Editorial paru dans Nouvelle Gauche,1ère année, n° 5, 10 juin 1956,p. 1-2
LA guerre à outrance en Algérie, tel est le choix auquel Guy Mollet, qui s’était engagé à négocier la paix, s’est laissé entraîner sous la pression de la pire réaction.
Ce choix, qui risque d’avoir des conséquences catastrophiques pour l’avenir, est un danger mortel pour la liberté.
Article de Maurice Clavel paru dans La Commune, n° 2, mai 1957, p. 10
J’arrive à Alger le 10 avril à la nuit. Le lendemain matin, je me rends au Tribunal Militaire. J’ai une grande partie de la ville à traverser. La mer et le ciel gris ne suggèrent pas l’Afrique. Les murs et les maisons de n’importe quelle ville de chez nous – à ceci près que c’est beau. Un musulman tous les 200 mètres donne une maigre et triste couleur locale. Il paraît qu’ils recommencent à se montrer (que devait-ce être ?). Alger, je le sais depuis hier soir, respire depuis l’opération Massu. La bombe de la « cafeteria » qui a tant marqué l’imagination (20 à 30 victimes, des fillettes amputées) s’éloigne peu à peu des mémoires.
Communiqué du MTLD paru dans Alger Républicain, 20 février 1954
On nous communique :
Le tribunal correctionnel de Tlemcen a condamné jeudi plusieurs dizaines d’Algériens à 84 années d’emprisonnement. Les faits qu’on leur reprochait remontent au mois d’octobre de l’an dernier.
Communiqué du MTLD paru dans Alger Républicain, 13 février 1954
Le M.T.L.D. communique :
Les régions de Nedroma et Nemours sont depuis plusieurs mois le théâtre d’une répression grave. On se souvient que le 15 octobre 1953, lors de la « Quinzaine de lutte contre la répression » un Algérien avait été abattu par la police. Ce fut le point de départ d’une action répressive qui n’a cessé de se manifester dans ces centres et leurs environs avec une particulière violence.
Article d’Yves Dechézelles paru dans Perspectives socialistes, n° 25, juin 1959, p. 25-28
JUSQU’A une date relativement récente, il n’existait aucun document d’ensemble faisant ressortir l’ampleur des conséquences sociales de la guerre d’Algérie. Les renseignements dont l’on disposait, si révélateurs qu’ils soient, visaient le plus souvent des faits limités dans l’espace et le temps et résultaient en général de témoignages individuels et par là-même contestables. Aussi véridiques qu’ils fussent, une grande partie de l’opinion publique, intoxiquée par la propagande officielle et toujours sensible aux arguments chauvins, demeurait sceptique. De toute manière, des gens de bonne foi avaient toujours la ressource de penser que les faits relatés étaient exceptionnels.
Editorial de Claude Bourdet paru dans Nouvelle Gauche, organe du mouvement uni de la nouvelle gauche, 1ère année, n° 1, 15 avril 1956, p. 1
AU cœur même de la situation politique française se trouve la guerre d’Algérie. Elle n’est pas le seul objet d’intérêt, elle n’est même pas, pour beaucoup de salariés vivant difficilement et préoccupés de leur salaire insuffisant, de leur logement médiocre, elle n’est même pas le problème principal. Mais, tout compte fait, c’est d’elle que tout dépend. Le climat international est à la détente. Le Parti communiste soutient le gouvernement. Malgré l’absence du Front Populaire aux élections, la droite n’est pas ressortie de celles-ci assez puissante pour inquiéter sérieusement Guy Mollet, tant au moins que la situation algérienne n’est pas très aggravée. Dans de telles circonstances, il apparaît clairement que, sans la guerre d’Algérie, nous serions partis pour une longue période de stabilité, et peut-être de progrès. Mais il apparaît aussi qu’à cause de la guerre d’Algérie, tout peut changer : la logique de la guerre alimente le chantage de la droite et des militaires exigeant de Mollet des mesures toujours plus brutales, lesquelles doivent normalement provoquer la chute du gouvernement de Front Républicain et son remplacement par un gouvernement de guerre totale animé par Bourgès-Maunoury, Soustelle, ou tous les deux.
Article paru dans Perspectives ouvrières, Bulletin du Comité national du Mouvement de Libération du Peuple, n° 27-28, juillet-août 1953, p. 19-22
La fusillade qui ensanglanta la pacifique manifestation populaire du 14 Juillet a consterné tous les républicains. On se trouve devant une provocation policière délibérée et devant un manque de sang-froid de la part d’une police dont le racisme violent n’est plus à démontrer.
Article de Blanquet paru dans Le Combat syndicaliste,33e année, nouvelle série, n° 172, décembre 1961, p. 1et 4
Pour essayer de pénétrer la cause de ces manifestations de masse, qui ont désagréablement surpris le peuple de Paris, et qui ont mobilisé la presque totalité des Algériens de la région parisienne, il faut revenir très en arrière.
Non pas, certes, remonter jusqu’à la conquête de l’Algérie (ce qui serait nécessaire pour une étude plus ample, sans doute), mais jusqu’à ces années 48-50, peu après la Libération
Article signé Armin paru dans le Bulletin communiste, n° 45, 8 novembre 1923, p. 813-814
Tous les militants conscients, tous les ouvriers révolutionnaires sérieux doivent lire attentivement les matériaux que nous publierons sur la défaite communiste en Bulgarie. Quand un mouvement ouvrier est vaincu, c’est un devoir pour les communistes de tous les pays d’étudier les circonstances et les conditions de la défaite pour en tirer les enseignements dont profiteront les partis révolutionnaires, pour éviter le renouvellement des fautes commises, pour y puiser des raisons de continuer la lutte et des moyens de vaincre.
L’insurrection de septembre des ouvriers et des paysans bulgares a été vaincue. De cruelles représailles ont commencé. Déjà elles ont coûté, à la classe ouvrière et à la paysannerie bulgares, des milliers de vies de combattants. Et elles continuent. On ne peut comprendre la signification de ces événements qu’en les rattachant à ceux de juin dernier.
Nos camarades Kolarov et Dimitrov, les chefs de l’héroïque et malheureuse insurrection ouvrière et paysanne bulgare, sont arrivés le 24 octobre à Moscou.
Dans la Pravda du 26, nous lisons des déclarations de Kolarov qu’il est intéressant de résumer pour les ouvriers français.
Article de Berlov paru dans L’Humanité, vingtième année, n° 7235, 19 octobre 1923, p. 1-2
Trois mois après la prise du pouvoir, la bourgeoisie bulgare n’avait encore rien pu faire pour ouvrir une ère nouvelle. Le Parti communiste avait étendu son influence dans les villes et les campagnes. Le nouveau parti bourgeois, celui de la Concorde démocratique, décida de faire un pas à gauche. Il s’agissait d’éliminer du gouvernement les nationaux-libéraux trop compromis et dont les social-démocrates demandaient. l’exclusion. M. Tsankov y consentit à contre-cœur, car bon nombre des militaires qui l’ont porté au pouvoir sympathisent avec ce parti de droite.
Article signé G.G. paru dans Le Libertaire, troisième série, vingt-neuvième année, n° 1, 18 décembre 1923, p. 3
Les révoltes de paysans et d’ouvriers en Bulgarie sont déjà noyées dans le sang. La réaction gouvernementale ensanglantée a triomphé encore une fois sur les cadavres de milliers de victimes ! Et aujourd’hui, sur le fond sinistre de la répression féroce, le mouvement insurrectionnel nous apparaît dans toute son ampleur et toute sa profondeur. Loin d’être une simple résistance de la provocation autoritaire, ce mouvement a eu une beaucoup plus grande importance que ne peuvent le comprendre les politiciens de tout acabit. Ce fut une véritable insurrection populaire qui a secoué les profondes couches de la masse paysanne et ouvrière en Bulgarie.
Article signé J.-C. paru dans Courant alternatif, n° 11, été 1991, p.11-13
■ CRISE DE LA SOCIÉTÉ DUALE
Le 25 mai, Mantes-La-Jolie fait à son tour la une de l’actualité ; le Val Fourré s’embrase !
Comment en est-on arrivé là ? Pendant les trois semaines qui précédèrent ce fameux weekend on assista à un déploiement de CRS significatif avec comme conséquence des contrôles musclés, des tabassages (1), etc. Il est bien évident qu’un fort ressentiment à l’égard des forces de police en est la suite logique. Lors de cette fameuse nuit du 25 mai se déroulait une soirée, dans la patinoire qui se trouve à l’entrée du Val Fourré. Plusieurs personnes qui tentèrent de rentrer pour participer à cette fête, furent refusés. Il s’en suivit quelques échauffourées et les responsables de la patinoire appelèrent les flics. Les causes immédiates de la révolte étaient donc réunies et il n’est pas étonnant qu’elle ait explosée.
Article paru dans Le Prolétaire,n° 408, octobre-novembre 1990, p. 3
La ville de Vaulx-en-Velin dans la banlieue de Lyon était un modèle de réhabilitation urbaine, d’aménagements urbains, d’intégration sociale ; faisant partie de ces opérations lancées dans toute la France après les affrontements des Minguettes, autre banlieue lyonnaise, au début des années 80, elle pouvait à bon droit être considérée comme une vitrine de la gestion social-démocrate des tensions sociales dans les quartiers populaires. La mairie, PCF, faisait plus dans le social que ce qu’aurait fait une mairie PS, forcément orientée vers les couches moyennes. La dernière réalisation, spectaculaire, était précisément destinée aux jeunes de la ville : un magnifique mur d’escalade, financé par la municipalité, la Région et l’État, qui avait été inauguré en grande pompe le 29 septembre. Le maire de Lyon était venu lui-même pour l’inauguration et il avait prononcé un discours où il vantait la « recette exemplaire » de Vaulx-en-Velin.
Article paru dans Lutte ouvrière,n° 687, 1er août 1981, p. 12
Depuis plusieurs mois, dans la ZUP des Minguettes, des jeunes du quartier s’opposent de plus en plus aux policiers. Dans la nuit de mardi à mercredi 22 juillet, à la suite d’un cambriolage commis par trois d’entre eux, l’intervention des policiers a provoqué la révolte des jeunes présents ainsi que de certains habitants du quartier qui ont assailli les flics à coups de pierres.
Texte paru dans I.R.L., journal d’expressions libertaires, n° 30, novembre 1979, p. 8
PRISE DE POSITION DES ÉQUIPES DE PRÉVENTION DE LA SLEA (Société Lyonnaise pour l’Enfance et l’Adolescence).
PRÉALABLE
Face à une sollicitation réitérée des organismes de presse, des corps constitués, comme des personnes ordinaires, nous, équipes de prévention de la S.L.E.A, présentes sur les quartiers de la Grappinière, Vaulx-en-Velin, Saint-Jean Villeurbanne, les Buers, Part-Dieu-Guillottière, acceptons d’évoquer collectivement notre position par rapport à la violence.
La Grande Bretagne a été secouée par une vague d’affrontements. Combats de rue, cocktails molotov et barricades : telle était l’image du pays où l’on déclarait il y a peu : « de telles choses ne peuvent arriver chez nous …». Nous avons rencontré un membre de groupe de Londres de l’organisation communiste libertaire SOLIDARITY et lui avons demandé ce qu’il pensait des derniers évènements survenus dans le pays de la « loi et de l’ordre » de Mme Thatcher. Sa vision des conséquences politiques de ces évènements contraste avec la présentation un peu triomphaliste qui a été faite dans certaines publications libertaires.
Article de Dave Hayes paru dans Inprecor, n° 106, 20 juillet 1981, p. 3-4
Comme aux États-Unis, des émeutes de la misère, du chômage et de la peur (DR)
FOUTEZ le camp ! Écrivez toute la merde que vous voulez. Dites que c’est politique, ou quelque chose comme ça. Ça pourrait tout expliquer. Qu’est-ce que vous foutriez, vous, si vous habitiez ici ? On n’a besoin de personne pour nous dire la merde que c’est ici. Quelquefois, parmi tous ceux qu’on connaît, y en a pas un qu’a trouvé du travail ! Est-ce que vous habiteriez dans ces pièges à rats ? »
(Interview de jeunes émeutiers, The Observer, 12 juillet 1981.)
Après les émeutes de Bristol et de Brixton (banlieue de Londres) en mai dernier, la bourgeoise, à travers sa presse, avait voulu nous faire croire que cette série d’émeutes était due à un « conflit racial » entre les communautés, ce qui lui évitait de dévoiler la situation matérielle déplorable dans laquelle vit toute une frange de la classe ouvrière anglaise. Mais les violents affrontements entre les jeunes et la police à Toxteth (quartier de Liverpool) du 4 au 6 juillet ont montré que les jeunes, qu’ils soient Anglais, Antillais, Pakistanais, Guyanais, Jamaïcains ou Indiens, en ont assez de supporter les frais de la crise économique profonde qui touche le pays. Les bourgeois ont bien été obligés d’avouer que ces affrontements étaient dus à une situation matérielle terrible et éventuellement au chômage.
Article de François Rouleau paru dans Lutte ouvrière, n° 690, 22 août 1981, p. 8
Les jeunes face à la police à Manchester au cours de l’une des émeutes de l’été. (AFP)
Le 15 août, des milliers de manifestants ont envahi les rues de Liverpool pour exiger la démission du chef de la police locale, Kenneth Oxford, individu notoirement réactionnaire et raciste. Cette manifestation était organisée par le comité de défense de Liverpool 8 (nom officiel du quartier de Toxteth où se sont déroulées les émeutes du début juillet) qui regroupe des représentants des organisations communautaires indiennes et jamaïcaines ainsi qu’un certain nombre de militants syndicalistes ou membres de la gauche travailliste. Mais pour la première fois depuis le début des émeutes, elle avait reçu le soutien officiel du Parti Travailliste et de plusieurs syndicats.
Article de François Rouleau paru dans Lutte ouvrière, n° 685, 18 juillet 1981, p. 9
Parties le 4 juillet de Southall, dans la banlieue londonienne, les émeutes ont gagné en dix jours pratiquement toutes les grandes villes industrielles d’Angleterre. A l’heure où nous écrivons, seuls le Pays de Galles et l’Écosse n’ont pas été touchés. Du nord au sud du pays, d’est en ouest, des dizaines de milliers de jeunes se sont affrontés avec la police, à coups de barres de fer, de cocktails molotov, ou simplement de pierres, détruisant et dévalisant au passage des milliers de vitrines, de magasins, et assiégeant des dizaines de commissariats de police. Au total, plus de 75 villes ont connu de tels affrontements, dont un quart environ dans la gigantesque agglomération de Londres.
Article paru dans Lutte ouvrière, n° 684, 11 juillet 1981, p. 16
Toxteth après deux jours d’émeute. (Ph. UPI)
Un policier de Liverpool en action. (Ph. UPI)
Pendant cinq jours, trois des plus grands centres industriels de Grande-Bretagne — Londres, Liverpool et Manchester — ont été le théâtre de violentes émeutes. Dans un cas, à Southall dans la banlieue de Londres, la cause en a été une provocation raciste dans les autres, ce furent des réactions spontanées de la population contre les brutalités policières. Mais partout, le véritable arrière-fond de ces émeutes, c’était bien le chômage (il y a longtemps que le cap des trois millions de chômeurs a été dépassé en Grande-Bretagne), la misère et les rancœurs accumulées.
Article de François Rouleau paru dans Lutte ouvrière, n° 672, 18 avril 1981, p. 15
D’un côté, les jeunes Jamaïcains en colère, auxquels sont venus se joindre des habitants, blancs ou noirs, des environs ; de l’autre, la police en action : ce sont 4 000 policiers qui ont déferlé le 11 avril sur Brixton. (AFP)
Lundi 11 avril, la colère a éclaté à Brixton, dans la banlieue de Londres. Pendant trois jours, des affrontements ont opposé des centaines, peut-être même des milliers de manifestants, en majorité jamaïcains, aux forces de police qui quadrillaient la ville, prenant tour à tour la forme de véritables batailles rangées ou d’escarmouches isolées, entrecoupées d’accalmies plus ou moins durables.
Toxteth, July 1981: ‘Each evening, some of us would walk out into Parliament Street in balaclavas.’ Photograph: ANL/Rex Shutterstock (Source)
I – VIVENT LES EMEUTIERS, MA MÈRE, VIVENT LES EMEUTIERS…
3 millions de chômeurs, soit plus de 11 % de la population active (40 à 60 % des jeunes – noirs et blancs – dans certaines régions), le Royaume-Uni de Gde-Bretagne et d’Irlande s’enfonce de plus en plus dans sa DECADENCE.
Article paru dans Jeune Taupe, n° 37,juillet-août-septembre 1981,p. 5-7
11 April 1981, during the 1981 Brixton riot in London, police with riot shields line up outside the Atlantic Pub, on the corner of Atlantic Road and Coldharbour Lane, Brixton. The photographer wrote: « In April 1981, around lunchtime, I stepped out of a shop in Brixton and a car burst into flames some 20 yards up the street, marking the start of the worst episode of civil disobedience Britain had seen in over 100 years. These are some of the pictures from that day. » « Police with riot shields block the access to the main area of rioting. Up to this point they’d been using dustbin lids, sheets of ply, anything they could lay their hands on for protection. These riot shields had only just arrived. » (Source)
Durant les semaines précédant les émeutes, la police ne cessait d’investir les rues de Brixton. Le vendredi 3 avril le quartier est bouclé. Pendant toute la semaine « l’opération Swamp 81 » (I) s’était déroulée avec pour conséquence l’arrestation et la fouille systématique d’environ 1 000 personnes – surtout des jeunes noirs.
Article de Benno Sternberg dit Hugo Bell paru dans Socialisme ou Barbarie,Volume III (6e année), janvier-mars 1954, p. 10-12
There were chaotic scenes in Berlin on June 17 as thousands took to the streets – Image: AP/picture alliance (Source)
La période qui a suivi la révolte du 17 juin peut être divisée en deux étapes : la première occupe 3 à 4 semaines ; la seconde dure encore. La première de ces étapes est marquée par une tentative de libéralisation du régime. Un ouvrier put déclarer dans une assemblée d’usine : « Je suis fier du 17 juin » et sa déclaration fut reproduite par la presse du parti (1). Parallèlement un tournant économique s’amorce. Rappelons ici : la baisse des normes, la révision du plan en faveur de l’industrie légère, l’amélioration immédiate du ravitaillement. Cette première étape prit fin au cours de la seconde décade de juillet avec l’arrestation de Fechner et le limogeage de Herrnstadt et de Zaisser, promoteurs de la libéralisation.
Article de Henri Johansen alias Ernest Salter paru dans La Révolution prolétarienne, n° 76 (377), octobre 1953, p. 16-18
The rebellion was one of the few mass pro-democracy uprisings in German history – Image: picture-alliance/dpa (Source)
Le 16 juin, Berlin et le monde furent bouleversés par le cri des travailleurs de Berlin-Est : « Grève générale » ! Depuis plus de deux décades ce cri n’avait plus retenti à travers l’Allemagne. L’action révolutionnaire semblait pour toujours appartenir au domaine de l’histoire. La barbarie fasciste avait démoralisé la classe ouvrière allemande, refoulant les principes révolutionnaires sur les rayons les plus secrets des bibliothèques totalitaires où, dénoncée comme littérature de « décomposition marxiste », elle semblait destinée à tomber en poussière.
Soviet tanks shot at protesters in Potsdam Square – Image: picture-alliance/akg images (Source)
L’impensable s’est produit à Berlin-Est et en Allemagne Orientale : la classe ouvrière d’un pays totalitaire où sont stationnées 30 divisions russes, où le parti communiste dispose de tous les leviers de commande, s’est révoltée contre une dictature implacable, a quitté les usines et les chantiers, a envahi les rues et les places publiques, pour crier sa colère et pour réclamer… Pour réclamer des salaires plus élevés ? Non pas : pour exiger la liberté. Réalise-t-on entièrement la signification de cet événement ? Cet exploit a été accompli par une classe ouvrière qui a subi 12 années de régime hitlérien et de guerre et huit années de régime « populaire » et d’occupation soviétique.
Article paru dans Pouvoir Ouvrier, n° 95, février 1969, p. 1
Some Czechs threw petrol bombs – but the armoured invasion was overwhelming : AFP (Source)
La récupération officielle du cadavre de Jan Palach, l’étudiant qui s’est suicidé par le feu, a permis au gouvernement tchécoslovaque de sauver encore une fois la face. Mais les appels au calme qu’il adresse sans arrêt aux étudiants comme aux ouvriers s’accompagnent de plus en plus de menaces contre les « extrémistes ».
During the Soviet invasion of Czechoslovakia, Czechoslovaks carry their national flag past a burning tank in Prague. (Source)
Pour ceux qui pouvaient encore en douter, l’invasion et la mise au pas de la Tchécoslovaquie confirme, s’il en était besoin, le caractère impérialiste de l’État russe. Rappelons quand même qu’en 1939-40, à la suite de l’accord avec Hitler la Russie occupa les États Baltes, une partie de la Pologne, la Bucovine et la Bessarabie. L’agression contre la Finlande suivit. Puis à la fin de la seconde guerre mondiale ce fut le partage du monde de Yalta qui assurait à la Russie la domination de l’Europe de l’Est et d’une partie des Balkans. Depuis, l’impérialisme russe réagit brutalement lorsque ses conquêtes sont menacées. La répression de l’insurrection hongroise en 1956 est encore dans toutes les mémoires, au moins pour ceux qui ne sont pas trop jeunes. En Hongrie la bureaucratie russe défendait au surplus sa domination de classe contestée par les conseils ouvriers. Rappelons enfin que dans son affrontement avec l’impérialisme américain, l’impérialisme russe apporte un soutien mesuré aux bureaucraties nationales du Nord-Vietnam, d’Égypte, de Syrie, d’Algérie, de Cuba, etc.
Gdynia: Protests against the death of Zbyszek Godlewski on December 17, 1970 (Source)
Comme dans les explosions passées de la lutte de classe dans les pays capitalistes d’État (branche orientale du capitalisme), les travailleurs polonais viennent de marquer les limites du pouvoir de la classe dominante (que ce soit l’ancienne classe du parti — dirigeants politiques — ou les nouvelles classes de technocrates — dirigeants de l’économie).
Article paru dans Action, n° 35,12 décembre 1968,p. 6
Le hall du centre universitaire de Vincennes qui vient d’ouvrir ses portes, à Vincennes, France le 24 décembre 1968. (Photo by Keystone-France/Gamma-Rapho via Getty Images)
Mai a bouleversé le rapport de forces dans l’Université les péripéties de la rentrée universitaire l’ont bien montré : les professeurs réactionnaires sont pris d’une peur panique devant les possibles développements de la lutte, les enseignants dits « progressistes » se font surtout remarquer par leur absence ; le pouvoir, lui, reflète la trouille générale, temporise et retarde la rentrée dans toutes les facultés de France.
Sollicité au sujet de la pétition réclamant la libération d’Ihsane El Kadi, j’ai refusé de signer le texte daté du 26 décembre 2022 en raison de la référence à la constitution qui ne me semble pas constituer un point d’appui pour garantir le respect des libertés politiques.
Depuis la mort de Boumédiène et son remplacement par Chadli, un certain nombre d’évènements ont eu lieu en Algérie. Nous avons déjà évoqué dans T.I.L. certains d’entre eux, comme par exemple la campagne d’ « assainissement ». Après l’élargissement de Ben Bella et la suppression des autorisations de sortie, la presse internationale n’a cessé de parler des perspectives de plus en plus certaines de « libéralisation ». Des illusions sont propagées par la presse bourgeoise au sein de la classe ouvrière, sur les effets bénéfiques d’une présumée « déboumédiènisation »…
Groupe d’enfants dans une rue de la casbah d’Alger, en avril 1979, Algérie. (Photo by Michel HUET/Gamma-Rapho via Getty Images)
Début septembre, était déclenchée à Alger une vaste campagne pour lutter contre la délinquance et la malpropreté dans la ville. Cette campagne devait s’étendre aux villes d’Oran, de Constantine, etc., les jours suivant.
Article paru dans El-Oumami, n° 24,avril 1982, p. 13
L’ancienne filature de coton et de laine ‘Motte Bossut et Cie’, aujourd’hui le Centre des archives du monde du travail, à Roubaix, en 1987, dans le Nord, France. (Photo by Pierre MICHAUD/Gamma-Rapho via Getty Images)
La situation des jeunes dans les quartiers ouvriers de Roubaix, dont beaucoup font partie de la « 2e génération » d’immigrés, s’aggrave continuellement.
Article paru dans Libre Algérie, n° 18, novembre-décembre 1988, p. 15
Pillages et incendies lors des émeutes le 6 octobre 1988 à Alger, Algérie. (Photo by SIDALI-DJENIDI/Gamma-Rapho via Getty Images)
♦ HOCINE AIT AHMED (« Fils de la Toussaint » et animateur du Front des forces socialistes)
« Je rends responsable le pouvoir algérien de n’avoir pas écouté et apprécié le dynamisme de la jeunesse de son pays, et d’avoir au contraire, au fil d’un quart de siècle, tout fait pour dépolitiser, infantiliser et démoraliser la jeunesse. (…) Je considère qu’il n’y a pas un seul exemple de parti unique dans le monde qui ait géré convenablement l’économie et le développement du pays et que seul l’essor d’un processus de démocratisation pourrait éviter que l’Algérie ne devienne l’homme malade de la Méditerranée occidentale. (…)
Tract de la Fédération pour une gauche alternative daté d’octobre 1988 à Paris
Pillages et incendies lors des émeutes le 6 octobre 1988 à Alger, Algérie. (Photo by SIDALI-DJENIDI/Gamma-Rapho via Getty Images)
Fédération pour une gauche alternative (F.G.A)
VIVE L’INTIFADA EN ALGERIE ! HALTE A LA REPRESSION ! SOLIDARITE, ELECTIONS LIBRES, ASSEMBLEE CONSTITUANTE !
Au « ras-le-bol » général du peuple algérien, à l’insurrection de sa jeunesse, le pouvoir bureaucratique et militaire n’a su que montrer son véritable visage : pour toute réponse la force, la répression bestiale, le tir à vue.
Pillages et incendies lors des émeutes le 6 octobre 1988 à Alger, Algérie. (Photo by SIDALI-DJENIDI/Gamma-Rapho via Getty Images)
« Bien entendu nous n’allons rien faire. »
(Claude Cheysson, ministre des Affaires étrangères de Mitterrand, à propos du coup d’Etat en Pologne de décembre 1981.)
Dans le mouvement d’importantes grèves ouvrières, la jeunesse d’Algérie a pris la rue en dirigeant essentiellement ses assauts contre le Parti-État et les signes de sa domination : sièges du FLN, police, administrations, galeries marchandes du luxe — ces « vitrines de l’Algérie » —, et centres de distribution de la pénurie planifiée. Elle a attaqué les agences d’Air Algérie et d’Air France, accoutumées à transporter les jeunes Algériens au travail en France et les « délinquants » immigrés dans les geôles algériennes ou au travail forcé du service militaire.
Tract signé « Des canailles » daté du 10 octobre 1988 à Paris
ALGERIA – OCTOBER 09: Headquarters State In Algiers, Algeria On October 09, 1988. (Photo by Georges MERILLON/Gamma-Rapho via Getty Images)
SI LES ARGUMENTS FONT COULER DE L’ENCRE, LES PREUVES FONT DEJA COULER LE SANG
LA RACAILLE ETATIQUE ici applaudit des deux mains le recours à la mitraille en ALGERIE tout comme en 1945 elle applaudissait les massacres de SETIF et GUELMA écrasant une insurrection dans le CONSTANTINOIS, tout comme elle le fit en MAI 1988 lors de l’assaut de la grotte d’OUVEA en NOUVELLE-CALEDONIE par la piétaille GENDARMESQUE.
Tract des Amis de l’intifada algérienne, octobre 1988
10/10/1988. EMEUTES A ALGER. (Photo by Nacerdine ZEBAR/Gamma-Rapho via Getty Images)
Alors qu’après les massacres de cette semaine les arrestations massives (4000), les tortures et les lourdes condamnations (4, 6 et 8 ans pour les émeutiers d’Annaba) se succèdent, politiciens et pleureuses médiatiques, par leurs déclarations mensongères, brouillent le sens évident des « évènements » d’Algérie : c’est une véritable révolution sociale qui a commencé là-bas !
Article signé Jean-Claude paru dans Le Monde libertaire, n° 589, 4 avril 1985, p. 8
Washington: Chadli Bendjedid, President of Algeria speaking with President Reagan nearby.
DEPUIS plus de vingt ans, l’Algérie est indépendante. La bureaucratie et la bourgeoisie nationale ont pris le relais des colons français pour exploiter à leur tour le peuple. La situation économique, sociale et politique est catastrophique. Le bilan pour les travailleurs est donc bien maigre.
Article signé Jean-Claude paru dans Le Monde libertaire,n° 588, 28 mars 1985, p. 8
ALGIERS, ALGERIA – NOVEMBER 30: Francois Mitterrand and Chadli Bendjedid on November 30, 1981, in Algiers, Algeria. (Photo by Jean-Claude FRANCOLON/Gamma-Rapho via Getty Images)
LE F.L.N. comme si vous y étiez. Ce parti obéit à la même logique qui mène tous les partis. Chadli Bendjedid, actuel responsable du parti, après Boumediene, a imprimé à l’Algérie de 1985 un caractère réaliste, remettant en cause la politique économique de l’après-révolution. De cette révision découle un revirement d’alliances. Et pour ce faire, il y a eu nécessité d’une épuration dans l’appareil gouvernemental. La deuxième partie de cet article fera le point sur le situation du socialisme algérien et le façon dont il est vécu par la population.
Article paru dans Tribune Internationale – La Vérité, n° 21, janvier 1984, p. 9
View of an unidentified street, Algiers, Algeria, 1983. (Photo by Gianni Ferrari/Cover/Getty Images)
PLUSIEURS centaines de morts : tel est le tragique bilan que la presse internationale dresse au lendemain des émeutes qui ont secoué tout le Maroc dans la semaine du 17 au 25 janvier 1984. Comme en Tunisie (voir notre article), les masses laborieuses, exaspérées par la hausse brutale des prix des produits de première nécessité, sont descendues dans la rue pour « réclamer le droit à la vie ». Dans les deux pays du Maghreb s’affirme avec force une volonté de refus des plans d’austérité dictés par l’impérialisme, via le Fonds monétaire international.
Dossier paru dans Lutte ouvrière, n° 698, 17 octobre 1981, p. 10-11
QUELQUES mois avant la fin de la guerre d’Algérie, le 17 octobre 1961, plusieurs dizaines de milliers d’Algériens manifestaient dans les rues de Paris contre le couvre-feu, l’interdiction qui leur était faite de sortir le soir après 20 h 30, entre autres.
Texte paru dans REFLEXes, n° 19, novembre 1988, p. 3
Le mutisme des intellectuels, resté inexpliqué, intervient à point à l’occasion d’un mouvement qui échappe de toute façon à leurs analyses comme à toute représentation.
Quelques romans ont essayé depuis longtemps de percer le mystère physique et psychologique des « procès de Moscou » : L’Affaire Toulaev, de Victor Serge, Le Zéro et l’Infini de Koestler, plus récemment : Une journée d’Ivan Denissovitch de Soljenitsyne fut publié en Russie au moment du dégel, à la suite de quoi, et d’une seconde nouvelle : La Maison de Matriona, Soljenitsyne fut plus ou moins mis à l’index.
Article de René Michel paru dans Le Libertaire, n° 174, 25 mars 1949, p. 3
Sous le titre « La Commune de Cronstadt, crépuscule sanglant des Soviets » (1), Ida Mett nous donne un exposé bref et saisissant des origines de Cronstadt révolutionnaire, de son insurrection contre la bureaucratisation bolchevique, de sa mort héroïque. On sait quel avait été, tant en 1904-1906 qu’en février et en octobre 1918, le glorieux passé révolutionnaire de la flotte russe, particulièrement en Mer Noire, dans la Baltique et à Cronstadt. Comment pourrait-on croire dans les accusations de Lénine, Trotsky, Staline, unis dans le mensonge, lorsqu’ils tentent de nous présenter le Cronstadt de 1921 qui exigeait la liberté des soviets, des ouvriers et des paysans, et la fin de la dictature d’un parti, celui des Bolcheviks, comme contre-révolutionnaire ? Ida Mett fait justice des calomnies venant d’un parti qui soutenait la bureaucratisation parce qu’il s’appuyait sur elle pour maintenir le peuple en esclavage, au nom d’un étatisme tout puissant.
Article de René Michel paru dans Le Libertaire, n° 184, 3 juin 1949, p. 3
ON peut regretter que la littérature et les études sur le système totalitaire soviétique et, sur les camps de concentration de la pseudo « Patrie des Travailleurs », ne soient souvent offerts au grand public français qu’avec un certain retard sur leur parution en langue étrangère. Il en est ainsi de l’érudit ouvrage de Dallin et Nicolaevsky, l’un ex-prisonnier des isolateurs du Guépéou et l’autre révolutionnaire menchevik bien connu pour ses travaux sur la vie de Marx, paru il y a au moins une année aux U.S.A., et dont on annonce une prochaine traduction française, et de bien d’autres encore. Néanmoins, à travers les œuvres de Victor Serge, de Ciliga, le livre un peu moins sincère peut-être, mais plus connu, de Kravchenko, et quelques-uns de ses imitateurs, les divers reportages et enquêtes de la presse, dont, on s’en souvient, celui auquel le « Libertaire » ouvrait, il y a peu ses colonnes, le public français pouvait se faire une opinion, pour autant qu’il consentait à ouvrir les yeux, sur « le pays du grand mensonge ».
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