Article de Christian Jung paru dans Voix ouvrière, n° 41, juillet 1965, p. 1 et 4
IL y a maintenant près d’un mois que Ben Bella a été arrêté, mais l’on chercherait vainement, dans les déclarations de Boumedienne, les raisons politiques du coup d’état. Les critiques formulées par celui-ci sont restées on ne peut plus imprécises et de tout ce qui a été dit, il ne ressort qu’une chose, c’est que dans tous les domaines, la politique de Ben Bella était « mauvaise » et qu’il convenait de lui substituer une politique « juste » !
S’IL était sans aucun doute impossible de prédire l’heure, la date et le lieu du putsch du colonel Boumédienne — sauf peut-être pour certains « privilégiés », tel le gouvernement français, que des émissaires du chef de l’armée algérienne auraient discrètement sondé sur ses réactions probables quelques jours auparavant — une telle éventualité n’était pourtant pas imprévisible.
Article paru dans le Bulletin de liaison du CEDETIM, n° 6, mai 1968, p. 10-13
INTRODUCTION
La complexité de la situation politique en Algérie nécessiterait une étude approfondie notamment de la période 1954-1962 ; en effet, le mouvement de libération nationale s’est formé alors et les problèmes politiques actuels (nature des oppositions, situation relative des « clans » dans le pouvoir) s’expliquent en grande partie par les conflits qui se sont développés pendant cette période. Une des caractéristiques essentielles de la Révolution algérienne, c’est qu’elle a été accomplie par une organisation purement nationaliste, le F.L.N., alors que le P.C.A., pourtant bien implanté et disposant de nombreux cadres, n’a rejoint la lutte qu’en 1956.
Bilan de son gouvernement, et surtout promesse pour l’avenir, c’est l’essentiel du discours de Boumedienne, le 1er novembre, anniversaire de l’insurrection. Le bilan étant très maigre, c’est sur l’avenir que le président algérien s’est surtout appesanti : planification, industrialisation, réforme agraire, réforme départementale, diminution de l’écart de développement entre les régions, résorption de l’analphabétisme, développement et démocratisation de l’éducation, renforcement de l’autogestion… plus la service militaire obligatoire, le tout « dans l’ordre et la discipline », telles sont les perspectives tracées par un discours qui ne fait pas appel aux masses pour réaliser ce programme, mais qui leur demande de faire confiance au gouvernement « avec esprit de sacrifice ».
Article de Montserrat paru dans Le Monde libertaire, n° 132, mai 1967, p. 8-9
En tant que libertaires, nous ne pouvons pas rester indifférents à la révolution algérienne. C’est pourquoi profitant de mes vacances, je me suis rendue en Algérie pour voir de près quelles en étaient les réalisations quatre ans après l’indépendance. Je ne prétends pas vous donner des connaissances économiques, sociologiques précises. Mais simplement un aperçu de ce que j’ai observé, vu, et entendu, au cours de cinq semaines de vacances. L’article est donc une simple énumération de ce que tout touriste peut apprendre au cours d’une promenade dans une casbah, au cours d’une conversation avec le chauffeur d’un car, ou avec un garçon de café, ou lors d’un séjour dans une auberge de jeunesse. J’ai seulement tenté de porter un jugement libertaire sur ces divers clichés. D’ailleurs ils traduisent mieux que toute étude, ce qu’est véritablement l’Algérie actuelle, quelles sont ses aspirations futures. Ces clichés nous amèneront à parler entre autres, du rôle considérable de la religion, qui détermine la condition des femmes algériennes, des efforts faits sur le plan de la scolarité, du malaise social et du chômage, enfin de la « fameuse autogestion algérienne ».
J’avais fait deux voyages en Algérie « française », en 1936 et 1947. J’avais, de plus, fait une courte escale à Alger, en pleine période de combats, revenant d’Egypte en 1956. J’ai vu cette fois-ci la République algérienne, démocratique et populaire. Elle se veut socialiste. J’avoue qu’en la parcourant en dehors de tout circuit guidé, je n’ai pas très bien vu en quoi elle était socialiste. Peu de ressemblance même avec le régime des pays de l’Est. La densité des autos, par exemple, est aussi forte que dans les pays capitalistes. Le petit commerce est aussi important qu’autrefois : la différence est que les boutiques manquent de bien des produits d’usage courant. On voit les mêmes foules misérables qu’auparavant, les mêmes grappes humaines se bousculant dans les bureaux des autocars pour obtenir une place. La pénurie d’eau est grande, et partout, il y a des coupures, de jour ou de nuit.
Article paru dans Pouvoir ouvrier,n° 88, janvier-février 1968,p. 1-5
UNE NOUVELLE ETAPE AU VIETNAM ?
Après l’incident du « Pueblo », l’offensive générale du Vietcong vient de mettre en évidence les limites de la puissance américaine en Asie. La prise simultanée des villes, l’occupation partielle de Saïgon, l’attaque et parfois la destruction des bases américaines, l’effondrement de l’administration et de l’armée sud-vietnamiennes révèlent l’échec total des plans politico-militaires de Washington. La pacification a vécu : le Vietcong est comme « le poisson dans l’eau » au sein de la population civile ; les bombardements du Nord n’ont ni brisé le moral de Hanoï ni empêché le passage d’armes lourdes et de troupes vers le Sud.
Textes publiés dans L’Internationale,n° 37, octobre 1965, p. 1, 4 et 5
LEs vagues d’arrestations massives qui ont lieu actuellement en Algérie à l’encontre des marxistes-révolutionnaire, de nombreux éléments de l’ex-PCA et de militants de l’ORP sont les signes avant-courreurs d’une répression d’envergure contre les masses et leurs conquêtes, contre les syndicats et l’autogestion. Après avoir « démantelé » l’avant-garde des militants d’opposition par les « grandes purges » de septembre, le pouvoir bureaucratique de Boumediene se trouve désormais directement confronté avec les organisations de masses, avec les étudiants et surtout avec l’U.GT.A., seule organisation de masse de la classe ouvrière. Le fait que la plupart des cadres conscients de l’UNEA, de la JFLN et du FLN aient été arrêtés, ou aient pris la fuite, montre que le pouvoir a décidé de détruire tous les foyers potentiels d’agitation et d’opposition pouvant faire naître des centres incontrôlés de direction. Si jusqu’à présent l’UGTA semble avoir échappé à la répression, cela tient à l’alliance tactique passée par la Centrale avec le secrétariat exécutif du Parti. Mais cette alliance ou ce « soutien » ne peuvent durer longtemps. Déjà le N° 2 de Révolution et Travail ne fait plus mention du secrétariat exécutif, et il semble que le N° 3 ne paraisse pas. Les congres prévus sont reportés ; le moment de la rupture approche entre le pouvoir et l’UGTA. L’envergure de la répression, l’attaque des libertés syndicales et de l’autogestion sur une grande échelle indiquent qu’un changement qualitatif dans les rapports entre la bureaucratie au pouvoir et les masses est en train de s’opérer en Algérie.
Article d’Henri Dumoulin paru dans L’Internationale,n° 36, septembre 1965, p. 6
Notre numéro de juillet ainsi que le numéro 25 de Quatrième Internationale ont été saisis à Alger. Nous ne sommes d’ailleurs pas les seuls organes dans ce cas. Même Le Monde, qui avait publié des articles de Legris favorables au régime de Boumedienne, s’est vu saisir lorsqu’il publiait, à titre informatif, des textes d’opposants aux fauteurs du coup d’Etat du 19 Juin. Les saisies avaient d’ailleurs commencé avec le bulletin de Prensa Latina lorsqu’il avait publié le remarquable discours de Fidel Castro sur le coup d’État d’Alger. Ces saisies caractérisent la « démocratie » du nouveau régime.
Dossier paru dans L’Internationale, n° 35, juillet-août 1965, p. 4-5
Un pouvoir personnel sans liens avec les masses
DU 19 juin, jour du coup d’Etat d’Alger, il a fallu attendre jusqu’au 5 juillet, soit plus de quinze jours, pour que le dirigeant du coup d’Etat, Boumedienne, par le truchement de Radio-Alger, fasse connaître et la composition du « Conseil national de la révolution » qui aurait pris l’initiative de l’opération et le programme qu’il entend suivre comme chef du gouvernement.
Article paru dans Le Prolétaire, n° 242, 23 avril au 6 mai 1977, p. 6
Les statistiques de la FAO indiquent que si la production agricole en Algérie s’élevait à l’indice 100 sur la moyenne des années 1961-1965, elle est seulement passée à l’indice 110 pour la moyenne des années 1970-1974. Mais, comme dans le même temps la population a cru considérablement plus vite, la production (agricole comme alimentaire) par tête d’habitant est passée de l’indice 100 à l’indice 85. De plus, pendant les années 69 à 71, l’agriculture algérienne, au lieu de progresser de 3 % l’an selon les vœux des planificateurs « socialistes », a bel et bien diminué au rythme de 1 % l’an.
Cent trente-deux ans de sujétion coloniale, 30.000 morts à Sétif, en 1945, sept ans et demi d’une guerre civile qui a fait un million et demi de morts, les ratonnades, les ghettos de la métropole, la faim, l’analphabétisme, les ravages de la tuberculose ; voilà ce que les masses algériennes ont subi. Elles se sont battues avec l’acharnement, l’héroïsme que l’on sait, contre un impérialisme particulièrement féroce et habile. Aujourd’hui les Algériens ont le sentiment d’avoir été trahis. Ils se battaient pour un peu plus de pain, un minimum de bien-être. Ils parlaient même de construire une société d’un type nouveau que, naïvement, ils appelaient « socialisme ». En fait, ils ont instauré un régime qui sue par tous les pores la corruption et le terrorisme policier; ils ont porté au pouvoir des Ben Bella et des Boumedienne qui étalent largement leur morgue de nouveaux riches. Les masses algériennes sont retombées dans une sorte d’hébétitude. Les factions bourgeoises s’entre-déchirent et la vie politique reste marquée par la violence. Le prolétariat et la paysannerie pauvres n’attendent plus rien de la politique en général. L’émigration vers l’Europe se poursuit et augmente même. La misère est aussi grande sinon plus qu’aux beaux jours de l’ère française.
Article paru dans Le Prolétaire,n° 29, février 1966, p. 2 et 4
Pendant que Ben Bella paradait sur le devant de la scène politique, nous avons vu quel était l’enjeu social des luttes de classes qui se livraient en Algérie. (Voir notre numéro précédent).
Dans la nuit du 14 au 15 décembre, quelques unités de chars font route vers Alger, avec à leur tête Tahar Zbiri, chef d’état-major de l’A.N.P., et plusieurs officiers. Elles sont stoppées à El-Affroun, après intervention de l’aviation ; le chef de la première région militaire Saïd Abid se suicide dans des conditions pour le moins obscures (certains prétendent même qu’il aurait été fusillé tout à fait réglementairement). Voilà pour les faits les plus spectaculaires et les plus connus qui ont marqué la crise. Simple épisode d’une bataille pour le pouvoir au sein de la même famille, celle qui avait éliminé Ben Bella le 19 juin 1965, ou bien crise plus profonde ? Nous considérons, pour notre part, qu’il n’y a pas de lutte pour le pouvoir, même au sein d’un appareil très bureaucratisé, qui se situe en dehors de la dynamique des forces sociales, de leurs luttes, et du rapport des forces à un moment déterminé. Aussi, nous analyserons la signification de cette crise à la lumière de l’évolution de l’Algérie depuis 1962, et plus spécialement de l’évolution des rapports entre les classes depuis la crise du Moyen-Orient.
Le coup d’Etat du colonel Boumedienne constitue indiscutablement un tournant vers ladroite dans le développement de la révolution algérienne. Les principales conquêtes de la révolution, en particulier l’institution de l’autogestion ouvrière dans les entreprises socialisées, sont maintenant gravement menacées.
Le coup d’Etat militaire d’Alger du 19 juin met fin à l’alliance entre l’aile du FLN dirigée par Ben Bella, orientée vers le socialisme et liée aux masses au moyen de l’autogestion, et « l’armée des frontières » dirigée par Houari Boumedienne favorable à un « socialisme arabe » islamique. C’est cette alliance qui avait permis à la combinaison Ben Bella-Boumedienne d’écarter l’ancienne équipe du GPRA dans l’été 1962. Le coup d’Etat constitue une grave atteinte à l’aile gauche de la révolution algérienne et met en danger l’acquis principal de cette révolution, l’autogestion ouvrière des entreprises nationalisées.
Article de Saïd Akli paru dans Inprecor, n° 38, 16 novembre 1978, p. 19-25
La politique pratiquée par les staliniens en Algérie a déjà « fait ses preuves » au Soudan, en Egypte, en Syrie et en Irak, se soldant régulièrement par des bains de sang. Or, l’indépendance de classe du prolétariat, impliquant l’existence d’organisations communistes, est une condition indispensable pour résoudre la crise de la société algérienne ou profit des masses populaires.
Article paru dans Tribune algérienne, n° 17, octobre-novembre 1978, p. 9-12
Le mois d’avril 1978, DALILA, l’épouse de Denis MASCHINO, était droguée, enlevée du Canada, emmenée en Algérie par son frère MESSAOUD ZEGHAR. Depuis elle est séquestrée en Algérie.
Le débat caporalisé que voulait imposer Boumedienne autour de son projet de Charte a été saisi par les étudiants d’Algérie comme l’occasion de dresser leurs revendications dans un affrontement politique contre le régime de Boumedienne. Dans la situation de crise politique qui règne aujourd’hui à Alger, la grève des étudiants est un signe avant-coureur de la plus grande importance.
La Journée du 8 Mars a été célébrée avec éclat à Alger : meetings, réceptions, projections de films, double page dans « El Moudjahid » et quelques sorties à la campagne au titre du Volontariat. Des discours, des flons-flons, des encouragements, un peu d’embrigadement, quelques photos… et 8 Mars a été expédié. Demain, comme aujourd’hui, la condition de la femme algérienne restera inchangée.
Les dockers du port d’Alger viennent de faire une grève d’une semaine du 8 mai 1977 au 14 mai. Leur détermination est d’autant plus grande qu’on connaît quel déchaînement répressif entraîne une grève en Algérie !
Dossier paru dans le Bulletin de liaison, n° 6, février 1966
APPEL AUX ETUDIANTS
Le 29 janvier, un mouvement de protestation déclenché par les étudiants d’Alger à l’occasion de l’ « affaire Ben Barka » s’est rapidement transformé en une manifestation d’hostilité à l’égard du pouvoir de Boumedienne. Les 4.000 manifestants se sont heurtés à une répression policière d’une extrême violence. De nombreux étudiants ont été blessés, tandis que d’autres étaient arrêtés. Aussitôt, le secrétariat exécutif du pseudo-F.L.N. a décidé la dissolution de la section d’Alger du syndicat des étudiants (qui groupe 8.000 étudiants environ). Au cours de la nuit, plusieurs dirigeants de l’UNEA étaient enlevés en pleine Cité Universitaire.
Article paru dans le Bulletin de liaison, organe du Comité national de défense de la révolution, n° 7, avril 1966, p. 10-12
Les problèmes majeurs qui se posent à l’humanité de notre temps sont dominés par la constatation d’une situation intolérable due à la division de notre planète en deux mondes opposés : celui de la faim et celui de l’abondance. Ce fossé, qui chaque année s’approfondit un peu plus, constitue la ligne de partage qui dresse d’une part les trois quarts du genre humain : exploités manquant du minimum vital et dont le nombre augmente vertigineusement et, d’autre part, la minorité de nantis qui concentre entre ses mains des moyens de production colossaux, des richesses fabuleuses et les leviers de commande politique.
Article paru dans PRS Info, n° 7 – Nouvelle série – 19 décembre 1977, p. 31-32
Le 30 mars 1977, les ordonnances 76 – 110 et 76 – 111 portaient à 27 ans la période pendant laquelle les Algériens sont soumis aux obligations militaires. Le texte ci-dessous relate les réactions d’appelés encore sous les drapeaux à cette date.
Article paru dans Jeune Taupe,n° 24, janvier-février 1979, p. 6-8.
Depuis un mois, les médias ont consacré plus de temps et de pages à l’Algérie qu’ils ne l’avaient fait en quinze ans de régime boumédienniste. L’Algérie, cette nation « progressiste » était alors un sujet tabou, pour la droite comme pour la gauche, et dont on ne parlait qu’à l’occasion de ses rodomontades internationales (affaire du Sahara, nationalisation du pétrole, etc…). Le chef d’Etat algérien, le colonel Houari Boumédienne, s’en va doucement mais sûrement et l’on s’aperçoit qu’il ne laisse pas une situation florissante derrière lui tout comme l’on est « choqué » de voir une population pour le moins indifférente au spectacle de la survie artificielle de « son » ex-Raïs, attendant avec curiosité que les cardinaux du « conseil de la révolution »désignent le nouveau pape de l’Algérie.
« Interview d’un ancien militant du M.N.A., qui fut l’un des créateurs de l’Union syndicale des travailleurs algériens (USTA), la première organisation syndicale algérienne », parue dans Tribune algérienne, n° 7, juillet 1976, p. 3-5
T.A. : Que penses-tu de la situation politique actuelle, de la discussion sur la Charte ouverte par le pouvoir ?
R. : La situation politique en Algérie est arrivée à un tournant décisif. Pour la première fois depuis le coup d’état militaire du 19 juin 1965, Boumedienne qui a fait de l’Algérie sa propriété personnelle, et de la lutte du peuple algérien depuis l’Etoile Nord Africaine une simple introduction à son régime d’arbitraire, a été contraint, parce que son régime n’avait aucune assise dans la classe ouvrière, la paysannerie, a été contraint, de tenter de mystifier une fois de plus le peuple algérien avec sa campagne sur la Charte.
L’Islam a fortement imprégné le peuple algérien à travers son histoire. On sait le rôle de l’aristocratie religieuse des CHORFA sous Abdelkader, celui de la confrérie des TAÏBIYA, dans le soulèvement de l’Ouarsenis en 1845, celui des RAHMANIYA dans la grande insurrection de Kabylie en 1871… Mais jamais en Algérie, l’Islam n’a été structuré comme une église, avec une hiérarchie disposant d’un immense patrimoine foncier et étroitement lié à l’appareil d’état.
Interview de Messali Hadj recueillie par Paul Roos, Oise Actualités, 21-22 octobre 1966.
Habitant maintenant une modeste maisonnette dans un quartier ouvrier de Lamorlaye, le leader nationaliste algérien Messali Hadj, chef du P.P.A. – qui fut, rappelons-le, le premier à réclamer l’indépendance pour l’Algérie et ce au début des années 20 – a bien voulu rompre un silence de plusieurs mois pour répondre aux questions que nous sommes allés lui poser sur deux sujets d’une brulante actualité : l’affaire Ben Barka et les dissensions au sein du gouvernement de l’Algérie d’aujourd’hui.
Article d’Al Bourquii paru dans Spartacus, n° 13, mars-avril 1979, p. 5-6
En quinze jours, la presse et les medias auront consacré plus de place à l’Algérie qu’ils ne le firent en treize ans de régime boumedieniste. Hier il fallait jouer des pieds et des mains pour s’informer sur la situation algérienne. Aujourd’hui on sait pratiquement « tout » sur les difficultés du pays et le mécontentement de la population : crise économique, démographique, faillite de la réforme agraire, maigre bilan de la politique d’industrialisation.
Article paru dans Le Prolétaire, n° 28, janvier 1966
Dans une résolution adoptée après le coup d’Etat de Boumedienne, le C.C. du P.C.F. déclarait : « Le comité central, en se gardant de toute ingérence dans les affaires intérieures de l’ Algérie, constate que la Constitution a été violée et qu’un coup sérieux a été porté à la cause algérienne, ainsi qu’au mouvement de Libération nationale des peuples ». Ne nous étonnons pas de ce « respect » du P.C.F. pour une Constitution typiquement bourgeoise, ni de ses protestations de « non-ingérence ». Cela répond parfaitement au légalitarisme qu’il affiche depuis des dizaines d’années. Ne nous étonnons pas davantage qu’il déplore la chute d’un pouvoir qui, en novembre 1962, décrétait la dissolution du « Parti communiste d’Algérie », c’est-à-dire d’un parti-frère : Moscou n’avait-elle pas accueilli le « socialiste » Ben Bella comme un « ami », un « camarade » et comme » « le plus grand révolutionnaire d’Afrique » ? On n’est pas plus royaliste que le roi… Mais voyons quelle est donc cette « cause algérienne » que le P.C.F. juge si gravement compromise. Pour nous qui avons déjà vu Ben Bella l’invoquer contre les dockers algérois en grève, les choses sont claires : ça n’était plus la cause d’un mouvement révolutionnaire, mais une raison d’Etat, un principe d’ordre bourgeois, et dès lors, un Boumedienne est à priori tout aussi indiqué qu’un Ben Bella pour la défendre et l’illustrer. Mais le P.C.F., lui, ne croit pas aux faits : il croit aux mots ; pour lui, le « programme » du benbellisme est, et reste celui de la Charte d’Alger, approuvé en avril 1964 au 1er Congrès du F.L.N. : « ne pas laisser compromettre la victoire historique sur l’impérialisme et mettre en cause l’option socialiste » « assurer dans la liberté le développement de l’Algérie nouvelle, démocratique et progressiste ». C’est sa phrase socialiste, qui attache le P.C.F. au souvenir du benbellisme. Ce que valait cette phrase, nous allons le voir.
Comme pour venger l’affront qu’il lui infligea durant quinze années, en combattant ses troupes avec peu de moyens et dans des conditions nettement défavorables, la France n’a retenu d’Abdelkader que le souvenir de sa reddition ; de même qu’elle a prétendu en avoir fait un « ami fidèle ». Si l’oubli de ce personnage peut s’expliquer en partie par le temps, la France officielle nous rappelle aujourd’hui qu’elle a toujours eu la mémoire courte, l’amitié mesquine et la fidélité trompeuse à l’égard de ceux qui l’ont servie loyalement. Et, par exemple, ne se souvient de l’existence des harkis, autres amis fidèles, que le temps d’une campagne électorale.
Article publié dans La Charte, organe du F.L.N. clandestin, Rassemblement Unitaire des Révolutionnaires (RUR), n° 35, février-mars 1973, p. 15-18.
Lors de la journée internationale de la femme (8 mars), BOUMEDIENNE s’adressant aux militantes de l’Union Nationale des Femmes Algériennes (UNFA) devait notamment déclarer : « Au nom du pouvoir révolutionnaire, je proclame que nous sommes pour un progrès qui ouvre devant la femme toutes les portes menant à une participation effective, afin qu’il lui soit permis d’accéder pleinement à la place qui lui revient dans tous les domaines et à tous les niveaux ».
Tribune du Comité « Riposte à la répression en Algérie » publiée dans Rebelles, n° 2, mai-juin 1982, p. 12
Lorsqu’on parle de l’Algérie , on pense tout de suite à la guerre de libération nationale, à ses positions « antiimpérialistes », au « socialisme » et à la « mobilisation du peuple contre le sous-développement ». Aussi parler de répression en Algérie, provoque t-il des réactions d’étonnement, de doute : aucun journal n’en parle, très peu d’organisations politiques ou spécialisées sur la question n’en font état, alors même qu’elle est dénoncée, pour d’autres pays, en long, en large et en travers.
Article paru dans Jeune Taupe, n° 20, avril-mai 1978, p. 17-18.
Contrairement aux autres pays arabes, l’Algérie apparait comme le seul Etat où il ne se « passerait rien ». Une véritable conspiration du silence sur la situation sociale de l’Algérie s’est installée, scellée par l’alliance de tous les organes d’information, de la droite à l’extrême gauche (cf. par exemple « Libération »). Pour ce qui est du journal « Le Monde », il faut savoir lire entre les lignes pour se rendre compte de l’existence de « malaises ». On s’épanche d’autant plus facilement sur le conflit du Sahara Occidental (où l’Algérie joue un rôle de premier plan (1) ) que l’on tait la situation interne de l’Algérie.
Article paru dans Courant alternatif, mensuel édité par l’Organisation communiste libertaire, n° 37, juin 1984, p. 12-13.
A l’heure où il devient de bon ton de parler de la « montée de l’intégrisme musulman » – même C.A. s’y met – il convient d’être prudent dans l’analyse d’un phénomène qui nous est très étranger. Deux dangers : le premier, la généralisation : puisqu’il y a montée de l’intégrisme musulman, la montée serait le fait de tous les pays islamisants ; le second, le manque de rigueur dans la définition du mot « intégrisme ». L’intégrisme n’est pas la pratique ou la présence d’une religion ; il s’agit bien de fanatisme et de sectarisme. En ce sens, l’Algérie me parait une situation particulière dans le monde musulman ; situation intéressante à étudier, tout en restant prudent quant à l’analyse très fragile puisque sujette à remise en question permanente (l’Algérie n’est pas à l’abri d’une flambée d’intégrisme).
Article paru dans Pouvoir ouvrier, n° 73, septembre-octobre 1965, p. 4-7
Monsieur Boumedienne est scandalisé. On n’a tout de même pas fait une révolution nationale pour que des étrangers viennent vous donner des leçons ! Pourquoi imaginez-vous qu’ils se sont battus, lui et ses compères militaires ?
« Notre vérité, c’est l’Algérie, d’un territoire de plus de 2 millions de km2 , d’une population de 12 millions d’habitants, d’une histoire propre à elle, d’une langue arabe et d’une religion musulmane » (El djeich, organe de l’Armée Nationale Populaire, n° 28, août 1965).
Article paru dans Pouvoir ouvrier, n° 72, juillet-août 1965, p. 1-5.
Le renversement de Ben Bella a surpris tout le monde, y compris les Algériens. Mais ce qui peut étonner davantage, c’est l’absence de riposte. Il y a eu des réactions mais pas de contre-offensive d’un parti ben belliste. C’est qu’il n’y avait pas de partisans de Ben Bella. Le pouvoir de ce dernier était fait de prestige et de népotisme. Il n’avait réussi à construire ni un État ni un parti.
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