Article paru dans Le Libertaire, 76e année, nouvelle série, n° 6, janvier 1971, p. 3
There are now four generations of Palestinian refugees. The « right of return » to their former homes in what is now Israel remains one of the thorniest issues in the conflict between Israel and the Palestinians. (Source)
Deux guerres dont il est beaucoup parlé – deux conflits « localisés » diront les stratèges – continuent de désoler deux régions, de décimer des populations : celles du Vietnam et du Moyen-Orient.
Dans les deux cas des « pourparlers de paix » se poursuivent nous dit-on : la conférence de Paris pour le Vietnam, les conversations de la mission Jarring pour le Moyen-Orient. Dans le premier cas les pourparlers n’ont jamais abouti à un cessez-le-feu, ni même positivement à un ralentissement des hostilités. Dans le deuxième cas les dirigeants jouent l’hypocrisie d’une « trêve » qu’aucun des belligérants n’entend prendre au sérieux, toute accalmie n’étant pour eux qu’un moyen de reprendre du souffle, de renforcer son dispositif de guerre pour pouvoir à la première occasion frapper plus fort.
Article signé Marie et Mohand paru dans Rouge, n° 695, 11 juillet 1978, p. 7-8
L’histoire de Dalila n’est pas « extraordinaire »
Dalila Zeghar, mariée depuis trois ans avec Denis Maschino, a été enlevée le 25 avril par son frère à Montréal. Depuis son mari, ses amis n’ont plus aucune nouvelle d’elle : son frère la séquestre en Algérie. La mobilisation pour sa libération, en France, nous a paru timide par rapport à l’énormité de l’enjeu. Peut-être y voit-on précisément une affaire extraordinaire, intolérable, certes, mais peu représentative. C’est trop gros, cela gêne, paraît rocambolesque. Celles et ceux-là mêmes qui luttent tous les jours contre l’oppression des femmes ne parviennent pas à se convaincre des sommets qu’elle atteint dans certains endroits, les pays musulmans en particulier. C’est pourtant la même oppression que nous connaissons ici, elle a les mêmes racines, vise aux mêmes buts, mais il y a une différence de degrés qu’on doit apprendre à connaître.
Textes parus dans Choisir la cause des femmes, n° 68, août-septembre-octobre 1985, p. 2-3
L’histoire de Nora
Que savons-nous de Nora ? Qu’elle a 19 ans ; qu’elle est lycéenne ; qu’elle est l’aînée d’une famille nombreuse (plusieurs frères et, au moins, une sœur) ; qu’elle a passé sa petite enfance en France ; qu’elle vit désormais dans une bourgade de l’Est algérien, coincée entre une mère malade (qui la bat), un père autoritaire (qui la tuerait si elle essayait de s’enfuir) et une sœur qui la déteste (parce qu’elle réussit mieux qu’elle dans ses études)…
Textes parus dans Homophonies, n° 21-22, juillet-août 1982, p. 10-11 et n° 24, octobre 1982, p. 13
Rencontre avec« Sans Frontière »
Nous sommes depuis quelques mois en discussion avec le journal « Sans Frontière », journal de l’immigration pour commencer un dialogue entre la communauté homosexuelle et la communauté immigrée. Nous souhaitons pouvoir organiser prochainement un débat sur la rencontre entre deux oppressions : l’oppression raciste anti-immigrés, et l’oppression homophobe. Nous souhaitons d’ailleurs recueillir tous les témoignages de ces rencontres au quotidien (lecteurs, lectrices, à vos plumes). En attendant, nous avons voulu vous présenter ce journal car les combats contre toutes les oppressions doivent se rejoindre. Nous avons rencontré une collaboratrice de ce journal, Fatima.
Article d’Yves B. paru dans Le Monde libertaire, n° 678, 22 octobre 1987, p. 10
DÉCÉDÉ récemment, Chester Himes est (avec Richard Wright) le romancier noir américain le plus connu et, à notre humble avis, le meilleur. Mais cette reconnaissance a été tardive. Si Chester Himes est resté longtemps incompris, c’est à cause de la division opérée entre ses romans « classiques » et ses polars (qui l’ont fait connaître en France), considérés comme pas sérieux. Pourtant, après une lecture attentive, on s’aperçoit que son œuvre possède une certaine cohérence. Lui seul a su traduire aussi bien les problèmes de la communauté noire contemporaine.
Article de Ghislain Bellorget paru dans Agora, n° 19, hiver 1983-1984, p. 27-28
« S’il existe un phénomène tel que le mal absolu, il consiste à traiter un autre être humain comme un objet. »
John BRUNNER
PENDANT deux mois et demi, G. Bellorget a suivi une équipe de « Médecins du Monde »en Afghanistan. Il ainsi pu rencontrer les opposants qui, depuis quatre ans, s’affrontent à l’occupation soviétique. Cela a donné un long reportage dont nous ne publions ici que les extraits concernant la condition des femmes dans ce pays. Ce choix ne signifie évidemment pas une justification quelconque de l’agression impérialiste soviétique, que nous condamnons énergiquement. Il veut simplement affirmer, comme l’écrit Bellorget, que « les ennemis de nos ennemis ne sont pas forcément nos amis ».
Article paru dans Courant alternatif, n° 10, juin 1991, p. 5-8
L’oppression des femmes en Afrique du Nord, comme partout dans le monde, est inscrite dans la société ; l’arrivée du FLN en Algérie, porteur de /’Idéologie arabo-musulmane, n’a pas contribué à améliorer le sort des femmes, bien au contraire ; et aujourd’hui, la montée de l’intégrisme par l’intermédiaire du F.I.S. (Front islamique du salut) génère une situation intolérable pour les Algériennes. Les médias occidentaux n’ont pas pu faire le silence sur ces mouvements de femmes algériennes qu’ils ont présenté très hypocritement comme une lutte entre, d’une part, des idées réactionnaires portées par un archaïsme religieux, et d’autre part, des idées émancipatrices venues d’Occident.
On entend dire : à quelque chose malheur est bon. Et en effet le fascisme, tout en ayant été un déplorable et horrifiant phénomène de régression morale et politique, a cependant servi à dévoiler des germes de mal qui persistaient parmi la population et à faire penser aux remèdes opportuns. De lui nous pourrons tirer de précieuses leçons qui, espérons-le, seront mises à profit dans un prochain avenir.
Extrait de Maxime Rodinson, Islam et capitalisme, Paris, Demopolis, 2014 [1ère édition : Paris, Le Seuil, 1966], p. 222-243
ISLAM ET SOCIALISME
Les Etats du monde musulman sont précisément aujourd’hui à un de ces moments décisifs où il leur est possible de choisir leur voie. La décolonisation généralisée, la renonciation des impérialismes occidentaux aux méthodes de domination directe, la concurrence des deux grands systèmes économiques de la société industrielle ont créé une situation révolutionnaire où il est possible de rompre, dans une certaine mesure, avec le passé et de repartir d’un nouveau pied. Partout des équipes dirigeantes, dans certaines limites, sous certaines conditions, peuvent opter.
Textes parus dans Tout !, n° 3,29 octobre 1970, p. 1-2
SI LA JUSTICE ETAIT JUSTE ÇA SE SAURAIT
Il y a les faits et ils parlent en notre faveur même s’ils sont tombés dans l’oubli. Le texte de l’accusation, publié dans « TOUT » n° 2, avoue lui-même l’existence de la « traite des nègres » à Meulan et l’impuissance naïve de la justice à frapper ceux qu’elle est faite pour aider. Là-dessus donc pas de problèmes pour justifier l’action de propagande du 6 mars (peinturlurages sur la mairie, distribution de tracts. invasion du bureau d’embauche qui abritait une partie du trafic, prise de parole sur la place du marché). Nous pouvons tous donc crier : NOUS ETIONS TOUS A MEULAN ; on ne se privera pas de le dire à tous ceux qui voudraient nous juger et qui sont embrouillés eux-mêmes dans la barbarie trop voyante de leur « civilisation ».
« Favoriser les conditions propres à l’émancipation de la femme » (photo publiée dans El Djeich, n° 182, juillet 1978, p. 47)
Pourquoi avons-nous décidé de nous regrouper dans une organisation de femmes ?
Parce que nous vivons dans une oppression spécifique due à notre rôle traditionnel dans le cadre de la famille, et que nous voulons lutter contre cela, d’où la nécessité d’un mouvement spécifique autonome, où les femmes, travaillant à l’usine, au bureau, à la maison puissent s’organiser entre elles, se conscientiser, et avancer elles-mêmes leurs revendications. En effet, nous pensons que la libération de la femme se ne fera pas par décret le jour de la Révolution (les exemples dans l’histoire sont nombreux) mais ne sera pas possible que, si dès aujourd’hui, les femmes s’organisent entre elles et éprouvent leurs forces contre ce qui les opprime.
Ce texte est grave. Et même provocateur, si on en juge les violences qu’il a déclenchées avant même d’être imprimé. Pour beaucoup d’entre nous, ce qui est dit ici est dur à avaler. Et même certains et certaines estiment que ce texte exprime un racisme de mâle au moment même où il dénonce un racisme de couleur.
Dans ce journal, des femmes, des homosexuels, des jeunes ont parlé. Ils ont parlé de leur vie, de leur oppression et de leur colère, de leur lutte. Ils ont dit ce qu’ils voulaient. Aujourd’hui, des camarades arabes parlent de leur vie aussi. Et leur vie remet en question les mêmes femmes qui tiennent les discours les plus radicaux et qui se battent avec le plus d’acharnement. On est pleins de contradictions, on s’en fout. On les assume… Ce qui nous intéresse c’est que ces contradictions, elles nous font avancer dans la mesure où on les explicite. On espère ne pas en rester là, et que des femmes et des hommes « européens » répondront pour mettre leurs tripes sur la table, parler de leur racisme et l’expliquer.
Les étudiants du comité de la cité de l’université de Tizi-Ouzou projettent d’inviter l’écrivain Mouloud Mammeri à faire une conférence concernant son ouvrage « Poèmes kabyles anciens ». Les autorités universitaires ne se sont pas prononcées contre le principe d’une conférence, mais elles étaient pour son report.
Le 10 mars à Tizi Ouzou, une conférence sur la culture berbère qui avait été appelée par un comité d’ étudiants et devait accueillir Mouloud Mammeri, écrivain algérien renommé, a été interdite. La préfecture de police (Wilaya), sous prétexte de risque de trouble de l’ordre public, a retenu quelques heures l’écrivain afin d’empêcher que la réunion ne se tienne.
Article paru dans le bulletin Riposte à la répression en Algérie, n° 8, mars 1982, p. 9-11
La mobilisation des femmes à Alger contre l’interdiction qui leur était faite de sortir librement du territoire, la manifestation devant l’assemblée contre la farce du « code de la famille » ou « code du statut personnel » et plus récemment la manifestation du 23 décembre au cours de laquelle on a vu les femmes descendre courageusement dans la rue pour revendiquer leurs droits, ont permis dans une certaine mesure de lever le voile sur l’oppression particulière qui pèse terriblement sur les femmes en Algérie.
On sourira peut-être, ou l’on s’irritera, de mon projet : tant de problèmes se posent à l’Algérie (« décollage » économique, création d’un vrai parti d’avant-garde, épuration, refonte des structures administratives…) que le moment est mal venu, dira-t-on, d’en soulever un autre : celui de la libération de la femme (de la jeune fille).
Article de Safia Bentayeb paru dans Et-Thaoura, n° 6, hiver 1984
Intitulé « projet de loi relative au statut personnel », adopté par le gouvernement et déposé sur le bureau de l’APN le 29 septembre 1981 pour discussion et adoption, après quoi il aurait force de loi.
Articles de Safia Bentayeb parus dans Et-thaoura,n° 5, automne 1983, p.6-8
Les différents avant-projets de code de la famille qui ont vu le jour depuis l’indépendance, à peu de chose près, ont le même contenu et ont tous été élaborés de manière anti-démocratique « secrète » et en dehors des femmes.
Article paru dans Femmes algériennes en lutte, bulletin du Groupe femmes algériennes, n° 2, décembre 1978, p. 41-48
Réponse au cercle A. Zeroual
De par la carence d’analyse qui existe au niveau des organisations politiques algériennes sur la situation des femmes en Algérie, nous tenons donc à souligner l’initiative du Cercle Abdellatif Zeroual, initiative qui s’est concrétisée par une approche de réflexion sur la femme algérienne dans une plateforme intitulée : « Les Communistes et la question féminine en Algérie. »
Textes parus dans El-Oumami, n° 24, avril 1982, p. 6 et 11-12
المرأة ويومها العالمي (photo publiée dans El Djeich, n° 216, mars 1982, p. 5)
A l’appel du comité d’action, rassemblement du 8 mars (Maison du Peuple — UGTA). Une cinquantaine de femmes. Refus de nous laisser entrer dans la salle où se tenait un gala organisé par les femmes travailleuses de la Santé. Menaces des flics. Des « syndicalistes » viennent nous demander de nous disperser. L’hôpital Mustapha étant investi par les flics (grève des agents), la fac étant surveillée, la cité-U trop loin, nous décidons de nous rendre à la Fédération Algérienne des ciné-clubs où se tient une rencontre des femmes.
Article paru dans El-Oumami, n° 22, février 1982, p. 4-5
LE GOUVERNEMENT vient de décider le 24/1/82 d’ajourner l’examen par l’APN du projet de statut personnel. Il est ainsi prouvé que l’Etat bourgeois peut reculer sous la pression de la mobilisation. Seule la lutte paye. Malgré le nombre limité de femmes ayant participé aux rassemblements d’Alger, il est clair que ces rassemblements n’ont pas été vains. Honte à celles qui ont tourné le dos à ces initiatives sous prétexte qu’il faut d’abord faire des conférences-débats et rédiger un manifeste sur les droits de la femme !
Article paru dans El-Oumami, n° 14, février-mars 1981, p. 6
Une information vient de nous parvenir faisant état d’un rassemblement de plusieurs centaines de femmes devant le Ministère de l’Intérieur à Alger pour protester contre la décision gouvernementale interdisant la sortie du territoire aux femmes, âgées de moins de 40 ans et non accompagnées par un parent direct. Les communistes internationalistes dénoncent l’hypocrisie, et le cynisme de la bourgeoisie algérienne qui ose prétendre lutter ainsi contre la prostitution au moment où la paupérisation, dans laquelle son système plonge les masses exploitées pousse une grande partie de celles-ci à survivre d’expédients de toutes sortes.
« Le nouveau secrétariat national : élargir la base et appliquer les résolutions » (photo publiée dans El Djeich n° 185, octobre 1978, p. 5)
Le Congrès de l’UNFA (Union Nationale des Femmes Algériennes) vient de se tenir à Alger au début du mois d’octobre, confirmant la volonté du gouvernement, après le congrès de l’UGTA et en vue de ceux de l’UNJA et du FLN, d’une reprise en main des organismes d’encadrement de la population.
L’époque actuelle offre une place relative aux revendications féministes : partout dans le monde se créent de nouveaux groupes de femmes, même dans les pays où la condition de la femme est particulièrement dur, – tel « Algériennes en Lutte » pour l’Algérie.
Dire qu’elle est opprimée ne donne qu’une idée très faible de la situation de la femme en Algérie. L’homme règne en maître absolu. Il ne veut pas que la femme soit autre chose qu’une esclave obéissante. Et, même s’il est vrai qu’un nombre de filles de plus en plus grand fréquente les lycées et les universités, il n’en demeure pas moins que sa situation reste fondamentalement inchangée. Elle reste étroitement surveillée dans ses moindres gestes, ou par le mari, ou par les parents. Et souvent, pour ces derniers, le fait que leur fille ait pu suivre des études, est utilisé pour demander une dot plus élevée.
Déclaration du Comité de liaison des trotskystes algériens paru dans L’Etincelle, n° 5, février 1979, p. 3-4.
Après deux mois de silence et de mensonges éhontés, l’appareil d’Etat reconnaît aujourd’hui que BOUMEDIENE, l’homme qui dans l’Etat actuel détenait tous les pouvoirs, est dans un état critique.
A la suite de nos différentes prises de position dans de précédents numéros de TIL sur la question de l’oppression des femmes, il semble qu’un certain nombre de points ont été mal compris par ceux qui nous lisent. C’est à différents arguments les plus fréquemment entendus, notamment dans la brochure des « Femmes Algériennes en Lutte » et dans la réponse qu’elles nous font, que nous voudrions répondre ici : la question du travail à l’extérieur comme moyen de libération des femmes, et celle des droits élémentaires à conquérir. Par ailleurs, nous aborderons dans un prochain numéro le problème de l’organisation des femmes et de son autonomie.
Article d’Errico Malatesta paru dans Le Réveil anarchiste, n° 765, 9 mars 1929, p. 3.
Nous reproduisons ci-après une réponse de notre camarade Malatesta, qui s’adresse aussi bien aux chrétiens de la « non résistance » qu’à ceux de nos camarades qui, non contents de faire ressortir que faute de résister à la violence, nous en perpétuons le règne, se plaisent presque à imaginer qu’elle ne devra pas connaître de bornes et en font une apologie enflammée, qui est souvent cause que la masse se méprend sur nos idées. Nous voulons répondre d’une façon adéquate à tous les coups qui peuvent nous être portés, mais il doit être bien entendu que la première raison pour laquelle nous nions tout pouvoir politique, c’est qu’il ne peut subsister sans cette violence, dont nous poursuivons l’élimination au sein des sociétés humaines.
Article d’Errico Malatesta paru dans Le Réveil anarchiste, n° 730, 29 octobre 1927, p. 1-2.
Il semble qu’il soit trop tard pour en parler encore, néanmoins le sujet reste d’actualité, puisqu’il s’agit de faits et des discussions qui, s’étant renouvelés dans le passé, se répéteront, hélas, dans l’avenir aussi, et cela, tant que n’en auront pas disparus les causes déterminantes.
Article d’Errico Malatesta paru dans Le Réveil anarchiste, n° 743, 1er mai 1928, p. 6.
Il peut paraître étrange au premier abord que la question de l’amour et toutes celles qui s’y rattachent préoccupent beaucoup un grand nombre d’hommes et de femmes, alors qu’il y a d’autres problèmes plus urgents, sinon plus importants, qui devraient accaparer toute l’attention et toute d’activité de ceux qui cherchent le moyen de remédier aux maux dont souffre l’humanité.
Article d’Errico Malatesta paru dans Le Réveil anarchiste, n° 742, 14 avril 1928, p. 2.
On pourrait écrire des volumes — sans épuiser la matière — sur les erreurs de pensée et d’action qui découlent des imperfections de langage : synonymes, mots équivoques, etc. Un exemple en est la confusion qui existe sur la question du droit de juger, précisément à cause de la double signification de ce mot.
Voici le texte de notre camarade Daniel Guérin qui figure en tête d’un recueil qui vient de paraître aux Editions Martinsart (72, bd. de Sébastopol – Paris II). Ce recueil fait partie d’une série de huit volumes reliés, intitulés « Les Grands Révolutionnaires », Ils ne sont pas en vente en librairie et ne peuvent être acquis que par souscription. C’est pourquoi nous avons jugé utile en détacher des extraits de la préface qui suit.
Jeudi 22 mars. La Mutualité. Kate Millett à son retour d’Iran. Elle parle du mouvement des femmes là-bas, manifestations autonomes des femmes… autonomes par rapport aux partis et groupes politiques… pour leurs droits… pour leurs droits seuls… pour que « l’autre » moitié du monde ait le droit d’exister, elle aussi… des milliers de femmes dans les rues… manifestations entièrement spontanées (Kate Millett a tant insisté là-dessus !), manifestations tellement attaquées, donc tellement dangereuses pour le pouvoir ! (pour le pouvoir en place et pour celui des « révolutionnaires » mâles !).
Attaquées au couteau par des individus pour la plupart du lumpenprolétariat, des fanatiques du Coran, manipulés par la bourgeoisie… attaquées verbalement par les « gens de gauche » qui leur reprochent de « diviser » le mouvement (vous n’avez pas l’étrange impression d’avoir déjà entendu ce genre de reproche quelque part ?). Les « camarades révolutionnaires » iraniens demandent – on pouvait s’y attendre – une fois de plus aux femmes de se calmer, de patienter, de faire d’abord la révolution…, ensuite on s’occupera d’elles. C’est banal, c’est triste, c’est du déjà vu. Mais ça n’arrête pas les féministes iraniennes.
Après une semaine de manifestations, leur mouvement entre dans une deuxième phase : celle de l’organisation. Elles forment alors, selon Kate Millett, des « comités tournants » (?) « sans bureaucratie, sans hiérarchie, sans personnalité publique », de type « anarchiste ». La répression est extrêmement dure : non seulement elles doivent faire face aux agressions pendant les manifestations, mais les « milices » (citoyens armés par les comités de leurs quartiers et chargés de faire régner l’ordre) quittent les manifestations – qu’ils doivent normalement protéger, encadrer – dès que les femmes sont attaquées. Par ailleurs, ces milices quadrillent toutes les rues de Téhéran et à toute heure du jour et de la nuit, arrêtent tous les individus et véhicules de leur choix, les font mettre contre le premier mur venu, et peuvent aussi bien les relâcher un peu plus tard que les abattre à la mitraillette s’ils leur semblent suspects (en plus, ils possèdent des mitraillettes depuis fort peu de temps et ne savent pas tous très bien s’en servir). Bref, c’est la démocratie, c’est la révolution, c’est la joie, Le tyran est abattu, hourrah !
Pour ceux qui sont portés à minimiser tout ce qui vient des femmes, il est bien évident que ces femmes ne luttent pas seulement pour avoir le droit de sortir dans la rue sans « chador » mais qu’elles réclament tout bonnement l’égalité avec les hommes et la liberté. (Même si le port du chador est très significatif, très symbolique de l’oppression des femmes : comme le disait Kate Millet, la femme étant la propriété de son mari ou de son père, elle ne doit pas montrer son visage ou son corps qui ne doivent être vus que de leur propriétaire ! On en revient toujours aux mêmes conclusions : la pudeur féminine inventée pour perpétuer la propriété des hommes sur les femmes, la répression du viol, par l’État, instituée pour punir un vol !).
Revenons aux manifestations des femmes. Elles n’ont pas droit à une grande publicité, en Iran, Pas une seule photographie n’a été prise par la presse iranienne! Silence total pendant longtemps à la télévision, puis un beau jour, débat sur la question. Évidemment, les invités étaient tous des détracteurs des féministes, Kate Millet a d’ailleurs dit que la grande manifestation de femmes réclamant soit-disant de porter le chador n’était pas une manifestation appelée sur des mots d’ordre anti-féministes. Elle était bien sûr complètement manipulée par les chefs religieux et était destinée à soutenir le grand responsable de la télévision, à soutenir la censure à la télévision. Cela dit, il n’est pas étonnant que ces femmes – comme par hasard – aient porté le chador ! On est réactionnaire ou on ne l’est pas ! Il est intéressant de se demander pourquoi la presse occidentale a fait passer cela pour une manifestation anti-féministe. Pour finir sur une note d’espoir, il faut dire qu’il y avait des hommes aux manifestations féministes, des hommes de toutes classes d’ailleurs. Kate Millet a dit qu’ils se donnaient la main, formaient des chaînes qui entouraient la manifestation. Ce geste ne devant pas être interprété comme du paternalisme, de la protection bienveillante (le dernier stade de la phallocratie), mais plutôt comme une preuve de réelle solidarité. C’est-à-dire que pour ces hommes, la liberté des femmes vaut bien le risque de prendre des coups de couteau. Ils ont voulu partager ce risque, Kate Millet était toute émue en en parlant et elle a dit : « Ces hommes n’étaient pas des sympathisants tièdes. C’étaient de vrais camarades ! ».
Il est nécessaire de dire que cette révolution qui a remplacé un tyran politique par un tyran religieux – cette révolution basée sur le Coran -, cette révolution qui exalte la différence de culture, la différence… ou la supériorité ? de l’Islam, la fierté patriotique du peuple, cette révolution qui soumet les prolétaires à des nouveaux chefs, à une nouvelle armée, a des milices de type fasciste (tout le monde peut en faire partie, mais tout le monde peut en être victime !) a un nouveau gouvernement; cette révolution qui fusille ou lapide les homosexuels, assimilés à des violeurs (les « victimes » sont flagellées), cette révolution qui refuse aux femmes le droit de se libérer de la tyrannie des hommes… cette révolution n’est une révolution qu’au sens le plus mathématique du terme : un tour sur soi-même et on revient au même point, Il ne faut pas mythifier le prolétariat iranien, complètement soumis dans sa majorité à l’idéologie dominante, à cette idéologie d’esclaves. La révolution, la vraie, la révolution libertaire, reste entièrement à faire !
Les Black Panthers ont tourné une page de leur courte, mais tourmentée histoire. Dans une interview accordée au National Observer (12 février) Huey Newton, leader et fondateur du parti, a solennellement défini la nouvelle politique de son organisation : « Nous avons abandonné les discours sur le pouvoir du fusil ; ils nous ont coûté environ 40 morts et ont envoyé des centaines des nôtres en prison. Notre but est maintenant d’organiser les quartiers noirs politiquement. Cela demande de l’argent et nous avons eu à trouver la bonne tactique ».
Articles parus dans El-Oumami, n°15, avril-mai 1981, p. 6-9
La mobilisation qui a eu lieu ces derniers mois à Alger contre l’interdiction aux femmes de sortir librement du territoire a permis de lever le voile sur l’oppression particulière qui pèse terriblement sur les femmes en Algérie. Dans la réalité, le statut d’infériorité imposé à la femme se retrouve dans tous les domaines de la vie économique, sociale et politique.
Article paru dans el-Oumami, organe du Parti communiste international, n° 11, septembre-octobre 1980.
En attendant de faire un travail sur la condition féminine dans les pays du Maghreb nous publions ici quelques notes d’une camarade sur la situation de la femme en Algérie pour faire ressortir le poids des discriminations juridiques et sociales qui pèsent encore sur le sexe féminin et les effets qu’elles ne peuvent pas ne pas avoir sur la lutte des classes.
De plus en plus les femmes dans le monde sont amenées à lutter contre l’arbitraire et l’injustice qui leur sont faits.
Les femmes algériennes ne sont pas épargnées de ce sort répressif. Elles ont eu plusieurs fois l’occasion de montrer qu’elles étaient les premières à ressentir et à souffrir des contradictions existant dans la société algérienne, et ce par la quotidienneté de leur oppression.
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