Article paru dans Le Prolétaire,n° 408, octobre-novembre 1990, p. 3
La ville de Vaulx-en-Velin dans la banlieue de Lyon était un modèle de réhabilitation urbaine, d’aménagements urbains, d’intégration sociale ; faisant partie de ces opérations lancées dans toute la France après les affrontements des Minguettes, autre banlieue lyonnaise, au début des années 80, elle pouvait à bon droit être considérée comme une vitrine de la gestion social-démocrate des tensions sociales dans les quartiers populaires. La mairie, PCF, faisait plus dans le social que ce qu’aurait fait une mairie PS, forcément orientée vers les couches moyennes. La dernière réalisation, spectaculaire, était précisément destinée aux jeunes de la ville : un magnifique mur d’escalade, financé par la municipalité, la Région et l’État, qui avait été inauguré en grande pompe le 29 septembre. Le maire de Lyon était venu lui-même pour l’inauguration et il avait prononcé un discours où il vantait la « recette exemplaire » de Vaulx-en-Velin.
Peut-être vous en étiez-vous aperçu, mais C.A. ne colle pas toujours de très près à l’actualité… De par notre fonctionnement, et puis aussi dans le cas du sujet qui suit à cause des difficultés à avoir des informations dépassant le fait-divers. Difficultés dues au fait qu’on ne peut pas être partout (un jour, peut-être…) et que les jeunes immigrés n’ont pas une attitude très poussée d’échanges avec la presse du mouvement…
Article paru dans Le Prolétaire, n° 372,22 avril au 19 mai 1983, p. 3
Chômage, misère, racisme, persécutions policières sont les raisons profondes de la tension qui règne dans les banlieues des grandes villes ; quand la crise économique dure et s’approfondit, quoi de plus intéressant pour les bourgeois et leurs larbins que de trouver un bouc émissaire au sein même de la classe ouvrière : le responsable du chômage n’est plus le capitalisme, c’est le travailleur étranger. Le sentiment d’insécurité suscité par l’aggravation des conditions de vie, l’instabilité de l’emploi est habilement détourné vers la revendication d’une répression accrue contre la petite délinquance montée en épingle par les médias parce qu’elle est le fait d’éléments issus des couches les plus exploitées.
Article signé A. B. paru dans Sans Frontière, n° 31, spécial juillet-août 1981, p. 9
Dimanche 12 juillet, le poste de police qui avait été installé en catastrophe, la veille, en plein quartier a disparu. En début de soirée, un car de CRS qui patrouille dans la ZUP, s’arrête près du quartier Monmousseau et des CRS montent pour vérifier les identités. Ils embarquent deux jeunes qui n’avaient pas sur eux leurs papiers et les conduisent dans un coin sombre, près du cimetière. Après leur avoir flanqué une paire de claques, ils les relâchent. Mesquin. « C’est l’alcool qui m’a frappé » dira l’un d’eux.
Dans la banlieue lyonnaise, ça bouge. Pour une fois, ce sont les jeunes des familles d’immigrés qui font parler d’eux, ceux qui sont nés en France, mais qui ne sont ni d’ « ici », ni d’ « ailleurs », la « deuxième génération », comme on l’appelle.
Article paru dans Lutte ouvrière,n° 687, 1er août 1981, p. 12
Depuis plusieurs mois, dans la ZUP des Minguettes, des jeunes du quartier s’opposent de plus en plus aux policiers. Dans la nuit de mardi à mercredi 22 juillet, à la suite d’un cambriolage commis par trois d’entre eux, l’intervention des policiers a provoqué la révolte des jeunes présents ainsi que de certains habitants du quartier qui ont assailli les flics à coups de pierres.
Texte paru dans I.R.L., journal d’expressions libertaires, n° 30, novembre 1979, p. 8
PRISE DE POSITION DES ÉQUIPES DE PRÉVENTION DE LA SLEA (Société Lyonnaise pour l’Enfance et l’Adolescence).
PRÉALABLE
Face à une sollicitation réitérée des organismes de presse, des corps constitués, comme des personnes ordinaires, nous, équipes de prévention de la S.L.E.A, présentes sur les quartiers de la Grappinière, Vaulx-en-Velin, Saint-Jean Villeurbanne, les Buers, Part-Dieu-Guillottière, acceptons d’évoquer collectivement notre position par rapport à la violence.
La Grande Bretagne a été secouée par une vague d’affrontements. Combats de rue, cocktails molotov et barricades : telle était l’image du pays où l’on déclarait il y a peu : « de telles choses ne peuvent arriver chez nous …». Nous avons rencontré un membre de groupe de Londres de l’organisation communiste libertaire SOLIDARITY et lui avons demandé ce qu’il pensait des derniers évènements survenus dans le pays de la « loi et de l’ordre » de Mme Thatcher. Sa vision des conséquences politiques de ces évènements contraste avec la présentation un peu triomphaliste qui a été faite dans certaines publications libertaires.
Article de Brian Grogan paru dans Inprecor, n° 107, 5 août 1981, p. 7-9
A défaut de discipline parentale, les flics… (DR)
Au cours des deux dernières semaines, les principales villes de Grande-Bretagne ont été le théâtre de la révolte à grande échelle de la jeunesse contre le gouvernement conservateur. Les causes immédiates de ces explosions ont été le harcèlement policier ou les provocations menées par des membres des organisations fascistes. Au cours des événements, la jeunesse a édifié des barricades, jeté des pavés et des cocktails molotov contre la police et pillé les biens de consommation contenus dans les succursales des chaînes de magasins, toutes scènes qui rappelaient les événements d’Irlande du Nord.
Article de Dave Hayes paru dans Inprecor, n° 106, 20 juillet 1981, p. 3-4
Comme aux États-Unis, des émeutes de la misère, du chômage et de la peur (DR)
FOUTEZ le camp ! Écrivez toute la merde que vous voulez. Dites que c’est politique, ou quelque chose comme ça. Ça pourrait tout expliquer. Qu’est-ce que vous foutriez, vous, si vous habitiez ici ? On n’a besoin de personne pour nous dire la merde que c’est ici. Quelquefois, parmi tous ceux qu’on connaît, y en a pas un qu’a trouvé du travail ! Est-ce que vous habiteriez dans ces pièges à rats ? »
(Interview de jeunes émeutiers, The Observer, 12 juillet 1981.)
Article signé Jo. Swift paru dans I.R.L., journal d’expressions libertaires, n° 40, été 1981, p. 16-19
« La couleur n’a rien à voir là-dedans. Je crois que c’était une question d’autorité, de réaction à l’autorité ». (Avril 1980, un pasteur de Bristol après les émeutes noires).
« Je me fous de ce qu’on dit, seulement un être humain civilisé et normal ne se balade pas avec un cocktail molotov à la main… Ils riaient tout le temps… J’espère seulement qu’ils ont une conscience ». (Avril 1981, l’agent Haggis, 24 ans, à l’hôpital).
Après les émeutes de Bristol et de Brixton (banlieue de Londres) en mai dernier, la bourgeoise, à travers sa presse, avait voulu nous faire croire que cette série d’émeutes était due à un « conflit racial » entre les communautés, ce qui lui évitait de dévoiler la situation matérielle déplorable dans laquelle vit toute une frange de la classe ouvrière anglaise. Mais les violents affrontements entre les jeunes et la police à Toxteth (quartier de Liverpool) du 4 au 6 juillet ont montré que les jeunes, qu’ils soient Anglais, Antillais, Pakistanais, Guyanais, Jamaïcains ou Indiens, en ont assez de supporter les frais de la crise économique profonde qui touche le pays. Les bourgeois ont bien été obligés d’avouer que ces affrontements étaient dus à une situation matérielle terrible et éventuellement au chômage.
Article de François Rouleau paru dans Lutte ouvrière, n° 690, 22 août 1981, p. 8
Les jeunes face à la police à Manchester au cours de l’une des émeutes de l’été. (AFP)
Le 15 août, des milliers de manifestants ont envahi les rues de Liverpool pour exiger la démission du chef de la police locale, Kenneth Oxford, individu notoirement réactionnaire et raciste. Cette manifestation était organisée par le comité de défense de Liverpool 8 (nom officiel du quartier de Toxteth où se sont déroulées les émeutes du début juillet) qui regroupe des représentants des organisations communautaires indiennes et jamaïcaines ainsi qu’un certain nombre de militants syndicalistes ou membres de la gauche travailliste. Mais pour la première fois depuis le début des émeutes, elle avait reçu le soutien officiel du Parti Travailliste et de plusieurs syndicats.
Article de François Rouleau paru dans Lutte ouvrière, n° 685, 18 juillet 1981, p. 9
Parties le 4 juillet de Southall, dans la banlieue londonienne, les émeutes ont gagné en dix jours pratiquement toutes les grandes villes industrielles d’Angleterre. A l’heure où nous écrivons, seuls le Pays de Galles et l’Écosse n’ont pas été touchés. Du nord au sud du pays, d’est en ouest, des dizaines de milliers de jeunes se sont affrontés avec la police, à coups de barres de fer, de cocktails molotov, ou simplement de pierres, détruisant et dévalisant au passage des milliers de vitrines, de magasins, et assiégeant des dizaines de commissariats de police. Au total, plus de 75 villes ont connu de tels affrontements, dont un quart environ dans la gigantesque agglomération de Londres.
Article paru dans Lutte ouvrière, n° 684, 11 juillet 1981, p. 16
Toxteth après deux jours d’émeute. (Ph. UPI)
Un policier de Liverpool en action. (Ph. UPI)
Pendant cinq jours, trois des plus grands centres industriels de Grande-Bretagne — Londres, Liverpool et Manchester — ont été le théâtre de violentes émeutes. Dans un cas, à Southall dans la banlieue de Londres, la cause en a été une provocation raciste dans les autres, ce furent des réactions spontanées de la population contre les brutalités policières. Mais partout, le véritable arrière-fond de ces émeutes, c’était bien le chômage (il y a longtemps que le cap des trois millions de chômeurs a été dépassé en Grande-Bretagne), la misère et les rancœurs accumulées.
Article de François Rouleau paru dans Lutte ouvrière, n° 672, 18 avril 1981, p. 15
D’un côté, les jeunes Jamaïcains en colère, auxquels sont venus se joindre des habitants, blancs ou noirs, des environs ; de l’autre, la police en action : ce sont 4 000 policiers qui ont déferlé le 11 avril sur Brixton. (AFP)
Lundi 11 avril, la colère a éclaté à Brixton, dans la banlieue de Londres. Pendant trois jours, des affrontements ont opposé des centaines, peut-être même des milliers de manifestants, en majorité jamaïcains, aux forces de police qui quadrillaient la ville, prenant tour à tour la forme de véritables batailles rangées ou d’escarmouches isolées, entrecoupées d’accalmies plus ou moins durables.
Toxteth, July 1981: ‘Each evening, some of us would walk out into Parliament Street in balaclavas.’ Photograph: ANL/Rex Shutterstock (Source)
I – VIVENT LES EMEUTIERS, MA MÈRE, VIVENT LES EMEUTIERS…
3 millions de chômeurs, soit plus de 11 % de la population active (40 à 60 % des jeunes – noirs et blancs – dans certaines régions), le Royaume-Uni de Gde-Bretagne et d’Irlande s’enfonce de plus en plus dans sa DECADENCE.
Article paru dans Jeune Taupe, n° 37,juillet-août-septembre 1981,p. 5-7
11 April 1981, during the 1981 Brixton riot in London, police with riot shields line up outside the Atlantic Pub, on the corner of Atlantic Road and Coldharbour Lane, Brixton. The photographer wrote: « In April 1981, around lunchtime, I stepped out of a shop in Brixton and a car burst into flames some 20 yards up the street, marking the start of the worst episode of civil disobedience Britain had seen in over 100 years. These are some of the pictures from that day. » « Police with riot shields block the access to the main area of rioting. Up to this point they’d been using dustbin lids, sheets of ply, anything they could lay their hands on for protection. These riot shields had only just arrived. » (Source)
Durant les semaines précédant les émeutes, la police ne cessait d’investir les rues de Brixton. Le vendredi 3 avril le quartier est bouclé. Pendant toute la semaine « l’opération Swamp 81 » (I) s’était déroulée avec pour conséquence l’arrestation et la fouille systématique d’environ 1 000 personnes – surtout des jeunes noirs.
La publication en Amérique du livre de Djilas, paru en France sous le titre : « La nouvelle classe dirigeante », a valu à l’auteur d’être emprisonné chez Tito. André Prudhommeaux est venu le 20 avril nous présenter ce livre, dont il a établi la version française, et ses propres réflexions.
Article signé Un Russe hérétique paru dans La Révolution prolétarienne, 16e année, n° 4(305),juillet 1947, p. 1-4
Il s’agit de « J’ai choisi la liberté », de V.-A. Kravchenko. C’est simplement un témoignage sur la Russie actuelle et aussi sur les années qui ont amené cette Russie à devenir ce qu’elle est. Il ne faut pas se laisser arrêter par la lourdeur, les gaucheries, les redites, pas plus que par les maladresses voulues d’une traduction intentionnellement trop fidèle (et qui aussi, parfois, méconnaît, il faut bien l’avouer, quelques termes français de l’histoire des luttes ouvrières). Mais celui qui a un peu d’âme ne remarquera pas ces bavures en présence des angoisses que soulève la déposition de Kravchenko et qui est essentielle en ceci : aujourd’hui, sur le sixième du globe terrestre, dans l’Empire russe restauré, le travail forcé, le bagne dans son sens le plus direct est appliqué à des dizaines de millions d’hommes et de femmes et à des millions d’enfants.
Le procès de Prague s’est déroulé au milieu des « aveux » et a fini par le gibet, selon un scénario désormais connu et si bien réglé qu’il n’y a nulle place pour la surprise. En le montant à Prague, Staline avait voulu signifier qu’aucune des « démocraties populaires » ne peut prétendre se soustraire à la stalinisation intégrale. Mais la mise au pas à laquelle elles sont soumises est plus impitoyable que celle imaginée par Hitler pour cette raison essentielle que la métropole est, cette fois, plus arriérée que certaines de ses nouvelles colonies, qu’elle doit les exploiter selon ses propres besoins et ne peut admettre un régime d’exception.
Article de Benno Sternberg dit Hugo Bell paru dans Socialisme ou Barbarie,Volume III (6e année), janvier-mars 1954, p. 10-12
There were chaotic scenes in Berlin on June 17 as thousands took to the streets – Image: AP/picture alliance (Source)
La période qui a suivi la révolte du 17 juin peut être divisée en deux étapes : la première occupe 3 à 4 semaines ; la seconde dure encore. La première de ces étapes est marquée par une tentative de libéralisation du régime. Un ouvrier put déclarer dans une assemblée d’usine : « Je suis fier du 17 juin » et sa déclaration fut reproduite par la presse du parti (1). Parallèlement un tournant économique s’amorce. Rappelons ici : la baisse des normes, la révision du plan en faveur de l’industrie légère, l’amélioration immédiate du ravitaillement. Cette première étape prit fin au cours de la seconde décade de juillet avec l’arrestation de Fechner et le limogeage de Herrnstadt et de Zaisser, promoteurs de la libéralisation.
Les journées de juin 1953 à Berlin-Est marquent la première preuve matérielle d’un renouveau possible de l’internationalisme ouvrier, faisant éclater les cadres de mouvements traditionnels et dépassés. Notre Cercle se devait de marquer cette date et d’envisager les perspectives d’avenir.
Article de Henri Johansen alias Ernest Salter paru dans La Révolution prolétarienne, n° 76 (377), octobre 1953, p. 16-18
The rebellion was one of the few mass pro-democracy uprisings in German history – Image: picture-alliance/dpa (Source)
Le 16 juin, Berlin et le monde furent bouleversés par le cri des travailleurs de Berlin-Est : « Grève générale » ! Depuis plus de deux décades ce cri n’avait plus retenti à travers l’Allemagne. L’action révolutionnaire semblait pour toujours appartenir au domaine de l’histoire. La barbarie fasciste avait démoralisé la classe ouvrière allemande, refoulant les principes révolutionnaires sur les rayons les plus secrets des bibliothèques totalitaires où, dénoncée comme littérature de « décomposition marxiste », elle semblait destinée à tomber en poussière.
Protesters were helpless against the forces confronting them – Image: picture-alliance/AP (Source)
Les grèves et les manifestations par lesquelles les ouvriers de Tchécoslovaquie ripostèrent à la « réforme monétaire » du 30 mai furent rapidement mises au second plan par le soulèvement du prolétariat de l’Allemagne de l’Est, survenu quelques jours après. Ce n’est certainement pas l’ouvrier de Pilsen, d’Ostrava ou de Kladno, qui éprouvera le regret de la primauté qu’il dut si vite céder à ses camarades de Berlin-Est ou de Magdebourg : le cri prodigieux « Nous sommes des ouvriers, nous ne voulons pas être des esclaves » retentit dans les rues de la capitale allemande au moment où l’ouvrier tchèque commençait à se rendre compte, au lendemain de sa révolte, que celle-ci n’avait pas eu d’écho chez les travailleurs des autres pays, qu’il avait eu tort de s’attendre à des manifestations de solidarité. Le soulèvement des travailleurs dans l’Allemagne occupée vint rompre cette solitude pénible.
Soviet tanks shot at protesters in Potsdam Square – Image: picture-alliance/akg images (Source)
L’impensable s’est produit à Berlin-Est et en Allemagne Orientale : la classe ouvrière d’un pays totalitaire où sont stationnées 30 divisions russes, où le parti communiste dispose de tous les leviers de commande, s’est révoltée contre une dictature implacable, a quitté les usines et les chantiers, a envahi les rues et les places publiques, pour crier sa colère et pour réclamer… Pour réclamer des salaires plus élevés ? Non pas : pour exiger la liberté. Réalise-t-on entièrement la signification de cet événement ? Cet exploit a été accompli par une classe ouvrière qui a subi 12 années de régime hitlérien et de guerre et huit années de régime « populaire » et d’occupation soviétique.
ADN-ZB/Junge/18.6.1953/
Faschistische Provokation im demokratischen Sektor von Groß-Berlin am 17.6.1953
U.B.z.: Blick auf das von Faschisten in Brand gesetzte HO-Geschäft im Columbiahaus am Potsdamer Platz.
NOUS avons dénoncé, la semaine dernière, l’exploitation par la presse bourgeoise réactionnaire, des événements de Berlin-Est. De l’Aurore à Franc-Tireur, des rangs de la bourgeoisie la plus pourrie aux rangs de l’ignoble social-démocratie, on brûlait dans la joie le drapeau de la révolution, on chantait les bienfaits des pays libres, on faisait les louanges de la démocratie capitaliste vers laquelle se tournaient les ouvriers de Berlin-Est.
DANS un coup de tonnerre, le prolétariat allemand de la zone soviétique annonçait, le 17 juin, aux travailleurs du monde qu’il était encore un fois à l’avant-garde du mouvement ouvrier.
17. Juni 1953
Aufstand im Sowjet-Sektor von Berlin
Nach dem Tode Stalins griff der Wille zur Selbstbestimmung über das staatliche und persönliche Leben und über die Freiheit der Persönlichkeit auf die Menschen des gesamten sowjetzonalen Sektors Deutschlands über. Die Bevölkerung im Sowjetsektor Berlins glaubte die Stunde der Freiheit sei für sie gekommen. Man ging auf die Straßen und proklamierte das Recht auf Freiheit und Selbstbestimmung. Der Aufstand wurde durch sowjetische Truppen zusammengeschlagen
Von der sowjetischen Besatzungsmacht eingesetzte Panzer zur Niederschlagung der Unruhen in der Schützenstrasse.
Le parti socialiste unifié de l’Allemagne orientale n’est plus. Les trois mots de son nom signifiaient trois mensonges : il n’était pas un parti, mais une agence de répression et d’exploitation au service d’un occupant impérialiste et totalitaire ; il usait du mot socialiste comme un assassin qui se servirait de la carte d’identité de sa victime ; il était unifié comme le loup est uni à l’agneau qu’il a dévoré. Il prétendait incarner et en même temps diriger le prolétariat. Quelques heures après le soulèvement des ouvriers ce parti s’est réfugié, tremblant, derrière les tanks qui allaient écraser l’insurrection ouvrière. Le rideau de brouillard est déchiré irréparablement. La contre-révolution totalitaire qui se déguise sous les drapeaux qu’elle a volés à la révolution et se réclame de l’unanimité prolétarienne, se trouve enfin démasquée aux yeux de tout un peuple qu’elle peut tuer, mais qu’elle ne pourra plus jamais tromper. Les journées de juin 1953 sont le commencement de la fin de la plus grande imposture non-religieuse que le monde ait jamais connue.
Extraits de Victor Serge, Carnets, Paris, Julliard, 1952, p. 103
25 avril 44. — Lu Le Procès de Franz Kafka, qu’il écrivit en 1920, en Bohème, au temps de l’euphorie démocratique de l’Europe centrale. Le livre se déroule sur le plan du rêve éveillé, du vrai rêve éveillé, avec une sincérité visionnaire aiguë et intelligente.
LEChâteau est avec le Procès et la Métamorphose un des trois romans posthumes de l’écrivain allemand Franz Kafka. Inconnu hier, le nom de Kafka est en train de passer les plus grands parmi les romanciers et c’est bien en effet quelque chose d’essentiel dans le genre que nous apporte cet écrivain.
Article d’André Julien paru dans Le Libertaire, n° 78, 22 mai 1947, p. 3
TELLE était, on s’en souvient, l’ahurissante question que posait, il y a un certain temps, un hebdomadaire communiste. Outre qu’il y a un parti pris quasi ecclésiastique à s’avancer sur de telles positions, nous ne comprenons pas à quelles échelles de valeur peut bien se référer une telle condamnation ; à moins que ce ne soit le côté noir qui heurte tant ces rouges, et qu’ils n’estiment « néfaste » au « processus historique » la lecture de pareils éloges du pessimisme.
Last known photograph of Franz Kafka. Most likely taken in 1923. (Source)
UNE question qu’on pouvait voir depuis longtemps se former et grossir à l’horizon vient brusquement d’éclater et ses déflagrations n’ont pas fini de nous emplir les oreilles. Elle est formulée brutalement par M. Pierre Fauchery dans le dernier numéro d’ « Action » : « Faut-il brûler Kafka ? »
Si l’action se déroule dans le même cadre et le même milieu que « Fontamara » (1) nous n’avons retrouvé que par éclairs l’âpreté et la vigueur de ce dernier roman. Là, des personnages taillés à la cognée évoluaient sur de la lave, ici ils sont ciselés par un poète. Nous préférions le bûcheron, et la première manière convenait mieux à ce peuple de « cafoni », véritables serfs du XXe siècle, à ces régions dures et hostiles.
Article de Jean Blanzat paru dans Combat, 8 juillet 1949, p. 4
IGNAZIO SILONE est né en 1900 dans un village des Abruzzes. Son père possédait, dans ce pays aride, quelques hectares de terre, et, pour en compléter le revenu, la mère faisait du tissage. Ignazio n’avait pas quinze ans quand sa famille périt presque tout entière dans un tremblement de terre. Orphelin et sans ressources, Silone vint à Rome et gagna sa vie en vendant des journaux. Mais, déjà, la misère des « cafoni », les paysans de sa province, l’avait frappé ; à dix-sept ans, Silone était devenu secrétaire de l’un des premiers syndicats ouvriers agricoles.
Appel du Secrétariat international de la IVe Internationale paru dans La Vérité des travailleurs,n° 53, 15 décembre 1956, p. 10
The damaged headquarters of the Hungarian Communist Party, on Köztársaság tér, in Budapest. (Source)
A toutes les organisations ouvrières, à tous les travailleurs
Camarades,
Depuis plusieurs semaines déjà, les travailleurs hongrois luttent héroïquement pour la défense de leur pouvoir démocratique, des Conseils. Cette lutte est arrivée maintenant à un nouveau point crucial.
Déclaration du Secrétariat international de la IVe Internationale parue dans La Vérité des travailleurs,n° 50, 1er novembre 1956, p. 12
En Hongrie, la faillite économique et politique des dirigeants staliniens hongrois inféodes au Kremlin et leur refus bureaucratique jusqu’à la dernière minute d’accéder aux demandes et aux aspirations profondes des masses, ont provoqué un soulèvement populaire.
Je suis heureux d’annoncer à mes amis, camarades et lecteurs la tenue d’une nouvelle rencontre autour de mon ouvrage, Histoire algérienne de la France, paru en octobre dernier aux Puf.
C’est depuis une centaine d’années environ qu’on observe la tendance socialiste dans l’histoire ou, pour employer la phraséologie hégélienne, que le mouvement autonome de l’esprit pur « se socialise ». Il faut admettre que le mot « socialisme », en lui même, ne dit rien, ou plutôt dit trop. Derrière ce mot agissaient les hitlériens ; le « socialisme » est le principe déclaré de plusieurs gouvernements sociaux-démocrates et, horribile dictu, c’est au nom du « socialisme » qu’on exerce des dictatures sanguinaires, comme celle de Kadar en Hongrie.
Ruszkik haza! « Russes, rentrez chez vous ! », slogan à Budapest. (Source)
Quand le pouvoir totalitaire éclate, l’appareil d’État s’effondre d’un coup. L’illusion de la toute-puissance politique se dissipe et les forces populaires réelles se manifestent au grand jour. Le régime que l’on disait soutenu et plébiscité à chaque élection par la quasi unanimité des citoyens se retrouve sans base aucune. Le parti unique, censé représenter l’ensemble des populations laborieuses, s’écroule en quelques heures. La police « du peuple », perdant toute autorité, est immédiatement pourchassée, traquée et massacrée par ceux qu’elle prétendait défendre.
Article de Cyrille Rousseau de Beauplan alias Philippe Guillaume paru dans Socialisme ou Barbarie, n° 20, décembre 1956-février 1957, Volume IV (8e année), p. 117-123.
Budapest VII. Rákóczi út – Akácfa utca sarok. Égő szovjet BTR-152 páncélozott csapatszállító jármű. (Source)
UNE RÉVOLTE DE TOUT UN PEUPLE, PROLÉTARIAT ET JEUNES EN TÊTE
Tout le monde sait maintenant comment cela a débuté. A la suite de l’avènement au pouvoir de Gomulka en Pologne, un grand espoir s’est levé sur la Hongrie. Tout le monde espère le retour de Nagy, le Gomulka hongrois, parce que, comme en Pologne, cela signifie un certain allègement de la contrainte économique et une petite indépendance vis-à-vis des Russes, moins d’ingérence ouverte de ceux-ci et moins de prélèvements sans contrepartie des richesses produites par le pays. Ce n’est pas grand chose, mais c’est déjà énorme en comparaison d’un passé exécré, celui de Rakosi. Ces timides revendications viennent des écrivains communistes (cercle Petöfi) et des étudiants communistes. Ces écrivains ne sont pas des écrivains « bourgeois », ayant une situation indépendante, comme Mauriac ou Sartre en France. Ce sont tous de véritables fonctionnaires du parti communiste, des servants de son idéologie, comme le philosophe Lukacs et qui, tous, ont chanté les louanges des Rakosi et de son régime, même si ils l’ont fait parfois à contrecœur. Depuis la déstalinisation cependant, et plus particulièrement depuis les événements de Pologne, ils ont pris quelques libertés, se sont exprimés ouvertement, ont tenu des réunions. Les étudiants ne sont pas des étudiants bourgeois ; ce sont des fils de membres du parti, de dirigeants syndicaux, de fonctionnaires de l’État communiste et même d’ouvriers et de paysans, à qui le régime — qui a un énorme besoin de « cadres » — a donné, en échange de leur soumission, leur chance sur une échelle beaucoup plus grande que dans les pays capitalistes. Une manifestation est décidée pour le 23 octobre, mais peu après que les écrivains et les étudiants aient formé leur cortèges, toutes les autres couches de la population, dont essentiellement les ouvriers, se sont joints à eux jusqu’à former des cortèges s’élevant à plus de deux cent mille hommes, femmes et enfants.
Je suis heureux d’annoncer à mes amis, camarades et lecteurs la parution, dans le 57e numéro de la revue ContreTemps (avril 2023), de mon article intitulé : « Notes sur la « crise » de la gauche (première partie) »
IL ne faut pas chercher à définir et à comprendre les œuvres d’Ignazio Silone indépendamment de ses prises de position politiques. Lui-même nous en avertit :
« Écrire n’a pas été et ne pouvait être, pour moi, sauf en quelque rare moment de grâce, une sereine jouissance esthétique, mais la laborieuse et solitaire continuation d’une lutte, après que je me fus séparé de mes compagnons les plus chers ».
On peut, on doit même déplorer que l’adjectif intellectuel se soit substantifié pour désigner (mal) un ensemble d’individus qui n’est ni sociologiquement, ni psychologiquement définissable sans ambiguïté.
Article de Sancho paru dans Spartacus, n° 5, avril-mai 1977, p.30
Georges Pompidou Centre, Paris, France. August 1977. (Photo by Staff/Mirrorpix/Getty Images)
Me trouvant récemment attablé chez une très chère amie, animatrice de galerie d’art, au milieu d’une vingtaine d’artistes-peintres, sculpteurs, etc… — dont le moins qu’on puisse dire est qu’ils montreraient les dents si l’on supposait un instant qu’ils ne sont pas dignes du qualificatif « avant-garde » — et de quelques « amateurs » cultivés, sinon milliardaires du moins aisés, je dus enregistrer avec étonnement, au moment où la conversation roula vers le thème du Centre Beaubourg-Pompidou, que j’étais le seul de mon avis. Pour tout avouer, j’étais le seul à contester radicalement la « chose » qui s’élève lentement au seuil des Halles. Étonnement, ai-je écrit, l’expression n’est pas exacte au fond. Ce qui m’étonna ce soir-là, ce n’est pas tant le fait que les artistes-convives aient défendu Beaubourg, mais qu’ils l’aient fait avec un acharnement qui ne laisse pas place à la méditation vaseuse. J’en entendis de toutes les couleurs, si je puis m’exprimer ainsi, et ceux qui font figures de « gauchistes » n’étaient pas les derniers à trouver de « bons » arguments pour justifier l’opération. On me rétorqua que « Beaubourg, somme toute, c’était pas si mal que ça, des tas de créateurs méconnus allaient enfin trouver une revanche », « que c’était un lieu où plein d’expériences seraient possibles, pour un grand public » et puis que « Beaubourg servirait quand la gauche aurait gagné ». J’avoue, je suis resté coi, jusqu’à la seconde où il me fallut bien enfoncer le couteau dans la plaie, balayer les balivernes, et replacer le parcellaire dans une vision globale.
Le livre de B. Sarel constitue une contribution de premier ordre à la compréhension de l’univers bureaucratique et des luttes de classes qui s’y déroulent actuellement (1). Sobre, précis, documenté, Sarel nous fait pénétrer d’une manière extrêmement concrète dans la réalité quotidienne des rapports antagoniques qui se sont développés en Allemagne orientale entre le prolétariat et la nouvelle classe dirigeante du soi-disant régime socialiste. Sarel ne pose pas des affirmations dogmatiques générales sur les contradictions internes des régimes bureaucratiques, il fait parler les faits et souvent même les personnages, ouvriers ou bureaucrates, qui vivent tous les jours ce déchirement de la société. Peu à peu se reconstitue sous nos yeux l’histoire d’une lutte de classe, et la signification révolutionnaire que développe cette histoire.
Article paru dans Pouvoir Ouvrier, n° 95, février 1969, p. 1
Some Czechs threw petrol bombs – but the armoured invasion was overwhelming : AFP (Source)
La récupération officielle du cadavre de Jan Palach, l’étudiant qui s’est suicidé par le feu, a permis au gouvernement tchécoslovaque de sauver encore une fois la face. Mais les appels au calme qu’il adresse sans arrêt aux étudiants comme aux ouvriers s’accompagnent de plus en plus de menaces contre les « extrémistes ».
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