IL y a trente ans, le 1er novembre 1954, la nuit algérienne s’étoilait brutalement d’une trentaine d’actions armées, et rares furent ceux qui comprirent qu’il s’agissait là de la suite et du début d’une longue histoire : celle de la guerre d’Algérie et celle de la révolution algérienne.
L’ESPRIT laïque s’inscrit dans l’histoire de l’évolution de la pensée, elle-même indissociable de l’action émancipatrice de l’homme. S’identifiant à l’esprit critique, il est né de la réaction contre le dogme, obstacle permanent, reconnu comme tel, à la libération humaine et il faut entendre par dogme l’affirmation de toute nature échappant au contrôle de l’expérience et de la raison.
Article d’Idir Amazit paru dans Le Libertaire, 25 avril 1952 ; suivi de « Nature et aspect de la colonisation en Algérie », 2 mai 1952 ; « Par l’épée et par la charrue », 9 mai 1952 ;« La féodalité terrienne du colonat », 16 mai 1952 ;« L’industrie algérienne », 23 mai 1952 ; « Etat sanitaire et enseignement des populations algériennes », 30 mai 1952.
Le colonialisme tel qu’il est
LE célèbre Tartarin, d’Alphonse Daudet, qui prenait nos paisibles ânes de l’Atlas algérien pour de redoutables fauves du Kenya, a largement fait école avec les colonialistes. « Un baobab, disait à ses admirateurs le chasseur de Tarascon, c’est un arbre gigantesque, immense, à vous couvrir toute la superficie de Tarascon. Venez voir, j’en ai un dans mon jardin. » Et en ce lieu, il présentait une petite plante verte dans un petit pot ! Cette image du baobab est le reflet rigoureusement exact de ce que les primitifs à gages et les experts en falsifications et mensonges appellent impudemment l’ « Œuvre » du colonialisme. Rendons-leur cette justice : les maîtres du bla-bla-bla, qui s’agitent, gigotent et baratinent sur les estrades des baraques foraines des boulevards extérieurs ou de la foire du Trône de la place de la Nation, ne font pas mieux lorsqu’ils invitent les nigauds et les badauds à visiter leurs monstres, admirer leurs exhibitions. S’il est exact que le colonialisme a effectivement à son actif certaines réalisations, il n’est pas moins exact qu’elles sont dans leur quasi-totalité à l’usage et au bénéfice exclusif de la classe dominante. On a construit des routes et des chemins de fer pour desservir les domaines des « seigneurs » de la colonisation, les mines de charbon, de fer, de phosphates, des puissants trusts coloniaux. Tel conseil général dilapidera des millions à construire une route de plusieurs kilomètres reliant la route nationale X au domaine du colon Z, précisément membre du même conseil général, au sein duquel il est assuré avec ses amis colons d’une confortable et permanente majorité, grâce au système éminemment démocratique qui préside à la représentation dans les territoires d’outre-mer.
A mesure que le brasier de la révolte s’étend en Union française, le profane homme de la rue, généralement néophyte de la dialectique politique, est appelé à connaître une nouveauté qu’il ignorait jusque-là au même titre que la « question de confiance », avant que les ministères ne chutassent tous les quarante jours !
EN Europe, les traditions de lutte et l’enthousiasme prolétarien ont été entamés dans leur virilité par le chancre d’une politicaillerie prônée par une caste de saltimbanques maîtres en versatilités et trahisons. Les sociaux-démocrates attardés et les bureaucrates de la 3e Internationale portent une écrasante responsabilité de cette criminelle situation devant le monde ouvrier.
VERITABLES déracinés en cette terre qui se réclame des Droits de l’Homme, les travailleurs nord-africains continuent à subir les offensives racistes « sur tous les fronts », pour employer le jargon des culottes de peau. Aux brigandages systématiques gouvernementaux dans le régime des allocations familiales dus aux artifices juridiques des tripoteurs de la 4e République ; aux brimades racistes éhontées de la police et instrument d’exécution des basses œuvres au service des actuels fermiers généraux de la politicaille, s’ajoute cette permanente campagne de presse, par la quasi-totalité des journaux français, dont la moralité comme en conviendraient tous les esprits indépendants et saints, les destine tout juste à l’usage en ce lieu où même les rois vont à pied. Le moindre méfait dont un Nord-Africain a le malheur d’être l’auteur est montré en épingle à la « une » en romance dramatique fielleuse, alors que de véritables monstres humains sévissent journellement en France et ailleurs pour n’avoir droit qu’a quelques lignes perdues dans la rubrique des chiens écrasés. Encouragés par les exemples des Pouvoirs publics, des organisations privées n’hésitent plus à faire entendre leur voix dans cet odieux concert de la mare aux crapauds. Les vibrants sentiments nazistes et haineux de ces néo-aryens s’expriment en une verve dont à la violence s’allie une superbe éloquence ordurière, comme il sied à de piètres émules du grand Rabelais. Est-ce cela que vous avez voulu, ouvriers et paysans de 1789 qui avez déchaussé et déculotté vos bourgeois de l’époque pour équiper l’armée des sans-culottes sur ordre de Saint-Just ?
Article d’Idir Amazit paru dans Le Libertaire,cinquante-sixième année, n° 285, 19 octobre 1951, p. 3
LE camarade I. Amazit, secrétaire de la Fédération de France de l’Union Démocratique du Manifeste Algérien, protagoniste du courant d’unité d’action qui se fait jour dans la région Parisienne sur le plan du combat anticolonialiste, a bien voulu offrir aux lecteurs du « Libertaire » la primeur d’un article sur la conférence colonialiste de Nairobi.
Cette conférence, dont nous avons rendu compte en son temps, réunissait 49 nations impérialistes désireuses d’asseoir plus solidement leurs menées anti-populaires en Afrique. Il convenait, comme le fait I. Amazit, de mettre le fait en relief.
Article paru dans Le Libertaire, cinquante-sixième année, n° 362, 28 mai 1953
Mai 1945 en Algérie ! Sans plus de précisions cette exclamation devrait suffire pour que dans toutes les mémoires ouvrières s’évoque l’horrible massacre des 40.000 Algériens par l’impérialisme français.
REPONDANT à la récente initiative prise par des représentants patentés de la grosse bourgeoisie et du capitalisme libéral, de fédérer les Etats européens placés entre l’enclume américaine et le marteau soviétique, les partis socialistes – ou qui se prétendent tels – avaient convié les délégués de leurs sections nationales à un congrès qui se voulait être celui des peuples d’Europe, d’Asie et d’Afrique. Etaient venus se joindre à ces délégués « typiques » les représentants des divers mouvements plus ou moins autonomes dont la fin de la deuxième guerre mondiale a vu l’éclosion un peu partout dans le monde.
Article d’Ulric Schulze paru dans Le Monde libertaire, n° 194, octobre 1973, p. 5
Le climat et les actes engendrés au cours de ces dernières années par les campagnes de racisme en France n’ont été contrebalancés que par quelques réactions sporadiques tantôt indignées, tantôt opportunistes, tantôt humanitaires de bon ton. Un petit mea culpa, beaucoup de grandeur et de générosité de la France éternelle ont été mises en avant.
Ils s’appellent Mohamed, Mario, Djamila, José ou Hocine. Leur nombre s’accroit sans cesse et, de jour en jour, leur situation s’aggrave. Attirés en France par les promesses mirobolantes de trafiquants sans scrupules, véritables marchands d’esclaves du siècle de l’atome, ou bien simple marchandise d’échange entre les gouvernements de leur pays d’origine et celui de ta « nouvelle société », ils fournissent au patronat une main-d’œuvre à bon marché, surexploitée et paralysée par la crainte de l’expulsion, menace brandie aussitôt que l’un d’eux ose élever une timide protestation contre ses conditions de vie ou de travail, ou bien tente de s’organiser.
LE Mouvement Libertaire, à travers les multiples organisations qui l’ont constitué et qui le forment aujourd’hui, s’est toujours distingué à l’avant-garde de la lutte anticolonialiste et cela dans tous les pays et sur tous les plans. Notre rejet lucide et motivé de l’oppression capitaliste, étatique et religieuse n’autorise évidemment pas d’équivoque sur ce point et il suffit de consulter les 53 articles parus depuis 1945 dans la présente série du « Libertaire » pour se convaincre que l’action anarchiste n’a pas subi les « déviations » que l’on peut reprocher à certains.
POUR ceux qui sont fiers d’être Français, un Nord-Africain est toujours un « bicot ». Pourquoi ? Mais parce que l’usage de ce terme est le seul moyen qui leur permet d’affirmer leur supériorité. Il en allait de même avec les hitlériens, vis-à-vis des juifs, il en va de même avec les Américains vis-à-vis des noirs, il en va de même partout où existent le patriotisme et le racisme, ces produits de l’imbécillité et de la barbarie.
Un nouvel Etat est né : Israël, l’Etat Juif. Comme tous les Etats, il est la création des classes et castes dominantes et possédantes, et, dès le premier jour, il opprime et terrorise les populations laborieuses juives et arabes.
Article signé Patrick suivi d’une interview de Jean-Claude Brûlé parus dans Le Monde libertaire, n° 724, 3 novembre 1988, p. 8
IL existe des ironies du sort qui révèlent souvent bien des choses. Ainsi avons-nous pu voir sur les écrans de télévision un Algérien venir expliquer comment il s’était fait torturer par l’armée algérienne pratiquement à l’endroit où son père avait, lui, été supplicié par les parachutistes français, 25 ans auparavant.
DU pain ! criaient ceux que la Convention de 1792 avait acculé à la famine. Ils étaient aux Tuileries, devant ce palais de malheur, et tous les faubourgs parisiens comprenaient alors parfaitement que la République n’était qu’une putain et qu’elle se vendait au plus offrant.
LA phase purement palestinienne du conflit sanglant qui oppose Juifs et Arabes en Palestine est terminée. Elle se solde par l’échec retentissant et la mort du commandant des forces arabes de Palestine, Abdul Kader Husseini, cousin de l’ex-grand mufti, devant Jérusalem qu’il tentait d’encercler.
LE nouveau livre que Daniel Guérin vient de publier chez Julliard est bien autre chose qu’une histoire du Front Populaire. C’est une somme qu’il nous faudra consulter lorsque nous désirerons nous livrer à une analyse sérieuse des journées tumultueuses qui ont abouti à une transformation complète des rapports entre les organisations syndicales et les patrons et cet aspect trop ignoré a revêtu une importance pour le moins aussi grande que les conquêtes sociales qui ont résulté.
Article de Claude Lérins paru dans Le Libertaire, n° 281, 14 septembre 1951, p. 3
Nos régimes contemporains sont tous des régimes arbitraires, soit en acte, soit en puissance. Car tous admettent qu’il existe dans la société une volonté dont le droit de commander ne saurait être ni réglé, ni limité, que cette volonté fait loi et qu’il n’y a de loi que cette volonté, ce qui est la définition même de l’arbitraire : « Sit pro ratione voluntas » (1).
Bertrand de JOUVENEL (Fédération, page 462.)
DEPUIS que les conceptions anarchistes ont pris corps, depuis qu’elles se sont dégagées du combat social lui-même, les militants anarchistes ne sont jamais désintéressés des luttes populaires, en apparence nationales, mais permettant de promouvoir la Révolution Libertaire, ou d’en créer les bases. Bakounine, à propos de la Révolution de 1793, Voline, au sujet de l’épopée makhnoviste, Camillo Berneri, au cours de la révolution espagnole, avec eux tous nos penseurs et militants, ont fait ressortir la nécessité pour les révolutionnaires d’orienter les luttes populaires en y participant. Féconder le combat populaire par la pensée révolutionnaire fut et doit demeurer une de nos tactiques essentielles. Pourquoi , en conséquence, n’aurions-nous pas appliqué ce principe d’action au combat que mènent en ce moment les peuples colonises pour leur libération du colonialisme ?
S’IL est vrai comme on en a accusé bien légèrement la population allemande, qu’un peuple est responsable de son régime, de quels crimes les Français auraient-ils à rendre compte à l’humanité !
LE modernisme semble, si nous en croyons certains, avoir bousculé de nombreux préjugés, de nombreuses croyances qui ont marqué si profondément le passé. Et, de fait, la croyance en Dieu, par exemple, est moins vive, moins tenace, de même que les nationalismes et les revanchismes déclinent depuis que les gens ont appris à se connaitre par-delà les frontières.
Article de Michel Lesure paru dans Le Monde libertaire, n° 13, décembre 1955, p. 3
La religion est le soupir de la créature accablée par le malheur, l’âme d’un monde sans cœur, de même qu’elle est l’esprit d’une époque sans esprit, c’est l’opium du peuple.
(K. MARX.)
FAISANT sienne la conception de Feuerbach sur l’esprit déiste, Marx la complétait en assignant à d’autres abstractions le soin de régler le sens des évolutions. C’est du commentaire des sophismes marxistes qu’est née la caste des clercs et des mandarins : les intellectuels dits de gauche, l’Intelligentsia, qu’il appartient à Raymond Aron de radiographier.
Article de Louis Chavance paru dans Le Monde libertaire,n° 23, décembre 1956, p. 4
Budapest VII. Rákóczi út – Akácfa utca sarok. Égő szovjet BTR-152 páncélozott csapatszállító jármű. (Source)
SI la colère et le chagrin ne l’avaient emporté sur la curiosité, ce n’est pas sans amusement qu’on aurait pu assister aux contorsions des littérateurs distingués pour apaiser leur conscience, troublée par une atmosphère d’orage, après le coup de tonnerre de l’insurrection Hongroise. La tristesse serait d’ailleurs aussitôt revenue, devant les réactions de quelques honnêtes gens, asphyxiés par les nuages de confusion qu’ont répandus les faux penseurs.
Ecrit au lendemain de la guerre d’Espagne, cet ouvrage vient seulement d’être traduit. Sa qualité, la précision de l’information qu’il nous apporte sur les événements encore mal connus de 1937, nous fait regretter de ne pas l’avoir eu plus tôt entre les mains.
Article d’Yves Rochefort paru dans Le Monde libertaire, n° 296, 11 janvier 1979, p. 5 et 8
ECRIRE un article sur Israël est un exercice périlleux, surtout si l’on veut évoquer l’avenir du Moyen-Orient. Du coup d’éclat de Anouar el Sadate à la Knesset aux espoirs déçus de Camp David, les rebondissements de l’actualité peuvent rendre caduques les prévisions les plus raisonnables. L’état de belligérance ne durera pas éternellement et un jour la paix sera signée entre les différents Etats et une vie différente commencera pour tous les habitants du Levant. Mais quelle paix ?
Face au problème de la guerre et de la misère dans cette partie du monde, les libertaires doivent avoir une position claire. Comme l’indiquait Maurice Joyeux dans une brochure consacrée au problème de la Palestine, seul compte pour nous le destin des individus, et nous éprouvons un intérêt médiocre pour les combinaisons des gouvernements et des puissances économiques. Mais il faut balayer les idées fausses et les a priori mortels. Il faut aussi rappeler quelques faits historiques incontestables et quelques vérités premières (1).
Article d’I. Lauden suivi d’un commentaire de Joël Gochot parus dans Le Monde libertaire, n° 190, mai 1973, p.8-9
In May 1972, gunmen attacked an Israeli airport, killing 26 people (Source)
Diffamation sur le prétendu terrorisme anarchiste
Ces derniers temps, il a déferlé un ouragan de crimes politiques sur notre monde tumultueux ; terreur individuelle et piraterie aérienne qui ont pris un caractère dangereux. Une vague de terreur et de criminalité, exportée du Japon, de la Turquie et de l’Amérique latine, qui n’évite pas notre pays. Les terroristes qui se déguisent avec des plumes idéologiques se comportent de plus en plus en bandits et en bourreaux inhumains. Mais ces bandits idéologiques sont pires que les simples criminels : ils se dissimulent derrière des idées et une phraséologie et ignorent le regret ou le remords.
Leader of the Palestine Liberation Organization, Yasser Arafat (left), Egyptian President Gamal Abdel Nasser (center) and King Hussein of Jordan (right). 27 September 1970, Cairo. AFP / East News (Source)
« Ecoutez, nous commencerons par provoquer des troubles, dit Verkhovensky… Je vous l’ai dit, nous pénétrons au plus profond du Peuple. Savez-vous que nous sommes déjà maintenant terriblement forts. Non seulement ceux qui égorgent et incendient travaillent pour nous, ceux qui manient le revolver à la manière classique ou bien les enragés qui se mettent à mordre… Je n’admets rien sans discipline. Je suis un gredin et non un socialiste, moi ! ha ! ha ! »
Dostoïevski – Les Possédés.
On a rarement vu une telle bestialité ! C’est par grappes que la mitraille fauche les êtres affolés qui fuient éperdus. Les obus lourds tracent des sillons sanglants dans la foule, les maisons s’écroulent ensevelissant sous les gravats hommes, femmes et enfants, blessés ou morts, réunis ainsi dans une apocalypse qui dépasse ce qu’avaient pu imaginer les prophéties de cerveaux dérangés qui depuis trois mille ans ont fait arrosé ce sol aride du sang de dizaines de générations.
Rien de plus complexe que les problèmes du Moyen-Orient en général et celui du problème israélien en particulier, non seulement en raison des oppositions et des errements inhérents à toute expérience humaine, mais aussi et surtout par l’intrusion de la finance et de la politique s’efforçant à brouiller les cartes, à diviser et à opposer les collectivités et les races, à multiplier les incidents et à nourrir les rancœurs et les haines.
Cela n’a jamais été aussi vrai qu’aujourd’hui, en ce qui concerne le problème palestinien.
C’EST avec émotion que j’ai ouvert ce livre sur un homme qui fut mon ami. Amitié d’idée, faite de rencontres circonstancielles, n’allant jamais jusqu’à l’intimité. Les biographies sont redoutables, elles vous font connaître toute une face cachée d’un être. C’est probablement pour cela que l’auteur, dans sa dédicace, pose le problème du souvenir d’un homme qu’on a aimé !
Article signé G. Bernier paru dans Le Libertaire, n° 347, 12 février 1953, p.3
ENFIN ce livre est paru en français (1).
Pour ceux qui avaient eu l’occasion de connaître cet ouvrage édité à New-York en 1942 et qui avaient ressenti à la lecture cet enthousiasme que l’on n’éprouve que pour quelques livres dans une vie, c’est une joie profonde.
Les accusés lors du procès de Prague, en 1952. ARTE
ÉDITÉS pour la première fois en 1936-38 « Les procès de Moscou » sont réédités périodiquement et chaque fois dans un pays différent du glacis stalinien. Les personnages variant seulement, les juges d’hier jouant bien souvent le rôle des accusés du jour, « ces procès » n’intéressent plus, n’émeuvent plus.
Article paru dans Le Libertaire, n° 28, 10 mai 1946, p. 2
On a beaucoup parlé, on parle encore beaucoup, plus peut-être qu’il n’eût été logiquement, utile, du livre d’Arthur Koestler « Le Zéro et l’Infini », dernièrement paru. Sans doute faut-il voir dans cet engouement pour une œuvre somme toute assez banale, le fait que l’auteur fournit ainsi aux adversaires du communisme une arme non négligeable à la veille des élections. N’est-on pas allé jusqu a dire qu’un des secrétaires du premier parti de France — quand on écrit ces mots on pense immanquablement à Thorez, le grand patriote clairvoyant et courageux (!) qui fut en effet un des premiers partis de France… comme déserteur en 1939 — aurait rendu visite à l’éditeur pour lui demander de limiter le tirage de ce livre qui, en notre époque de dithyrambes staliniens, produit un effet comparable à celui d’un pavé jeté dans une mare à grenouilles, un soir d’été. N’a-t-on pas insinué aussi — pure calomnie, bien sûr — que le parti visé aurait fait effectuer des achats massifs de l’ouvrage en question afin de retirer de la vente au public le plus grand nombre possible d’exemplaires. Tout cela est, ma foi, fort possible mais je ne suis pas de ceux qui affirment ce qu’ils ignorent.
ADN-ZB/Junge/18.6.1953/
Faschistische Provokation im demokratischen Sektor von Groß-Berlin am 17.6.1953
U.B.z.: Blick auf das von Faschisten in Brand gesetzte HO-Geschäft im Columbiahaus am Potsdamer Platz.
NOUS avons dénoncé, la semaine dernière, l’exploitation par la presse bourgeoise réactionnaire, des événements de Berlin-Est. De l’Aurore à Franc-Tireur, des rangs de la bourgeoisie la plus pourrie aux rangs de l’ignoble social-démocratie, on brûlait dans la joie le drapeau de la révolution, on chantait les bienfaits des pays libres, on faisait les louanges de la démocratie capitaliste vers laquelle se tournaient les ouvriers de Berlin-Est.
DANS un coup de tonnerre, le prolétariat allemand de la zone soviétique annonçait, le 17 juin, aux travailleurs du monde qu’il était encore un fois à l’avant-garde du mouvement ouvrier.
Article d’André Julien paru dans Le Libertaire, n° 78, 22 mai 1947, p. 3
TELLE était, on s’en souvient, l’ahurissante question que posait, il y a un certain temps, un hebdomadaire communiste. Outre qu’il y a un parti pris quasi ecclésiastique à s’avancer sur de telles positions, nous ne comprenons pas à quelles échelles de valeur peut bien se référer une telle condamnation ; à moins que ce ne soit le côté noir qui heurte tant ces rouges, et qu’ils n’estiment « néfaste » au « processus historique » la lecture de pareils éloges du pessimisme.
Si l’action se déroule dans le même cadre et le même milieu que « Fontamara » (1) nous n’avons retrouvé que par éclairs l’âpreté et la vigueur de ce dernier roman. Là, des personnages taillés à la cognée évoluaient sur de la lave, ici ils sont ciselés par un poète. Nous préférions le bûcheron, et la première manière convenait mieux à ce peuple de « cafoni », véritables serfs du XXe siècle, à ces régions dures et hostiles.
L’ŒUVRE de Benjamin Péret, auteur surréaliste, militant révolutionnaire, est assez connue — et appréciée — de tous ceux qui suivent l’actualité sociale de ces quelque vingt dernières années, pour qu’il soit inutile de présenter notre ami à nos lecteurs.
Nous sommes heureux de pouvoir, aujourd’hui, insérer un texte de B. Péret sur « l’indépendance des pays arriérés » écrit spécialement à l’intention du « Libertaire ».
J’ai le plaisir d’informer mes amis et lecteurs que je serai l’invité de l’émission « Trous Noirs », diffusée en direct ce lundi 7 novembre, de 16h à 18h, sur Radio Libertaire (89.4 MHz FM à Paris).
Article signé Jean-Claude paru dans Le Monde libertaire, n° 589, 4 avril 1985, p. 8
DEPUIS plus de vingt ans, l’Algérie est indépendante. La bureaucratie et la bourgeoisie nationale ont pris le relais des colons français pour exploiter à leur tour le peuple. La situation économique, sociale et politique est catastrophique. Le bilan pour les travailleurs est donc bien maigre.
Article signé Jean-Claude paru dans Le Monde libertaire,n° 588, 28 mars 1985, p. 8
LE F.L.N. comme si vous y étiez. Ce parti obéit à la même logique qui mène tous les partis. Chadli Bendjedid, actuel responsable du parti, après Boumediene, a imprimé à l’Algérie de 1985 un caractère réaliste, remettant en cause la politique économique de l’après-révolution. De cette révision découle un revirement d’alliances. Et pour ce faire, il y a eu nécessité d’une épuration dans l’appareil gouvernemental. La deuxième partie de cet article fera le point sur le situation du socialisme algérien et le façon dont il est vécu par la population.
Éditorial paru dans Le Monde libertaire, du 30 novembre au 6 décembre 2000.
Paul Aussaresses en 2000 : « Je n’éprouve pas de remord pour la torture en Algérie ». Source : INA
La pratique de la torture et la liquidation physique des opposants algériens à la colonisation française a donc été un fait quotidien tout au long de la guerre d’Algérie. Les aveux publics d’au moins deux généraux directement impliqués dans ces assassinats font qu’aujourd’hui l’État français va devoir digérer cette ignominie pour sauver l’essentiel, à savoir la pérennité de l’armée et des services secrets barbouzes.
Article de Sylvain Eischenfeld paru dans Le Monde libertaire, n° 891, 3 au 9 décembre 1992
Jean-Pierre Biondi et Gilles Morin seront les invités de l’émission « Histoire sociale » sur Radio Libertaire, le samedi 5 décembre de 22 heures à minuit.
Notre camarade Sylvain Eischenfeld nous présente leur livre, Les Anticolonialistes.
Article de Maurice Joyeuxparu dans Le Monde libertaire, n° 352, 3 avril 1980
Voici un ouvrage qui, à plusieurs titres, nous replongera dans nos souvenirs ! Guérin, avec beaucoup de minutie, retrace non seulement ce que fut l’insurrection algérienne, mais également l’histoire de la constitution d’un parti nationaliste, dont la figure de proue fut Messali Hadj ! Naturellement, cette première partie nous introduit dans les querelles entre les tendances au sein du mouvement national algérien, querelles qui étaient inévitables au sein d’un parti où le communisme stalinien d’abord, le trotskisme, puis le nationalisme, s’agitaient dans un ensemble où le marxisme et l’Islam constituaient un mélange idéologique détonant. La gauche, et même l’extrême gauche romantique et naïve, fut étroitement mêlée non seulement à la libération du peuple algérien, mais à toutes les querelles de boutiques qui agitèrent le PPA. J’allais dire avec délices… ! En tout cas, elle y retrouvait tous ses fantasmes, ceux du jacobinisme, du blanquisme patriote et socialiste, celui de la fameuse période intermédiaire chère à Lénine, et j’en passe. Je suis toujours étonné de voir des militants ouvriers se laisser aller à un tel confusionnisme qui porte en lui l’échec et la responsabilité de tous les malheurs qu’ont subis les mouvements révolutionnaires depuis cent-cinquante ans, celui de l’Algérie comme les autres. Et pourtant, devant l’insurrection algérienne, et le livre de Guérin nous le montre, la situation était claire.
Article de Maylis O’Brian paru dans Le Monde libertaire, 30 septembre au 6 octobre 1999
Ma meilleure potesse me l’avait dit : si tu ne dois lire qu’un livre dans l’année, lis « les égorgeurs ». Bonne pomme, je suis donc allée à la rue Amelot et… Une tronche de milit (mal rasé, qui plus est) en première page, un bandeau noir éjaculant un grand prix « ni dieu ni maître » dont je n’avais jamais entendu causer, ça démarrait pas vraiment fort.
Article de Nicole T. paru dans Le Monde libertaire, n° 865, 2 au 8 avril 1992
Un film, écrit Laura L. dans le Monde libertaire du 27 février (n° 860), doit dire « sa vérité toute intérieure ». « Il n’y a d’événements que dans et par le récit », ajoute-t-elle. Elle évoque ainsi pour « Ciné sélection » le très long métrage (4 heures) de Bertrand Tavernier et Patrick Rotman sur la guerre d’Algérie, La Guerre sans nom. Le film, selon elle, manque de réflexion, et la France y « trouve son consensus ». Ici Nicole T. pense au contraire qu’il mérite d’être vu. « Sans y chercher une œuvre d’art, mais… plutôt un témoignage et un outil d’enseignements ».
Interview de Jean-Louis Hurst alias Maurienne réalisée par Sylvain Eischenfeld et publiée dans Le Monde libertaire, n° 842, 24 au 30 octobre 1991.
A l’heure où l’on célèbre les trente ans de la fin du conflit algérien, Jean-Louis Hurst, alias Maurienne, animera un forum à la librairie du Monde Libertaire, le samedi 26 octobre, à 16 h 30.
Ce forum aura pour base son livre, Le Déserteur, publié en 1960 aux éditions de Minuit, et réédité dernièrement par Manya.
En avant-première, l’auteur, nous livre son sentiment sur son engagement au côté de la résistance algérienne et sur le non-engagement, conférant à une criminelle passivité, de la société française de l’époque.
Article de Maurice Joyeux parudans Le Monde libertaire, n° 122, mai 1966
C’en intentionnellement que j’ai signalé, contrairement à la coutume, le nom du préfacier de cet ouvrage mince par son volume mais capital, non pas par son contenu, banal, hélas ! par ces temps de barbarie, mais par la valeur symbolique qu’il revêt. — Henri Alleg, voyons, souvenez-vous ? Il y a quelques années, dans la même édition, un autre livre paru, qui était signé Henri Alleg. Le titre : « la Question » ! Déjà à cette époque un certain nombre d’intellectuels distingués s’agitaient autour de ce livre comme ils le font aujourd’hui. Les mêmes peut-être, si on excepte quelques-uns aujourd’hui installés confortablement à Alger.
Article de Mato-Topé paru dans Le Monde libertaire,n° 978, 8 au 14 décembre 1994
Bab El Oued City a été réalisé dans l’urgence et dans des conditions à la fois pénibles et dangereuses : dans les rues d’Alger de 1993, la terreur règne et il ne fait pas bon être saltimbanque. De cette situation de quasi guerre civile, le film porte évidemment les stigmates et quelques scories formelles bien mineures. Car, jamais comme dans Bab El Oued City, la question de la forme ne paraît aussi secondaire.
Article signé M.C.L. paru dans Le Monde libertaire, n° 519, 23 février 1984
IL en a été de la révolution algérienne comme de la révolution russe et comme de tant d’autres révolutions à la mode de la course au pouvoir sans partage d’un parti ou d’une clique : le cannibalisme politique y a fait des ravages. Un cannibalisme d’un genre un peu particulier, cependant, en ce qui concerne l’Algérie. Un cannibalisme qui non seulement a dévoré ses propres enfants mais également son ou ses pères. Un cannibalisme œdipien, donc !
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