvoir Ouvrier, n° 95, février 1969, p. 1
La récupération officielle du cadavre de Jan Palach, l’étudiant qui s’est suicidé par le feu, a permis au gouvernement tchécoslovaque de sauver encore une fois la face. Mais les appels au calme qu’il adresse sans arrêt aux étudiants comme aux ouvriers s’accompagnent de plus en plus de menaces contre les « extrémistes ».
Article paru dans Pouvoir Ouvrier, n° 93, octobre 1968, p. 1 et 3
Les événements qui, depuis le début de l’année secouent la Tchécoslovaquie, ne peuvent se comprendre que replacés dans leur contexte, à savoir : les difficultés économiques et la pression des classes qui sévissent depuis plusieurs années dans les pays de l’Est européen.
Article paru dans Pouvoir Ouvrier, n° 89, mars-avril 1968, p. 5-8
Le remplacement de Novotny par Dubcek à la tête du P.C. tchécoslovaque s’est rapidement transformé en une vaste épuration de tout l’appareil dirigeant la société. Les bastions des « novotnyens » sont tombés l’un après l’autre. Limogeage de Chudik, président du Conseil National de Slovaquie, révocation du ministre de l’Intérieur Kaudna et du procureur général Bartuka, du ministre de la Défense Lomsky, du vice-président du Conseil Simunek. Finalement, c’est un nouveau gouvernement qui va être formé sous la présidence de Cernik remplaçant le stalinien Lenart. Quelques « bavures », bien sûr : fuite aux U.S.A. du général Sejna emportant des fonds et les plans militaires de l’Est, « suicide » du vice-ministre de la Défense Janko, « suicide » du vice-président de la Cour Suprême Brestransky, spécialiste en procès de haute trahison. Dans le parti lui-même, remaniement tout aussi radical : sur les dix membres du présidium du comité central, trois seulement sont restés en place : Dubcek, Cernik et Kolder.
Pour ceux qui pouvaient encore en douter, l’invasion et la mise au pas de la Tchécoslovaquie confirme, s’il en était besoin, le caractère impérialiste de l’État russe. Rappelons quand même qu’en 1939-40, à la suite de l’accord avec Hitler la Russie occupa les États Baltes, une partie de la Pologne, la Bucovine et la Bessarabie. L’agression contre la Finlande suivit. Puis à la fin de la seconde guerre mondiale ce fut le partage du monde de Yalta qui assurait à la Russie la domination de l’Europe de l’Est et d’une partie des Balkans. Depuis, l’impérialisme russe réagit brutalement lorsque ses conquêtes sont menacées. La répression de l’insurrection hongroise en 1956 est encore dans toutes les mémoires, au moins pour ceux qui ne sont pas trop jeunes. En Hongrie la bureaucratie russe défendait au surplus sa domination de classe contestée par les conseils ouvriers. Rappelons enfin que dans son affrontement avec l’impérialisme américain, l’impérialisme russe apporte un soutien mesuré aux bureaucraties nationales du Nord-Vietnam, d’Égypte, de Syrie, d’Algérie, de Cuba, etc.
Quoi de plus banal qu’une histoire d’amour, même pas le début d’une histoire d’amour.
Une caméra qui s’attarde tendrement sur des objets apparemment sans importance et qui nous guide lentement dans le monde triste, gris, monotone de Hanna. Deux mille jeunes ouvrières campées dans une banlieue de Prague au service d’une usine de chaussures, et quelques vieux bien pensants pour les encadrer. A la sortie de l’usine, il n’y a qu’une petite pluie fine pour les accompagner à travers un paysage de boue jusqu’à leur internat, pas un sourire de garçon, pas un baiser, rien, personne ; et leur journée se noie ainsi dans un ciel encore plus triste qu’elles.
Article de Jean Léger paru dans Socialisme ou Barbarie,n° 7, août-septembre 1950, p. 110-111
Dans les premiers jours de juin s’est déroulé à Prague le procès des Treize, premier grand procès politique que connaisse la Tchécoslovaquie.
Les condamnations prononcées le 8 juin ont révolté de nombreux intellectuels en France, en Autriche, en Norvège. Des télégrammes ont été adressés au Président de la République tchécoslovaque pour qu’il renonce à exécuter la sentence frappant le principal accusé : Kalandra.
L’exécution de Zavis Kalandra et de ses trois coaccusés est passée inaperçue au milieu des événements de Corée qui angoissent l’opinion mondiale : le tribunal suprême de Prague ayant rejeté l’appel, la pendaison des quatre condamnés à mort du « procès des Treize » (dont une femme) a eu lieu le mardi 27 juin 1950. Encore une date de deuil à retenir pour les socialistes libres.